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A moins de 100 jours de l'élection présidentielle de novembre, le retrait de la candidature du président sortant de 81 ans, Joe Biden, retire à Donald Trump la possibilité d'attaquer sa nouvelle adversaire sur son âge.
Mercredi, il a accusé la candidate démocrate d'être "devenue noire" pour des raisons électoralistes. "Elle était indienne à fond et, tout d'un coup, elle a changé et elle est devenue une personne noire", a-t-il déclaré lors d'une rencontre avec des journalistes afro-américains à Chicago.
Un "manque de respect", selon Kamala Harris, née d'un père jamaïcain et d'une mère indienne, qui a toujours fièrement mis en avant ses origines en tant que première femme, noire et originaire d'Asie du Sud à être élue à la vice-présidence.
Donald Trump n'en est pas à son coup d'essai: dès les années 2010, il s'est appuyé sur les théories du complot qui accusaient à tort le président de l'époque Barack Obama, dont le père est kényan, de ne pas être né aux Etats-Unis.
Dès les années 1970, Donald Trump, alors promoteur immobilier, avait été poursuivi pour discrimination contre les personnes noires souhaitant louer des appartements dans ses propriétés. En 2017, il avait implicitement soutenu des manifestants suprémacistes blancs.
Pour Scott Jennings, ancien conseiller de George W. Bush interrogé par CNN, l'ancien président a mis un pied dans le plat mercredi. Le consultant a à peine eu le temps de se demander s'il y mettrait le second que l'ancien président a enfoncé le clou en relayant jeudi une vieille photo de Kamala Harris portant un sari.
Cette polémique intervient à un moment clé: depuis l'arrivée en fanfare de Kamala Harris dans la campagne, "plus personne ne parle de la tentative d'assassinat" à laquelle il a survécu mi-juillet, note Keith Gaddie, professeur de sciences politiques à l'université chrétienne du Texas.
Ce dernier voit aussi un sens au contexte choisi par le candidat républicain pour cette remarque, une conversation avec trois journalistes afro-américaines devant un public de journalistes noirs: il a voulu jouer le rôle du "gladiateur dans l'antre du lion" pour sa base d'électeurs blancs alors qu'il essaye pourtant de séduire l'électorat afro-américain.
L'échange avec les journalistes a été houleux, le candidat ayant à plusieurs reprises accusé l'une d'elles de relayer des "fake news", tout en attaquant avec véhémence Kamala Harris, métisse comme plus d'un dixième de la population américaine.
"Il a décidé de mener une bataille contre son opposante par proxy, en attaquant des journalistes afro-américaines", ajoute Keith Gaddie.
Pour Bill Kristol, ancien chef de cabinet du vice-président républicain Dan Quayle (1989-1993), le but était aussi de raviver les critiques sur "l'authenticité" de Kamala Harris, déjà utilisées pour la campagne présidentielle de 2020.
"Trump n'a aucun sens de ce qu'est la décence. Ce serait bien que cela soit disqualifiant", a-t-il écrit dans une newsletter pour le site The Bulwark. "Mais la décence ne prévaut pas toujours dans notre monde (...) L'indécence doit être exposée au grand jour et dénoncée."
Les analystes sont partagés sur l'efficacité de la stratégie de Donald Trump.
Cet attachement à utiliser les origines de ses adversaires "a fait de lui l'incarnation du conservatisme populiste en 2011 et ses attaques contre les Mexicains et les musulmans ont joué un rôle décisif dans sa victoire en 2016", rappelle Donald Nieman, professeur à l'université de Binghamton.
"Cela attise la passion de sa base et c'est important. Mais cela rebute aussi beaucoup d’électeurs indécis, clés pour remporter les élections de nos jours", ajoute-t-il.
Pour le chercheur Nicholas Creel, de l'université publique de Géorgie, "Trump a fait du Trump" et cette sortie n'est selon lui pas "une stratégie digne d'un grand-maître des échecs" mais bien "un commentaire sans aucun égard de la part d'un vieil homme au racisme latent".