Avec Abbas, pour la Palestine


Mehdi Benomar
Lundi 9 Novembre 2009

Avec Abbas, pour la Palestine
Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a informé les différentes instances politiques du peuple palestinien de son intention de ne pas briguer un nouveau mandat lors des élections présidentielles prévues début de l’année 2010. L’information a très vite fait le tour du monde suscitant commentaires et supputations. Cette décision a également interpellé la classe politique aussi bien dans la région que dans les capitales concernées et intéressées par la situation tendue – un euphémisme !- qui prévaut au Moyen-Orient du fait même de la question palestinienne. Des réactions officielles ont été déjà enregistrées dont celle du Royaume du Maroc appelant le leader palestinien à surseoir à cette décision. La Ligue arabe a fait aussi une déclaration allant dans ce sens. La jeune télévision palestinienne fait diffuser des reportages montrant des citoyens palestiniens demandant explicitement à leur président de se représenter et de continuer à présider aux destinées du peuple palestinien…Ils en parlent non sans émotion car la situation est déjà trop compliquée pour eux.
 Bref, Mahmoud Abbas a déjà marqué un point par cette initiative éclipsant même les retombées médiatiques de la visite dans la région de la star de la politique étrangère américaine Lady Clinton…Mais au-delà de toute approche politicienne de la décision du président palestinien, celle-ci ne manque pas de valeurs symboliques ouvrant sur un large paradigme de lecture. Au premier degré, cette décision renvoie à une certaine lassitude face à ce qui n’échappe pas à la dramaturgie d’un scénario absurde. Lassitude car derrière la fonction, il y a l’homme, il y a l’être humain qui voit ses  efforts réduits à néant, qui voit son peuple s’entredéchirer, qui voit l’horizon de paix auquel il a consacré sa vie s’éloigner davantage. «Ce n’est pas une manœuvre», a martelé Mahmoud Abbas.
L’homme est tout simplement fatigué à 74 ans.  C’est une dimension essentielle qu’il ne faut pas occulter. Il faut la comprendre bien au contraire. Mais ce n’est pas tout. La décision de Mahmoud Abbas ouvre aussi sur de vastes interrogations y compris celle-ci : faut-il émettre une opinion sur une décision palestinienne ? Faut-il continuer à toujours donner des avis fort autorisés sur tout ce qui relève de la vie politique palestinienne ?  En effet, la Palestine est devenue comme le foot, plus exactement comme notre équipe nationale de football, tout le monde a un avis sur la solution à choisir, sur la voie à suivre…A quand un peu de répit pour ce peuple martyr ? Feu Mahmoud Darwich disait fort pertinemment et non sans dépit : «Epargner tant d’amour…libérez-nous de cette étreinte qui nous étouffe ». Longtemps, la cause de ce peuple a été intégrée à une équation qui le dépasse retardant sans cesse l’arrivée d’une solution, d’une issue. On a par exemple refusé aux Palestiniens de revendiquer une solution nationale sous prétexte que la cause est panarabe et que la libération de la Palestine passait par la libération de la Nation Arabe( ?)… Un dictateur a même occupé un pays voisin, plongeant la région dans une guerre de cent ans, sous prétexte que la route d’Al Qods passait par  là. Ce peuple aura tout vu, tout entendu, tout enduré…pour une cause abstraite, métaphysique…Alors qu’aujourd’hui, au moment  où il jouit d’une relative autonomie, son président prend une initiative inédite et insolite dans une région habituée aux républiques héréditaires et aux présidences à vie… Des voix s’élèvent de partout autour du cas Abbas ; faut-il venir lui dicter un avis sur la décision à prendre ?…  encore une fois, ce qui semble une décision de souveraineté interne voire du libre arbitre pour une personnalité, nous ne laisse pas indifférent. Oui, Abbas devrait se représenter pour aller de nouveau au charbon, pour continuer sur la voie qu’il a inaugurée dans la douleur et le sang. Oui, une nouvelle fois on se permet de commenter la vie politique palestinienne pour dire combien il est crucial pour le devenir de l’ensemble du projet de paix que Abbas soit là. Abou Mazin, encore un effort, pour la Palestine que tu as toujours aimée, que tu as servie souvent dans l’anonymat et avec beaucoup d’ingratitude. Faut-il rappeler à ce propos que l’homme qui a hérité de la confiance de Yasser Arafat est traîné dans la boue par le réseau de propagande de l’Emirat islamiste installé, suite à un coup d’Etat, à Gaza? En effet, pour une large partie de l’opinion publique influencée par le Hamas et ses relais locaux, Abbas est «l’homme d’Israël».  C’est triste et tragique quand on sait l’ouvrage énorme accompli par cet homme pour que la question palestinienne devienne une affaire politique internationale, selon les normes de notre temps.  Un jour viendra – lointain peu-être- où le peuple palestinien saura tout le travail accompli par Mahmoud Abbas, alias Abou Mazen, pour la cause palestinienne ; souvent dans l’anonymat, souvent au risque de sa vie, souvent dans l’ombre, il était l’homme des missions difficiles, voire impossibles. Homme de confiance de Arafat, son bras droit dans les négociations les plus ardues, c’est là que la stature d’homme d’Etat s’est forgée  alors que d’autres couraient derrière une pseudo légitimité dans leur bulle médiatique via les chaînes satellitaires et les mots d’ordre fanatiques.
Il fait partie de l’histoire positive de son pays, sa part de lumière. Il mérite toute la confiance de son peuple et de ses amis sincères. 

Shimon Pérès à Abbas: “Ne renoncez pas”

Le président israélien Shimon Pérès a appelé Mahmoud Abbas à revenir sur sa décision de ne pas se représenter aux élections, lors d’une série d’hommage à Yitzhak Rabin samedi.
Des milliers de personnes s’étaient rassemblées sur la place de Tel Aviv où le Premier ministre israélien avait été abattu le 4 novembre 1995 par un Juif extrémiste opposé à ses efforts de paix. Avec Yitzhak Rabin, Shimon Pérès et Mahmoud Abbas font partie des signataires des Accords d’Oslo (1993). Le président israélien l’a rappelé à son homologue palestinien samedi soir. “Je me tourne vers vous en tant que collègue”, a lancé Shimon Pérès à Mahmoud Abbas. “Ne renoncez pas”.



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