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Si la crise de l’enseignement au Maroc est au cœur de toutes les rencontres et de tous les rapports, la question est bien loin de susciter l’intérêt des parlementaires. C’est l’une des principales conclusions auquel est arrivé le rapport consacré au contrôle parlementaire en matière d’éducation et d’enseignement, élaboré par le Médiateur pour la démocratie et les droits de l’Homme.
« L’intérêt que porte l’institution parlementaire aux questions de l’enseignement et de la formation reste très limité. En effet, le taux des questions en la matière ne dépasse pas 10,20% du total des questions posées. Ce qui signifie que la crise du secteur et le débat qui l’accompagne n’ont pas d’écho significatif au sein d’une institution censée être, par excellence, un espace de débat ».
Le constat tombe comme un couperet, et il est valable aussi bien pour la Chambre des députés que celles des conseillers, même si les premiers posent légèrement plus de questions que les seconds. Plus encore, l’absence d’intérêt parlementaire pour un secteur sinistré, l’enseignement en l’occurrence et qui a dicté un plan d’urgence gouvernemental, est le fait aussi bien de la majorité que de l’opposition. En fait, personne ne tire son épingle du jeu et les parlementaires, ceux-là mêmes dont l’une des principales missions est de contrôler l’Exécutif, ont été pris en flagrant délit de généralités. Soumises à l’évaluation de ceux et celles du « Médiateur pour la démocratie et les droits de l’Homme » que dirige l’activiste Khadija Marouazi, les questions orales et écrites relatives à l’enseignement que posent députés et conseillers sont générales. « Les questions sont loin d’être précises quant à la nature des problèmes et des problématiques qu’elles soulèvent, d’où le caractère vague des réponses du gouvernement », relève ce rapport qui risque de ne pas plaire sous la coupole.
Pour procéder à ce travail d’évaluation du contrôle parlementaire, ceux et celles du « Médiateur » ont retenu les questions orales et écrites par 4 groupes parlementaires, de la majorité et de l’opposition : le groupe socialiste (USFP) le groupe Rassemblement et Modernité que composent le RNI et le PAM, l’Alliance socialiste formée par le PPS et le FFD et enfin les islamistes du PJD. Et qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition, les groupes parlementaires font montre d’un manque de professionnalisme qui n’a pas échappé aux scrutateurs du « Médiateur ». Confusion dans l’utilisation des questions orales et écrites, récurrence de thématiques comme celles relatives aux infrastructures, l’équipement, les ressources humaines ou encore la vie scolaire. Problème, en matière d’enseignement, les questions de la législature actuelle ressemblent à s’y méprendre à celle de la législature précédente (2002-2007).
Les mêmes questions que la législature précédente !
Nos parlementaires seraient-ils des cancres ? Il y a quelques motifs de le penser, outre le fait qu’ils posent exactement les mêmes questions depuis plus de six ans, ignorant qu’il y a un nouveau gouvernement, un nouveau ministre de l’Enseignement et, surtout, un plan de sauvetage de ce secteur. Les quatre groupes parlementaires, échantillon du « Médiateur », ont par exemple complètement ignoré des questions concernant l’enseignement dans le monde rural, l’enseignement privé, l’enseignement pré-scolaire, la recherche scientifique ou encore l’éducation des personnes aux besoins spécifiques et le contrôle des programmes de lutte contre l’analphabétisme.
« Il y a une vraie difficulté à identifier les sources auxquelles recourt le parlementaire pour poser ses questions. S’agit-il des électeurs, des médias ou de son propre parti d’autant que la question du parlementaire ne se réfère ni à des enquêtes ni à des recherches sur le terrain et encore moins à des chiffres ou à des données », constate le rapport incendiaire du « Médiateur » qui épingle les questions écrites des islamistes du PJD. « L’écrasante majorité de leurs questions écrites ont trait à des cas individuels ». Vous avez dit intérêt public ?
Cette association qui signe ici une vraie première en procédant à une évaluation ne se contente pas de procéder à un simple travail empirique. De cette observation du contrôle des parlementaires à travers les questions relatives à l’enseignement, ceux et celles du « Médiateur… » ont émis des recommandations essentiellement en direction de l’institution parlementaire, du gouvernement et de l’Etat. Aux parlementaires, c’est une véritable mise à niveau qui est prescrite pour que les questions se fassent précises pour exprimer de manière claire et intelligible les problèmes qu’elles sont « censées résoudre dans le domaine de l’enseignement ». Dans la foulée, l’ONG pointe la majorité parlementaire à qui il est fortement demandé d’intensifier son contrôle de l’Exécutif, une action qui n’affecterait en rien sa participation au gouvernement de Abbas El Fassi, précise le rapport du « Médiateur ».
Dans le chapitre des recommandations, le gouvernement n’est pas en reste. L’Exécutif est sommé de répondre dans les délais constitutionnels, 20 jours maximum, aux questions des parlementaires et d’instaurer un mécanisme de suivi des engagements pris dans les réponses gouvernementales.
Enfin, l’Etat est invité à doter d’expertise l’institution parlementaire. Bref, plus de ressources humaines en phase avec les questions sociales, culturelles, éducatives et des spécialistes dans les domaines juridique, législatif, budgétaire et communicationnel.
Sous la loupe de la société civile, le Parlement a fortement besoin d’un lifting. Les professionnels de la politique sont appelés à se faire les « pros » de l’action législative et du contrôle de l’Exécutif. Et visiblement un tel professionnalisme vient par l’expertise et pas seulement par les joutes oratoires et le show politique.