Relancer l'éventail, le pari fou de deux Parisiennes


AFP
Vendredi 10 Mai 2013

Relancer l'éventail, le pari fou de deux Parisiennes
Et si l'éventail redevenait un accessoire de mode? Deux amies ont fait ce pari en ressuscitant Duvelleroy, l'une des plus grandes maisons parisiennes d'éventail du XIXème siècle, qui fournissait les cours européennes et renoue aujourd'hui avec le succès.
Eloïse Gilles montre, passionnée, les archives de la maison fondée en 1827: des dessins originaux, un grand éventail en plume de paon de 1905, une photo du mariage en 1938 du roi Farouk d'Egypte avec Farida qui porte un éventail Duvelleroy...
Il y a aussi "le petit livret de l'usage de l'éventail", de la deuxième moitié du XIXème siècle. A chaque position de l'accessoire correspond un message: il faut le placer devant le visage pour dire "Je vous aime" et contre la joue pour signaler à l'amant "Nous sommes surveillés".
"C'est dingue que l'éventail ait disparu des mains des femmes alors que toutes en avaient, un peu comme les lunettes de soleil aujourd'hui", s'étonne la jeune femme d'une trentaine d'années. Pour elle, c'est "la quintessence de la féminité", "l'accessoire absolu".
Après avoir travaillé pour des maisons de luxe, qu'elle aidait à mieux valoriser leur patrimoine, elle "rêvait de reprendre une maison niche avec un patrimoine à développer". Elle a croisé Raphaëlle de Panafieu, qui "avait toujours un éventail dans son sac", puis elles se sont lancées.
Elles ont "rencontré le monde de l'éventail", les collectionneurs et les éventaillistes qui faisaient de la restauration et Michel Maignan, l'héritier de Duvelleroy, maison qui a fermé sa dernière boutique à Paris au début des années 90. Son grand-père lui a transmis les archives en 1981. "Il avait tout gardé. Quand nous avons découvert ça, c'était le pied total!", s'exclame Eloïse Gilles.
"Cela a été un grand soulagement pour moi, un grand plaisir. J'espérais ça, comme les enfants ne voulaient pas s'y consacrer", raconte de son côté Michel Maignan.
Les créatrices s'inspirent parfois des archives pour imaginer de nouvelles pièces. Elles sélectionnent les couleurs et les matières, puis en discutent avec l'éventailliste avec lequel elles travaillent. Dans son atelier situé à Romans-sur-Isère (Drôme), il fabrique environ 300 pièces haute-façon par an.
Eloïse Gilles parle de cet artisan comme d'"un chef d'orchestre", car jusqu'à quinze corps de métier (tabletier, brodeur, plumassier, etc) peuvent intervenir dans la fabrication d'un éventail haute-façon. Certaines pièces coûtent plusieurs milliers d'euros. Ainsi l'éventail "Mariée en dentelles", avec ses plumes d'autruche blanches, sa dentelle et sa monture en nacre est vendu à 3.050 euros.
Elles ont aussi créé une gamme prêt-à-porter, beaucoup plus accessible, qui est en grande partie fabriquée en Espagne. La première collection d'éventail est sortie en septembre 2010, et six mois après, les deux lignes étaient vendues dans de grands magasins parisiens et dans plusieurs pays. "On ne pouvait pas rêver mieux pour un début!", se réjouit Eloïse Gilles. La chance a été de leur côté: quelques mois après leur lancement, cent pièces uniques de haute-façon leur ont été commandées pour un bal. Et peu après, la starlette Katy Perry a posé avec un éventail rouge Duvelleroy co-édité avec Jean-Charles de Castelbajac, portant le message "Air conditioning".
Elles vendent aujourd'hui à New York, où le grand magasin Bergdorf Goodman est "un de leurs meilleurs clients", mais aussi dans le Golfe, au Japon, à Hong Kong, etc. "Certaines clientes achètent un éventail haute-façon, s'en servent pour une soirée de gala, puis le laissent posé en décoration sur un meuble", raconte Eloïse Gilles.


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