Ce n’est point fortuit si la question amazighe est intervenue, dans le discours Royal du 9 mars dernier, en tête des axes prioritaires à réviser. Pour les associations amazighes, il est temps de réexaminer cette politique d’insertion formelle de l’amazighité dans la vie publique. Les secteurs de l’éducation, des médias et de la culture, porteurs des premières initiatives d’insertion de cette composante de la culture marocaine ont attesté de l’échec de ce mode d’agir et de cette vision de façade. Un changement s’avère donc nécessaire, pour réhabiliter cette composante essentielle dans ses droits. L’opportunité du débat constitutionnel actuel permet, selon ces associations, de replacer convenablement l’amazighité dans le mouvement des réformes. Mercredi, réseaux d’associations représentatifs du mouvement culturel amazigh ont saisi l’occasion pour soumettre leurs propositions à la Commission consultative de révision de la Constitution. La copie amazighe, ou plutôt les copies visent dans leur globalité à remédier à la marginalisation de l'amazigh et à procéder à sa constitutionnalisation en tant que culture, identité et civilisation, outre son officialisation comme langue nationale. Une mise à niveau s’avère ainsi nécessaire. « Les mesures entreprises depuis le discours d’Ajdir n’ont pas été à la hauteur des aspirations du mouvement amazigh, et les initiatives entamées dans les secteurs d’enseignement, de la culture et des médias manquaient de continuité et de clarté. L’on a constaté que cela ne relève pas d’une vision stratégique, mais uniquement d’une démarche tactique », fait préciser Me Mohamed Bencheikh, secrétaire général du réseau amazigh pour la citoyenneté (AZETTA). Ceci dit, le palliatif constitutionnel ne pourrait se résumer en une constitutionnalisation de la langue à travers son officialisation, car «notre vision à AZETTA, comme nous l’avons d’ailleurs soumise à la Commission chargée d’élaborer le projet de Constitution, consiste à lier les revendications d’ordre culturel et linguistique amazigh aux autres facettes de la démocratie : séparation des pouvoirs et même la nature de la Commission, la forme et le fond de la Constitution… bref le cadre démocratique global», renchérit-il. Le réseau a également proposé la création de nouvelles institutions tels le Conseil national de l'amazigh en tant qu'alternative à l'Institut Royal de la culture amazighe (IRCAM) et l'Académie de la langue amazighe afin de développer cette langue, tout en soulignant la nécessité de promouvoir la recherche académique amazighe en vue d’accorder à cette dernière la place qui lui échoit au sein de l'université, des médias et des établissements scolaires.
De son côté, El Hussein Ait Ba Hsin de l'Association marocaine pour la recherche et l'échange culturel (AMREC) évoque la question de la protection juridique de tous les acquis de l’amazighité au Maroc, soulignant que cette langue est «la propriété de tous les Marocains sans exception ». Selon le mémorandum de l’AMREC soumis à la Commission, «ce dont a souffert l’amazigh, à travers l’histoire, est l’absence de son institutionnalisation. « En dépit de progrès réalisés, beaucoup d’entraves obstruaient l’incorporation de l’amazigh dans la vie publique, en raison de sa non constitutionnalisation, ce qui nécessite à l’heure actuelle de passer à la phase de « protection juridique et constitutionnelle, à travers son officialisation en tant que civilisation, identité et culture », indique M. Aït Ba Hsin. Le mémorandum de l’AMREC n’omet pas de souligner l’importance de la régionalisation dans la nouvelle Constitution, appelant dans ce cadre, à prendre en considération « la spécificité amazighe, les mœurs locales et l’histoire du pays …». Berf, les associations amazighes aspirent à ce que la nouvelle Constitution mette fin aux obstacles auxquels se heurte l’identité amazighe.