Un mystère enfin levé après plus d'un demi-siècle de travail, d'expositions au compte-gouttes et de silence prolongés.
Et c'est à la romancière Rajae Benchemsi, épouse du peintre, que nous devons ce «déshabillage» d'un être exceptionnel jusqu'alors retranché dans un univers qui lui est propre, fermé même à ses fans et ses admirateurs.
L'ouvrage intitulé « L'intuition créatrice » se veut une explication de l'œuvre de Farid Belkahia, de sa conception de l'art, de son approche, de sa méthodologie et surtout de ses nombreuses interrogations avec, à chaque fois, des remises en cause des fondements mêmes de ses croyances.
Ce faisant, on arpente avec elle, les cheminements de cet artiste à part, de cet ermite du pinceau qui se réfugie dans sa tour d'ivoire pour échapper à la promiscuité de la plèbe jamais au niveau de l'élévation de l'esprit pour inspirer une…. « Intuition créatrice ».
Ce Marrakchi, issu d'une famille safiote (son père fut le premier Marocain à porter un costume européen dans la capitale de Abda) a choisi très tôt le chemin de l'exil pour vivre durant dix ans à Prague (1952-1962) et découvrir un autre monde, celui d'une société égalitaire où la notion de travail voulait dire beaucoup de choses. Son œuvre s'est inspirée des différentes rencontres qui ont jalonné son itinéraire pour façonner son esprit et orienter ses « recherches », sans cesse bousculées par ses découvertes dans un patrimoine culturel sans cesse revisité pour en extraire des rudiments, une sorte de sève créatrice qui a donné vie et couleurs à son œuvre.
L'introduction de nouveaux matériaux dans son travail a complètement changé et bouleversé le travail de Farid Belkahia à nul autre artiste pareil.
Témoignage de sa compagne : « De l'alchimie des matières, des odeurs et des saveurs, l'imagination a accompli le voyage vers la terre et ses minerais. »
Farid Belkahia revient après 15 ans de silence pour enfin exposer à Casablanca à Venise Cadre.
Pourquoi Dar El Beida et non pas Marrakech où il
réside ?
Parce qu'il a gardé de fortes attaches avec la cité blanche où il a longtemps habité à son retour de Prague pour diriger l'Ecole des Beaux-Arts dont il fut le directeur de 1962 à 1974 et contribua au lancement de la revue « Souffles » du poète Abdelatif Laabi.
La galerie Venise Cadre qui abrite cette exposition a eu la bonne idée de confier l'accueil des journalistes, critiques d'art et autres connaisseurs à Madame Sowan, une collaboratrice de grande culture, esthète et exégète en matière de peinture pour guider les pas de tous les amateurs.
Préface Jean-Hubert Martin conservateur général du patrimoine en France.