Abdeslam Chaouch : Les investigations doivent se poursuivre jusqu’à ce que l’affaire Mehdi Ben Barka soit élucidée


Lundi 12 Mai 2014

Abdeslam Chaouch : Les investigations doivent se poursuivre jusqu’à ce que l’affaire Mehdi Ben Barka soit élucidée
Voici, par ailleurs, le texte de l’intervention prononcée par Me Abdeslam Chaouch, l’un des fils d’un disparu à Ouazzane, dans le cadre de ce colloque :
«Nul ne peut invoquer comme excuse l’ignorance de la loi, le droit et le devoir.
La justice c’est la justice : elle n’était comme elle ne sera jamais transitoire ; au niveau procédurier ou sur le fond des droits, dans le cadre politique général ou sectoriel.
En effet, la légalité de la justice comme sa qualité relève de la nature du système politique.
Le Maroc, notre pays bien-aimé, au cours de son histoire, a connu une évolution anormale.
Pour ces raisons parmi d’autres, la lutte pour l’instauration de la vraie démocratie était et restera acharnée.
Les Marocains et leurs forces démocratiques ont subi plusieurs formes d’atteintes aux droits et l’usage de la force par l’Etat, d’où les violations flagrantes des droits de l’Homme.
De 1994 à 2003, une réconciliation avec quelques victimes ou avec leurs familles (disparition et liquidation physique) a été initiée en avançant le mot d’ordre : "La belle grâce" ou "La clémence meilleure". Cette opération visait, entre autres, à assurer au système politique de continuer à fonctionner avec les mêmes responsables soupçonnés d’enlèvements, de disparitions forcées, de tortures et séquestrations, de liquidations physiques, de violations des périodes de garde-à-vue et  de violation des principes du procès équitable.
A noter que même après 2000, des cas de violations ont été soulevés surtout à l’occasion du 9 septembre 2001 et 16 mai 2003 et continuent de l’être.
La Constitution n’a été que sous pression du Printemps arabe. 
Concernant la réforme de la justice, elle reste une ambition lointaine du même niveau que la lutte contre l’impunité qui n’est que le droit inaliénable de chaque peuple à connaître la vérité sur les crimes commis dans le passé, et le droit de préserver la mémoire collective.
La réconciliation sans l’établissement de la vérité explique notre grande inquiétude quant au traitement officiel réservé aux dossiers en suspens qui dépassent les 66 cas.
La vérité sollicitée ne se limite pas en :
- La réparation des préjudices, l’indemnisation des victimes.
- Le parachèvement de l’harmonisation de la législation nationale avec les conventions et accords internationaux.
- La nécessité d’entreprendre des réformes politiques constitutionnelles et institutionnelles.
Mais cette vérité exige le respect de la Constitution de 2011, notamment l’article 27 qui garantit le droit à l’information et la publication de toute la vérité relative au sort de tous les cas de disparition forcée.
Elle exige également l’opérationnalisation pleine et entière de la recommandation de l’Instance équité et réconciliation pour que les investigations soient poursuivies jusqu’à l’élucidation de l’affaire Mehdi Ben Barka.
Pour réaliser ce but, il suffit d’avoir la volonté politique et le courage d’un homme d’Etat démocrate.
Il est temps également de mettre un terme au redéploiement des agents dans différents organes de l’Etat ou de ses appareils qui sont responsables de toute forme de violation des droits de l’Homme et de les placer à la disposition d’une justice indépendante  et compétente.
Priver la victime de toute forme de protection juridique est l’un des objectifs  de la disparition forcée. En contrepartie, les responsables de  ces actes criminels jouissent toujours de la protection politique et même judiciaire dont l’impunité. 
En conséquence, les interpellations doivent se poursuivre pour avoir toute la vérité. 
Des questions importantes se posent toujours :
- Pourquoi la réforme de la justice est-elle  toujours en suspens et qu’il y a une contre-attaque contre des juges courageux?
A-t-on peur, mais de qui? Des appareils de l’Etat et des agents d’autorité qui ont exécuté les opérations d’enlèvements et de liquidations physiques et qui sont toujours en poste  ou de la vérité des cas de la disparition des grands hommes et de l’histoire.
Que la vérité soit entendue et rendue. 
Camarade, Mehdi Ben Barka, vous nous avez beaucoup manqué».    


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