La trame du roman est simple: Yasmina, jeune femme d’origine marocaine ayant grandi en France, est revenue dans le Royaume pour travailler comme chargée de projet dans une association de développement local dont le président n’est autre que l’auteur lui-même dissimulé derrière le personnage. Un jour, en fin de réunion, Yasmina pose à celui-ci une étrange question, bien que somme toute « banale » : Y a-t-il un avenir au Maroc ? Ainsi commence un dialogue qui, comme l’a souligné le professeur de littérature francophone Fatiha Bennani, n’est pas seulement « un dialogue entre le narrateur et Yasmina mais un dialogue destiné à tous ».
En effet, quoi de plus naturel que de s’interroger sur les perspectives d’avenir offertes par notre pays? Comment ne pas le faire, lorsque comme le dit Yasmina elle-même dans le roman « des amis sont partis, des parents n’arrivent pas à retenir leurs enfants » et que « des clandestins sombrent dans les barques de la mort ».
De plus, Rida Lamrini explique que la question est « légitime, éternelle, et en perpétuelle évolution ». Sur les horizons qui s’offrent à nous « il n’y a pas une seule vérité, ni un seul point de vue », ajoute-t-il.
Cette permanence de la question posée explique également l’absence de point d’interrogation sur la quatrième de couverture. Pour l’auteur, ce signe de ponctuation est « le symbole de l’angoisse or la question est sereine car dans notre pays il y a matière à espoir ». Dès lors, le débat est ouvert entre l’auteur et son public. Un jeune homme de 23 ans prend la parole et déclare : « Le Maroc est le plus beau pays du monde ! Mais qu’en est-il par rapport aux jeunes ? Qu’en sera-t-il après face au désintérêt de la politique ? » Lamrini répond que c’est pour les jeunes tout spécialement qu’il a écrit. « Y a-t-il un avenir au Maroc, me demanda Yasmina », comme pour leur ouvrir de nouveaux horizons et pour les inciter à penser que tous les possibles sont encore réalisables… Il exhorte également le jeune homme à « s’intéresser à la politique » car selon lui, les principaux fléaux qui sévissent encore dans le Royaume : chômage, difficulté de se loger, analphabétisme, et pauvreté sont dus à des problèmes de gouvernance.
Par conséquent, pas de langue de bois pour Rida Lamrani qui explique qu’en «tant qu’intellectuel» il se doit de répondre à la question : «A-t-on besoin de monarchie au Maroc?». Néanmoins, il n’y a point de réponse tranchée à la question, seulement une comparaison entre les différents types de régimes et leurs atouts et faiblesses respectifs.
La question de la condition féminine n’est pas non plus occultée. Preuve en est, le personnage de Yasmina qui est finalement le protagoniste principal du roman. La jeune femme est celle qui interroge, bouscule, et pousse l’auteur dans ses retranchements, l’incitant ainsi à peaufiner sa réflexion et à préciser ses réponses.
Rida Lamrini précise également certains points. En janvier 2006, à l’heure où il s’apprêtait à conclure son roman, deux faits d’actualité l’ont incité à écrire les deux derniers chapitres ; la remise du rapport de l’Instance « Equité et Réconciliation » d’abord et le « Rapport sur les 50 années de développement humain » ensuite.
Ces deux évènements ont conforté l’auteur dans la pensée qu’un horizon était ouvert. Finalement, chacun d’entre nous peut apporter sa propre réponse à la question « Y a-t-il un avenir au Maroc ? ». Certains seront plus pessimistes que d’autres, les jeunes seront plus idéalistes mais aussi plus inquiets que leurs ainés, quelques-uns affirmeront que la question n’a pas lieu d’être… Une chose est sûre : tous se sentiront concernés quoi qu’ils en disent, car tous espèrent secrètement que la réponse à la question soit résolument affirmative….