​Abdallah Baha ou l'art de se taire


Par Driss Abbadi *
Samedi 13 Décembre 2014

​Abdallah Baha ou l'art de se taire
Ceci est un hommage à un homme que j'ai connu il y a une dizaine d'années, que j'ai apprécié pour son ouverture d’esprit, sa précision des choses et d’autres qualités qui m'ont inspiré ce papier dont le contenu s’adapte à notre actualité : l'homme était silencieux, discret, sage, posé, concentré, évitait la confrontation, croyait en la progressivité des réformes, voyait loin sans se précipiter... 
Un homme-référence en matière de maîtrise de soi en société, une qualité que, jeunes et moins jeunes, devraient développer en ces temps de "démangeaison" du dire, en cette époque d'une «étrange maladie» du parler qui s'empare de beaucoup qui n’ont rien à dire, un art de la controverse, l'art qu'utilisent tous ceux qui veulent avoir raison…  Si Abdallah Baha, lui, avait l'art de la bonne contenance (on dirait couramment l’art de tourner sept fois la langue dans sa bouche avant de parler...). C'était un sage, alors que selon les anciens, le «premier degré de la sagesse est de savoir se taire, le second est de savoir parler peu, et de se modérer dans le discours, le troisième est de savoir beaucoup parler, sans parler mal et sans trop parler, alors que le silence est une composante fondamentale de l'éloquence». 
La personnalité discrète et silencieuse de Si Abdallah Baha nous enseigne que la réserve nécessaire pour bien garder le silence dans la conduite ordinaire de la vie et encore plus dans la conduite de l'action publique, n'est pas une moindre vertu, que l'habileté et l'application à bien parler…le silence du sage vaut peut-être quelquefois mieux que le raisonnement du philosophe...l'homme ne «se possède plus que dans le silence : hors de là, il semble se répandre hors de lui-même, et de se dissiper par le discours, de sorte qu'il est moins à soi, qu'aux autres».
La façon de se taire de Si Abdallah ne signifiait pas fermer son cœur, sa discrétion n'en faisait pas quelqu'un de sombre. Au contraire, l'homme n'attendait pas que les gens viennent à lui, il allait vers eux. C'était l'homme de l'ouverture, de la conciliation et de la médiation... Mais croyait fermement qu'il y avait un temps pour se taire comme il y a un temps pour parler…Un proverbe arabe dit : «Sur l'arbre du silence pendent les fruits de la paix». 
Paix sur Si Abdallah

* Professeur à l’Université Hassan II – Casablanca


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