-
Economie bleue: Omar Hilale souligne l’importance de la coopération Sud-Sud pour la souveraineté alimentaire en Afrique
-
Le chef de la diplomatie réitère les fondamentaux de la position du Maroc concernant le Moyen-Orient tels que définis par SM le Roi
-
COMHAFAT : Les chefs de délégation saluent l'initiative Atlantique de SM le Roi pour un continent intégré et prospère
-
Les Emirats arabes unis et le Bahreïn réaffirment leur plein appui à la souveraineté du Maroc et au Plan d'autonomie
-
Le soutien international grandissant à la marocanité du Sahara mis en avant à New York
Ce jeudi 2 avril, le Groupe parlementaire socialiste à la Chambre des représentants organisait une rencontre d’étude sur « L’avortement, une question de société ». La question n’est pas nouvelle pour les Usfpéistes qui ne cèdent pas à un effet de mode hautement opportuniste depuis la décision Royale appelant à la réflexion sur une réforme de la législation pour mettre fin à l’avortement clandestin. « Au dernier congrès de l’organisation des femmes ittihadies la légalisation de l’avortement a été grandement débattue. Les militantes du parti avaient alors poussé un cri du cœur pour que cesse le drame de l’avortement clandestin », rappelle Driss Lachguar. A l’ouverture de la journée d’études, le leader socialiste a planté le décor. Pour les socialistes marocains, l’avortement est une question sociétale et toute loi en la matière doit être en phase avec le droit à une vie digne et saine. « Oui au droit à la vie mais aussi au droit à la liberté et au libre choix », martèle D. Lachguar tout en appelant avec force à l’Ijtihad des oulémas éclairés.
Quand le hanafisme
autorise l’avortement
Et si les oulémas éclairés regardaient justement du côté du rite hanafi, comme le propose A. Dialmy ? « On ne peut pas réduire l’islam à la seule école malékite. Force est de constater qu’il y a un caractère doctrinaire malékite des articles anti-avortement du Code pénal marocain. Un caractère qui ne prend pas en considération les causes et circonstances de la grossesse (viol, inceste, handicap mental) ni le statut du fœtus. Plus encore, ces articles ignorent le pluralisme juridique islamique. Le hanafisme, par exemple, autorise l’avortement en cas de viol, d’inceste, d’handicap mental, de malformation du fœtus », explique le sociologue.
Le débat sur l’avortement ne saurait se tenir valablement si la société continue de porter des œillères et de tenir un discours hypocrite. La société marocaine évolue, s’adapte à l’air du temps, bref elle se sécularise. Chez les jeunes, et tous les sociologues s’accordent à le reconnaître, il n’y a pas d’illégalité sexuelle juridique ou religieuse.
Selon une enquête effectuée par le ministère de la Santé, 56% des jeunes marocains (filles et garçons) ont des relations sexuelles superficielles avant le mariage. Ils sont 25% à déclarer à avoir de tels rapports avec pénétration. La fréquence des relations sexuelles avant le mariage est désormais un indicateur sociologique fort surtout lorsque l’on sait que l’âge moyen du premier rapport est de 16,5 ans pour le Marocain et de 17, 8 pour la Marocaine.
« Au Maroc, on se marie plus tardivement. L’âge moyen de mariage est de 26 ans pour les filles et 31 ans pour les hommes. Soit 15 années de plus de célibat. 15 années nouvelles qui donnent à voir l’établissement de relations nouvelles en dehors de la loi. De telles relations sont considérées comme de la débauche et sont punies par la loi au même titre que l’avortement. Ce qui me fait dire qu’il est temps de faire de la loi une passerelle pour que la société aille de l’avant », fait valoir le sociologue Driss Bensaïd. L’universitaire l’affirme sans ambages : il faut réformer la législation relative à l’avortement. Mais attention, prévient-il, il faut se garder de faire preuve d’une vision parcellaire. « Sur les plans politique et juridique, les questions relatives aux femmes montrent l’omnipotence d’une tutelle. Aujourd’hui, le mouvement progressiste de gauche est invité à clarifier son projet de société en redéfinissant les priorités sociétales.»
Pour une politique pénale
fondée sur le genre
La nécessaire réforme de la loi. L’avocate et activiste des droits des femmes Khadija Rougany est formelle : il ne faut pas s’en tenir au seul amendement de l’article 453 du Code pénal interdisant l’avortement. Dans les rangs du mouvement féminin auquel elle appartient, on en appelle à une réforme globale du Code pénal dont la structure même ignore les droits des Marocaines. «Nous militons en faveur d’une politique pénale fondée sur le genre. Quant à la question de l’avortement, elle devrait s’inscrire dans le cadre de la liberté de la femme à prendre ses propres décisions comme celle d’enfanter ou pas. Les articles sur l’avortement sont insérés dans le chapitre relatif à la protection de la famille et la morale. Pour moi, c’est lourd de sens », soupire Me Khadija Rougany.
L’article 453 du Code pénal criminalise l’avortement et le punit de 5 à 20 ans d’emprisonnement. Chez nous, il est autorisé dans les seuls cas où la santé ou la vie de la mère est en danger et après autorisation du mari. Résultat, l’avortement clandestin, médicalisé ou pas, est devenu un véritable drame au Maroc. Environ 600 avortements clandestins sont tous les jours effectués dans des conditions sanitaires souvent catastrophiques.
A la tête de l’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin, Chafik Chraïbi a été un pionnier dans ce combat qui lui a récemment coûté sa carrière. Ce qui ne l’empêche pas de plaider pour un amendement de l’article 453 qui autoriserait l’interruption de grossesse si « la santé physique, mentale et sociale de la mère est menacée. » « C’est à travers un cadre juridique clair que nous pourrons éviter les drames et les vies humaines détruites que je rencontre tous les jours », conclut le Pr Chraïbi.