Silence, on n’opère plus à l’hôpital Ibn Sina de Rabat

Un gaz anesthésiant nocif est utilisé pour parer à la pénurie


Narjis Rerhaye
Lundi 4 Mars 2013

Silence, on n’opère plus à l’hôpital Ibn Sina de Rabat
A l’hôpital Ibn Sina de Rabat, l’inquiétude a atteint son paroxysme. Le stock des drogues anesthésiantes, nécessaires à tout acte chirurgical est épuisé. Et  depuis trois  semaines, les chirurgiens sont sommés d’opérer avec les moyens du bord et, surtout, sans l’ isoflurane, l’agent anesthésique volatil de référence.   « On racle les fonds de tiroir et de stocks pour les vraies urgences . Pour le reste, on fait sans», soupire ce chirurgien visiblement excédé.
Face à cette pénurie aussi inexplicable que scandaleuse,  les chirurgiens de l’hôpital Ibn Sina, véritable pierre angulaire du CHU Ibi Sina,  utilisent un gaz anesthésiant, le fluothane connu pour ses effets indésirables, souvent graves. « Ce gaz anesthésiant n’est pas utilisé depuis des années à cause  de ses conséquences  sur les patients et des risques  notamment cardiaques et hépatiques qu’il provoque. Le fluothane  est par exemple interdit en France. Et chez nous, à l’hôpital, il n’était plus jusque-là plus utilisé, » témoigne un chirurgien de cette structure hospitalière tertiaire de Rabat.
Du jamais vu. Dans le principal hôpital de la capitale, on n’opère plus, sinon les vraies urgences, faute d’anesthésiant. Les rendez-vous des grands  malades sont envoyés aux calendes grecques.  Les patients atteints d’une maladie cancéreuse  sont priés de s’en aller et d’attendre des jours meilleurs, c’est-à-dire des jours qui verront  les drogues anesthésiantes enfin livrées à l’hôpital Ibn Sina. « Entre-temps, leur maladie peut malheureusement évoluer. Comment voulez-vous qu’on les opère sans les produits nécessaires à toute anesthésie ? Il ne peut qu’y avoir  un retard dans la prise en charge de ces maladies lourdes qui peuvent très vite changer de stade», s’indigne cette blouse blanche.
Les chirurgiens  ne cachent plus leur colère. Les décès se font de plus en plus nombreux, les malades sont renvoyés chez eux, les hospitalisations d’attente durent plus que de raison.  Des chirurgiens qui vivent surtout avec une angoisse au ventre, celle de ne plus pouvoir  opérer. « Tous les jours, on nous dit que demain  peut-être on ne pourra plus opérer. Les stocks d’anesthésiants sont complètement épuisés . On vit au jour le jour, sans programme opératoire ».
A l’hôpital, aucune explication n’a été jusque-là donnée.  Comment en est-on arrivé à une telle rupture de stock ? A qui incombe la responsabilité de cette rupture de stocks ? Et comment valablement justifier la non prise en charge de malades qui nécessitent des opérations lourdes , faute de drogues anesthésiantes ? Autant de questions qui restent sans réponses sous un gouvernement qui a fait de la reddition des comptes son principal cheval de bataille.
En avril dernier, le ministre de la Santé, le PPS Houcine Louardi était la guest star d’une conférence-débat organisée à Casablanca sur le thème de «Quelle politique de santé pour le Maroc d’aujourd’hui ? ». Ce ministre de gauche avait alors fait la part belle à la nécessaire bonne gouvernance dans les hôpitaux. « Avec l’avènement du Printemps arabe, la population marocaine a rompu le silence pour nous dire dans la rue qu’elle n’est  pas satisfaite de notre système de santé et de nos services. Nous avons une mauvaise image auprès de la population et une mauvaise presse dans les médias, si nous ne corrigeons pas cela, quelle que soit l’importance des investissements dans la santé, ils ne contribueront pas à la paix sociale.Enfin, je considère que parmi tous ces défis, celui de la bonne gouvernance est le plus important parce qu’il facilite la résolution des autres. Or la gouvernance d’un secteur social et de service qui souffre de manque dans ses ressources stratégiques n’est pas à la portée de chacun de nous. C’est pour cela que nous devons chercher cette bonne gouvernance dans la transparence, le partenariat et la mutualisation des efforts de l’ensemble des acteurs de notre système de santé», avait-il en effet déclaré devant un  parterre de blouses blanches.
Moins d’une année plus tard, le scandale de la pénurie d’anesthésiants dans le principal hôpital de Rabat vient confirmer que les beaux discours, monuments de bonnes intentions d’un ministre de gauche, ne remplacent jamais une véritable politique de santé. Le Printemps arabe n’est plus qu’un lointain souvenir…


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1.Posté par Charif le 04/03/2013 20:16
le gaz anesthesie "nocif" est un gaz halogènè appele halotane qui est largement utilise dans tous les hopitaux et cliniques du royaume . Pendant plus de vingt ans, il a ete le seul gaz de cette famille existant et a revolutionner l'anesthesie. il dispose toujours d'une autorisation de mise sur le marche dans notre pays et est largement utilise. Chez certains patients ages obeses, anesthesies plusieurs fois avec ce produit , il peut survenir des toxicite hepatique, cardiaques ou une hyperthermie maligne avec un cas de toxicite pour 25000 anesthesies. il faut noter que tous les gaz decette famille presentent une toxite du meme type mais moindre que pour l'halothane. C'est pourquoi ce gaz a ete abandonne dans les pays occidentaux par principe de precaution. ce n'est pas le cas dans les pays en voie de devellopement en raison du cout bien superieur des autres gaz: 240 dhs pour l'halothane, 480 pour l'isoflurane et 1800 dhs pour le sevoflurane. L'hopital ibn sina a malgre tout introduit l'isoflurane il a 4 ans pour certaines anesthesies mais pas pour toutes l(prés de 50% restant realisees a l'halothane). Depuis la mi fevrier, les stocks d'isoflurane ont été épuisés et les commandes 2013 n'ont encore concretisees pour des raisons reglementaires. le choix etait d'utiliser l'halothane disponible ou de suspendre l'activite operatoire. en concertation avec les medcins anesthesistes et les pharmaciens, la direction de l'hopital a fait le choix du maintien de l'activite chaque fois que possible a l'halothane. Certaines salles operatoires ne pouvait pas etre utilisèes en raison du fait que certains respirateurs d'anesthesie recemment acquis ne permettent pas d'utiliser l'halotane. Enfin, une commande urgente a ete faite le 26 fevrier et les produits receptionnes le 28. L'activite va donc reprendre normalement. La propension de certains professionnels de la presse a voir des scandales ou a les crèer a chaque coin de rue est regrettable et en tirer des conclusion" politiques " sur la credibilite des responsables du secteur l'est d'avantage sans compter. Enfin, il faut noter que ni l'administration de l'hopital ni la direction du medicament n'ont été contactés pour apporter l'information et la contradiction.
L'information est sacrèe, le commentaire est libre !

2.Posté par boubou le 06/03/2013 09:54
Mais où va notre pays avec ce ministre de la santé ? On croyait qu'il allait faire mieux que son prédécesseur
Mme Baddou mais malheureusement il est en train de ruiner le système hospitalier du Royaume. Nous avons demandé au ministre des médicaments anti-hypertension et anti-diabétique pour l'hôpital annexe de
Kasba Tadla, géré par le Dr. Toumzine depuis plus de 4 mois mais rien n'a été entrepris dans ce sens. Une
petite ville constituée par une population dont la majorité vit au dessous du seuil de pauvreté parce qu'elle est à base de retraités de différents services et surtout des anciens militaires et combattants usés par des
années de service passées dans les zones sahariennes. Nonobstant nos appels pour ces pauvres gens,
le ministre est resté sourd muet jusqu'à ce jour.

3.Posté par Averoes le 06/03/2013 22:04
Qui se cache derrière ce Charif qui a tant d'informations sur l'hôpital et qui confirme l'épuisement et la pénurie des drogues anesthésiantes. On se demande pourquoi il n'y a pas eu de démenti si l'information publiée par Libé était fausse. le vrai scandale c'est de cacher la vérité au détriment de la vie des malades. surtout quand on est aussi informé qu'un certain "charif". Heureusement que les syndicats se préoccupent d'un hôpital à l'agonie qu'est devenu Ibn Sina, premier cHU du Maroc. Vous avez dit "Urgences"?

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