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Mesures, encore et encore
En outre, il a évoqué une série de mesures visant « l'amélioration des compétences professionnelles des éducateurs de l’enseignement préscolaire, à travers l’instauration d’un système de formation de base, et l’adoption de critères précis pour les associations partenaires, en plus de l’intensification de la coordination avec l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH), en tant que partenaire principal dans le soutien des efforts de la généralisation de l’enseignement préscolaire ».
Le lancement du programme "Teaching at The Right Level (TaRL)/enseigner au bon niveau", relatif à la lecture, à l’écriture et aux mathématiques, au profit de plus de 400.000 élèves durant l’année scolaire en cours, a également été souligné et dont les résultats de la phase expérimentale, qui concerne plus de 245.000 élèves, ont démontré, selon lui, « un progrès tangible au niveau de la performance des élèves dans les trois compétences de base, notamment les langues et les mathématiques ».
A noter que l’accent a été mis sur « le renforcement de l'apprentissage des langues de façon équilibrée afin de garantir l’égalité des chances », précisant « qu'il s'agit aussi du renouvellement des méthodes d’enseignement de l’arabe, de l’amazigh et des langues étrangères, et de l’adoption d'outils modernes pour permettre aux élèves de consulter des contenus unifiés ».
A ce propos, le chef du gouvernement a affirmé que la généralisation de l’enseignement de la langue amazighe dans les écoles primaires a été lancée tout en expliquant que « cela va permettre son intégration dans le tiers des établissements scolaires primaires, au profit de plus de 745.000 élèves, soit 19,5% de l’ensemble des élèves du primaire ». Et de poursuivre que « le gouvernement s’est également penché sur l’élargissement de l’enseignement de la langue anglaise au profit de 28% et 62% des élèves des première et deuxième années de l’enseignement collégial, respectivement ».
Par ailleurs, le chef de l’exécutif a mis l’accent sur « le rôle des écoles communautaires dans la réduction des taux de déperdition scolaire, notamment chez la fille rurale. Ainsi, un total de 308 écoles communautaires ont été mises en place au titre de l’année scolaire 2022-2023, contre 226 au cours de l’année scolaire 2021-2022 ». Dans le même sens, le gouvernement a renforcé l'offre éducative par la création de 237 établissements scolaires, dont 65% en milieu rural, portant l'ensemble des établissements d'enseignement public à 12.198 au titre de l’année scolaire en cours, dont 6.795 en milieu rural.
Rien d’extraordinaire ni de révolutionnaire
Pour certains analystes, ces mesures et programmes n’ont rien d’extraordinaire ni de révolutionnaire. Selon eux, l’action gouvernementale en matière d’éduction nationale se focalise, comme ses prédécesseurs, sur le quantitatif et évite le qualitatif.
Autrement dit, l’actuelle équipe gouvernementale met l’accent sur les infrastructures et le nombre de personnes bénéficiaires sans s’attaquer aux vrais défis du secteur, à savoir la faiblesse des acquis des élèves des établissements publics et privés en matière de lecture et d’écriture, la formation inadéquate des enseignants, le redoublement, l’abandon scolaire et la liste est longue.
En effet, nombreux sont les rapports et études qui ont brossé un tableau noir de notre secteur d’éducation nationale. Tel est le cas de celui de l’Instance nationale d’évaluation, dirigée par Rahma Bourqia et dépendante du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS), qui a souligné que « plus de 75% des lycéens sont âgés de plus de 15 ans, soit plus que l’âge « normal » pour ce niveau. Et 38% d’ailleurs des élèves de l’échantillon ont redoublé au moins une fois ».
L’étude relève également que « les acquis des élèves des établissements publics et privés sont faibles, avec une légère différence en faveur du privé, particulièrement en français. Dans le détail, les élèves du tronc commun public «Lettres» enregistrent un niveau en arabe classique qui reste loin de la moyenne de 11 points et un niveau en langue française au plus bas avec 23% seulement des objectifs atteints au niveau national dans l’enseignement public. Les élèves scientifiques ne sont pas en reste : 84% d’entre eux ont eu un score en dessous de la moyenne en mathématiques ».
Les compétences des enseignants sont également pointées du doigt dans le rapport de Rahma Bourqia : « 20% des élèves ont des enseignants qui n’ont pas reçu la formation initiale adéquate dans leurs matières et 60% des élèves ont des enseignants qui n’ont bénéficié d’aucune formation continue au cours des cinq dernières années ».
Le dernier rapport du Programme international de l’OCDE pour le suivi des acquis des élèves, le fameux PISA, a révélé « une régression très inquiétante, puisque 70% des élèves marocains sont en dessous du seuil critique fixé par l’OCDE. Ce qui fait qu’au niveau mondial, le Maroc se classe à la 71ème position parmi les 81 pays participants. Ensuite, il y a les matières scientifiques qui accusent également de grosses lacunes, plaçant le Maroc à la 76ème place. Enfin, concernant la compréhension de textes écrits, le rapport fait état d’une chute de 20 points par rapport à l’étude de 2018. Ce qui montre à quel point les élèves marocains, dans leur majorité, sont aujourd’hui incapables de restituer correctement leurs cours, de montrer qu’ils ont bien compris et qu’ils savent de quoi ils parlent ».
Un autre document réalisé conjointement par l’Instance nationale d’évaluation du CSEFRS et l’UNICEF a affirmé que «l’école publique marocaine traverse une “crise de l’apprentissage”. Les évaluations qui recourent à̀ des tests standardisés, qu’elles soient nationales (PNEA) ou internationales, telles que TIMSS, PIRLS et PISA, confirment le faible niveau des acquis et des compétences d’une part non négligeable de nos élèves dans les écoles, essentiellement au niveau de l’enseignement fondamental ». Et de constater que « le faible niveau des acquis des élèves est tributaire de plusieurs facteurs (…), il est, en effet, largement admis que la qualité d’un système éducatif dépend de la qualité de ses enseignants ».
L’étude a, en outre, révélé que le choix du métier trouvait sa raison dans le fait d’échapper au chômage et obtenir un emploi stable, d’autant plus qu’il est garanti par une rémunération dans la fonction publique. Il est acté, également, que le confort et la souplesse de l’emploi du temps influencent le choix de ce métier (les horaires de travail peu contraignants, vacances scolaires…), ce qui permet de concilier aisément vie professionnelle et familiale. C’est souvent et au demeurant la principale motivation qui pousse les femmes à choisir la profession d’enseignante. L’étude est arrivée à la conclusion que les motivations associées à l’altruisme et à l’amour du prochain ne jouent pas un rôle significatif dans le choix de ce métier. Peu de professeurs interrogés ont évoqué le désir de travailler avec des enfants.
Le Conseil supérieur de l’enseignement, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS) a révélé en 2021 dans un autre rapport que « la majorité des enseignants interrogés estiment que leur formation est peu qualifiante et, à son terme, des dimensions primordiales de l’enseignement (gestion et planification de la classe, pratiques de pédagogie active, etc.) demeurent non maîtrisées’. Les lacunes sont encore plus flagrantes chez les enseignants-cadres des AREF, en particulier ‘les deux premières promotions (2016/2017), qui ont été peu ou pas formées’. L’absence d’un dispositif de formation continue, élaboré selon les besoins des enseignants, ne permet pas non plus de rattraper les insuffisances de la formation initiale et de les rectifier. Le coaching ou l’accompagnement par les pairs sont des mécanismes intéressants, mais leur mode opératoire nécessite quelques réajustements (précisions des missions, moyens logistiques, incitations, etc.) pour assurer l’adhésion des acteurs et augmenter leur rendement. Affaire à suivre.
Hassan Bentaleb