Trois questions à Latefa Ahrrare

Libé : Quelle est votre réaction suite aux propos de Zemzami ?

Venant de lui, cela n’a rien d’étonnant. Mais il doit nous éclairer d’abord : au nom de qui nous parle-t-il ? En tant qu’ex-député, qui est un statut politique, régi par une Constitution que tout le monde connaît ou fquih, et l’on sait que la fetwa est organisée au Maroc et a ses instances particulières ? Autrement, c’est purement et simplement une incitation à la haine, sinon plus !

Quelle interprétation faites-vous cependant de cette déclaration ?

C’est clair comme l’eau de roche. Le «théoricien des carottes» entend semer l’amalgame entre ma profession en tant qu’artiste, comédienne et metteur en scène, qui veille, autant que faire se peut et avec ses moyens artistiques particuliers, à passer des messages artistiques, esthétiques et humains, d’une part, et un courant d’idées dans l’espace public et qui travaille dans la sphère associative et politique. Je ne suis pas membre de Femen, et je ne suis ni pour ni contre, dans la mesure où chacun de nous a le droit d’exprimer dans les limites de la loi ses idées et aspirations.  
Pourquoi fait-il cela à votre avis?

C’est toujours la même stratégie bien étudiée : semer l’amalgame, la confusion, et le flou  pour toucher les petites gens et jouer sur la fibre religieuse et faire prévaloir des messages de haine et de division entre les membres d’une même communauté. Se positionner carrément contre l’art est un principe qui commence à perdre de son ampleur. C’est pour cela que Zemzami recourt à cette sorte de zizanie. Une personne intéressée par les «carottes et autres objets sexuels» est moins placée pour parler de l’art, des artistes et du théâtre.