Sécurité privée : L’impérieuse nécessité d’appliquer la loi


Sofia Aliamet
Mercredi 7 Avril 2010

Il est des domaines qui échappent encore et toujours aux réglementations existantes. La sécurité privée en fait partie. La loi 27/06 de 2007 est la dernière tentative en date pour essayer de redonner à ce secteur « clé » ses lettres de noblesse. L’autorisation d’exercer est aujourd’hui prévue par l’article 477 du Code du travail. L’article 82, quant à lui, prévoit le versement à la CDG d’une caution d’un montant « équivalent à cinquante fois la valeur globale annuelle du salaire minimum légal ». Toujours selon les textes, le certificat de la CDG attestant au dépôt de caution est obligatoire avant d’exercer.
Seulement voilà, sur les 2000 agences de sécurité environ répertoriées dans le Royaume, une petite poignée seulement  s’acquitte des obligations prévues par la loi, le reste relevant par conséquent du secteur informel.
Aujourd’hui, la désorganisation est telle que  personne n’y trouve son compte, ni les entreprises légales qui sont lésées par l’informel, ni même les autres agences existantes qui doivent faire face à la concurrence féroce dans le secteur. Les gagnants étant ceux qui sacrifient le plus leurs employés sur l’autel des bénéfices.
«Tout le monde se moque de l’expérience dans le domaine et des idées novatrices de certains. On nous encourage à revenir dans nos pays d’origine, mais nous faisons face à une désorganisation complète en termes de sécurité privée», déplore Rachid El Mounacifi, président de l’Association professionnelle des agences de sécurité au Maroc (APASM) et qui dispose de près de 20 ans d’expérience acquise en Suède.
Comme bien souvent dans ces cas-là, ce sont les employés qui subissent le plus de préjudices d’une telle situation. « Ils travaillent près de douze heures par jour, parfois pour seulement 800 dirhams par mois », explique Rachid El Mounacifi en ajoutant que « la plupart du temps, ils font ce que l’on leur dit de faire, sans même savoir pourquoi ils sont là ».
L’autre problème majeur que connaît le domaine de la sécurité privée est celui de la formation. S’il existe bel et bien une école privée à Casablanca, nul ne sait quelle est exactement la valeur de l’enseignement qui y est dispensé. Bien souvent, les agents de sécurité se contentent simplement d’écouter les ordres fournis par leurs employeurs sans se préoccuper réellement de leurs droits, de leurs devoirs et des missions qui leur sont conférées.     Un constat plutôt inquiétant pour les citoyens, car comme le souligne M. El Mounacifi, « sans sécurité, vous ne pouvez rien faire. La sécurité privée n’est rien d’autre que le bras droit de la sûreté publique ». Conséquence de cette « anarchie », il est arrivé dans le passé, que les agents de sécurité remplissent des fonctions qui ne leur étaient pas dévolues, notamment celles de «briser» des grèves.
L’APASM dénonce à l’heure actuelle toutes les dérives que connaît le secteur de la sécurité privée :  manque de réglementation effective, irrespect de la loi 27-06, manque d’écoles de formation, manque de professionnalisme, concurrence déloyale, et salaires misérables, mauvais payeurs, etc. Sont autant de fléaux qui touchent de plein fouet le domaine.
« J’aimerais que les autorités acceptent de dialoguer avec les véritables professionnels de ce secteur afin d’organiser durablement la sécurité privée dans le Royaume», explique le président de l’ASPAM.
A ce jour, des tables rondes ont déjà été organisées mais aucune n’a réellement porté ses fruits, car la plupart des agences refusent encore et toujours de se plier à la législation en vigueur et particulièrement au volet social de celle-ci.
Le secteur qui connaît une croissance exponentielle depuis plusieurs années, a  besoin d’une réelle mutation. Tant que certains continueront d’exploiter leurs employés en augmentant leur marge de bénéfices au détriment de ces derniers. Il est fort à parier qu’aucun changement durable ne parviendra à réformer ce secteur pourtant créateur d’emplois et de richesses.


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