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La déperdition
scolaire est un
phénomène dont
la gravité a été maintes fois
soulignée tant par
les médias que par les hauts
responsables
du ministère
de l’Education
nationale. Pour
le délégué de ce département à Zagora, la lutte contre ce phénomène exige l’adoption d’une approche
participative et impose d’œuvrer
de concert avec
le monde associatif.
Libé : Pouvez-vous nous dresser un état de la situation de l’enseignement dans la région de Zagora ?
Omar Addou : Tout d’abord, il faut savoir que la province de Zagora s’étend sur une superficie de 23.000 Km2. Elle est composée de deux communes urbaines (Zagora et Agdez) et de 23 communes rurales. Elle compte 283.368 habitants dont 84% sont des ruraux. La délégation du ministère de l’Education nationale a été créée en 1998. Dans la province de Zagora, il y a aujourd’hui 367 écoles (entre primaires, collèges et lycées). Les collèges couvrent 92% des territoires de la province, tandis que les lycées ne couvrent que 48%. Le nombre des élèves du primaire approche les 6.000, contre 16.217 collégiens et 5.705 lycéens.
Devant le taux élevé de déperdition scolaire, plusieurs associations et organisations ont commencé à déployer des efforts pour lutter contre ce phénomène. Y-a-t-il aujourd’hui des partenariats avec ces associations au niveau de la région de Zagora ?
Pour la délégation de l’Enseignement de Zagora, le partenariat avec le tissu associatif et civil est un défi primordial. Ainsi, depuis que je suis à la tête de la délégation, j’ai déployé des efforts afin de créer des synergies et mettre en place un système de communication avec les associations, notamment pour mener des projets qui sont conçus dans le cadre du Programme d’urgence de l’éducation, d’autant qu’il s’agit d’un programme qui entend remettre l’enseignement sur sa bonne voie au Maroc. Depuis le 10 mars dernier, date de ma désignation en tant que responsable de la gestion de ce secteur vital à Zagora, je considère le partenariat avec le secteur éducatif comme un objectif principal. Ainsi, la délégation a signé des partenariats avec les associations des parents d’élèves afin d’institutionnaliser la relation entre le corps administratif et enseignant, les élèves et les parents. L’objectif étant de mettre en place un plan stratégique pour consolider la coopération entre les associations des parents et les institutions chargées de l’enseignement. Les associations des parents d’élèves sont le partenaire essentiel dans la mesure où les parents jouent le rôle d’intermédiaires entre l’école et leurs enfants. Ensuite, il y a eu des partenariats avec des associations de développement telles que l’Association du développement et de lutte contre la perdition scolaire.
Quels est l’impact du Programme d’urgence sur l’enseignement à Zagora ?
Il faut savoir que le Programme d’urgence est un cadre méthodologique qui vise l’accélération de la réforme de l’enseignement au Maroc. Il se base essentiellement sur la clarification des projets et la période de leur exécution ainsi que la recherche des fonds nécessaires pour leur mise en œuvre. Il a adopté l’approche participative, chose qui permet d’intégrer plusieurs acteurs dans le processus de la réforme de l’enseignement. Parmi les bienfaits du Programme d’urgence, c’est qu’il a mis en place des outils de proximité capables d’assurer la planification, le suivi et l’évaluation des projets mis en œuvre par le ministère. Rappelons aussi que ce programme a permis la mise en place d’une stratégie de gestion des changements et de communication. Je veux dire par « changement » les évolutions au niveau des orientations, et par «communication», l’ouverture de l’école sur son environnement via le partenariat et la quête des fonds.
Peut-on dire que ce sont les mentalités et les traditions qui sont la cause principale de la déperdition scolaire ou bien s’agit-il d’un manque de moyens financiers pour les familles et de l’absence d’écoles de proximité ?
Je pense que cette question est très intéressante. Dans ma propre analyse des phénomènes sociaux tels que la déperdition scolaire, j’associe deux dimensions, à savoir l’espace géographique et les composantes sociologiques. Ainsi, je peux dire qu’il y a deux raisons à ce phénomène : les difficultés géographiques suite à l’éparpillement des populations et douars et les représentations que des gens ruraux et traditionnels se font de la scolarité des filles. Malgré les efforts du ministère de l’Education nationale pour construire des Maisons de l’étudiante et des centres d’accueil des filles rurales, une grande partie des parents continuent à interdire l’école à leurs filles. Devant ces deux dimensions, il faut que tous les acteurs jouent un rôle primordial pour mettre fin à la déperdition scolaire. Parmi ces acteurs, on compte la société civile, les médias, les conseils communaux. Ces derniers devraient participer avec le ministère de l’Education nationale à une grande mobilisation au niveau des villages et promouvoir la culture de l’approche genre afin de rompre avec la culture de discrimination envers les filles. De surcroît, il faut ajouter la pauvreté comme facteur déterminant qui favorise le phénomène de la déperdition scolaire. N’oublions pas également que des causes inhérentes à l’école elle-même favorisent cette déperdition scolaire. Par exemple, dans des milieux ruraux, les enfants éduqués depuis leur naissance en langue amazighe, trouvent des difficultés à s’adapter aux langues arabe et française. Ainsi, le rôle de l’instituteur est d’une grande importance, d’autant qu’il doit veiller au bon déroulement de cette transition au niveau de l’identité linguistique. Ajoutons à cela l’absence d’une institution intermédiaire entre la famille et l’école qui devrait faciliter à l’enfant l’accès à l’école et au cycle fondamental.
Comment pensez-vous lutter contre la déperdition scolaire dans la région de Zagora ?
Il y a aujourd’hui au moins deux visions pour la délégation de Zagora. Il y a la dimension de long terme reposant sur le concept de l’école communale. Cette option permettrait de limiter la problématique géographique de l’éparpillement des douars. Ainsi, un grand nombre d’élèves habitant dans des villages dispersés seront rassemblés dans une seule commune. Du coup, le conseil communal, composé des représentants des différents villages, devient un acteur principal dans l’opération éducative et la gestion, la planification, la définition des objectifs de l’école et l’hébergement des élèves. La deuxième vision est celle de mettre en place l’outil du transport scolaire qui devrait réduire le taux de déperdition scolaire. Cet outil devrait également rassurer les parents, puisque leurs enfants rentreront à la maison après les cours au lieu d’être hébergés dans des internats ou centres d’accueil…
Ne pensez-vous pas que le transport scolaire pourrait n’avoir que des résultats limités eu égard au sous-développement du réseau routier dans la région ?
Bien évidemment. Bien que cette option s’avère de grande importance, le problème des infrastructures pose de grandes difficultés. Ainsi, la lutte contre la déperdition scolaire est une lutte structurelle nécessitant l’intervention de plusieurs acteurs.
Le centre d’accueil des filles rurales – Béni Zoli, créé par l’Association des femmes pour le développement et la solidarité, héberge 22 filles provenant de villages lointains et leur permet de continuer leurs études. Comptez-vous adopter des expériences de ce genre en œuvrant de concert avec le monde associatif ?
Il faut souligner que l’Association des femmes pour le développement et la solidarité est présidée par Majida Chahid qui est une militante de la région et issue d’une famille de militants qui ont une vision moderne en faveur du développement. Par ailleurs, cette association créée par la famille Chahid, est liée aux populations par l’organisation continue de différentes activités touchant tous les domaines civiques et adoptant une approche participative. Ainsi, les parents d’élèves ne peuvent que mettre leur confiance en cette association dynamique et ouverte sur son environnement. Je pense qu’un partenariat avec une association aussi dynamique que l’AFDES ne peut être que bénéfique pour l’éducation et l’enseignement dans la région de Zagora. Personnellement, je compte œuvrer avec toutes les associations citoyennes pour lutter contre la déperdition scolaire dans la région.
scolaire est un
phénomène dont
la gravité a été maintes fois
soulignée tant par
les médias que par les hauts
responsables
du ministère
de l’Education
nationale. Pour
le délégué de ce département à Zagora, la lutte contre ce phénomène exige l’adoption d’une approche
participative et impose d’œuvrer
de concert avec
le monde associatif.
Libé : Pouvez-vous nous dresser un état de la situation de l’enseignement dans la région de Zagora ?
Omar Addou : Tout d’abord, il faut savoir que la province de Zagora s’étend sur une superficie de 23.000 Km2. Elle est composée de deux communes urbaines (Zagora et Agdez) et de 23 communes rurales. Elle compte 283.368 habitants dont 84% sont des ruraux. La délégation du ministère de l’Education nationale a été créée en 1998. Dans la province de Zagora, il y a aujourd’hui 367 écoles (entre primaires, collèges et lycées). Les collèges couvrent 92% des territoires de la province, tandis que les lycées ne couvrent que 48%. Le nombre des élèves du primaire approche les 6.000, contre 16.217 collégiens et 5.705 lycéens.
Devant le taux élevé de déperdition scolaire, plusieurs associations et organisations ont commencé à déployer des efforts pour lutter contre ce phénomène. Y-a-t-il aujourd’hui des partenariats avec ces associations au niveau de la région de Zagora ?
Pour la délégation de l’Enseignement de Zagora, le partenariat avec le tissu associatif et civil est un défi primordial. Ainsi, depuis que je suis à la tête de la délégation, j’ai déployé des efforts afin de créer des synergies et mettre en place un système de communication avec les associations, notamment pour mener des projets qui sont conçus dans le cadre du Programme d’urgence de l’éducation, d’autant qu’il s’agit d’un programme qui entend remettre l’enseignement sur sa bonne voie au Maroc. Depuis le 10 mars dernier, date de ma désignation en tant que responsable de la gestion de ce secteur vital à Zagora, je considère le partenariat avec le secteur éducatif comme un objectif principal. Ainsi, la délégation a signé des partenariats avec les associations des parents d’élèves afin d’institutionnaliser la relation entre le corps administratif et enseignant, les élèves et les parents. L’objectif étant de mettre en place un plan stratégique pour consolider la coopération entre les associations des parents et les institutions chargées de l’enseignement. Les associations des parents d’élèves sont le partenaire essentiel dans la mesure où les parents jouent le rôle d’intermédiaires entre l’école et leurs enfants. Ensuite, il y a eu des partenariats avec des associations de développement telles que l’Association du développement et de lutte contre la perdition scolaire.
Quels est l’impact du Programme d’urgence sur l’enseignement à Zagora ?
Il faut savoir que le Programme d’urgence est un cadre méthodologique qui vise l’accélération de la réforme de l’enseignement au Maroc. Il se base essentiellement sur la clarification des projets et la période de leur exécution ainsi que la recherche des fonds nécessaires pour leur mise en œuvre. Il a adopté l’approche participative, chose qui permet d’intégrer plusieurs acteurs dans le processus de la réforme de l’enseignement. Parmi les bienfaits du Programme d’urgence, c’est qu’il a mis en place des outils de proximité capables d’assurer la planification, le suivi et l’évaluation des projets mis en œuvre par le ministère. Rappelons aussi que ce programme a permis la mise en place d’une stratégie de gestion des changements et de communication. Je veux dire par « changement » les évolutions au niveau des orientations, et par «communication», l’ouverture de l’école sur son environnement via le partenariat et la quête des fonds.
Peut-on dire que ce sont les mentalités et les traditions qui sont la cause principale de la déperdition scolaire ou bien s’agit-il d’un manque de moyens financiers pour les familles et de l’absence d’écoles de proximité ?
Je pense que cette question est très intéressante. Dans ma propre analyse des phénomènes sociaux tels que la déperdition scolaire, j’associe deux dimensions, à savoir l’espace géographique et les composantes sociologiques. Ainsi, je peux dire qu’il y a deux raisons à ce phénomène : les difficultés géographiques suite à l’éparpillement des populations et douars et les représentations que des gens ruraux et traditionnels se font de la scolarité des filles. Malgré les efforts du ministère de l’Education nationale pour construire des Maisons de l’étudiante et des centres d’accueil des filles rurales, une grande partie des parents continuent à interdire l’école à leurs filles. Devant ces deux dimensions, il faut que tous les acteurs jouent un rôle primordial pour mettre fin à la déperdition scolaire. Parmi ces acteurs, on compte la société civile, les médias, les conseils communaux. Ces derniers devraient participer avec le ministère de l’Education nationale à une grande mobilisation au niveau des villages et promouvoir la culture de l’approche genre afin de rompre avec la culture de discrimination envers les filles. De surcroît, il faut ajouter la pauvreté comme facteur déterminant qui favorise le phénomène de la déperdition scolaire. N’oublions pas également que des causes inhérentes à l’école elle-même favorisent cette déperdition scolaire. Par exemple, dans des milieux ruraux, les enfants éduqués depuis leur naissance en langue amazighe, trouvent des difficultés à s’adapter aux langues arabe et française. Ainsi, le rôle de l’instituteur est d’une grande importance, d’autant qu’il doit veiller au bon déroulement de cette transition au niveau de l’identité linguistique. Ajoutons à cela l’absence d’une institution intermédiaire entre la famille et l’école qui devrait faciliter à l’enfant l’accès à l’école et au cycle fondamental.
Comment pensez-vous lutter contre la déperdition scolaire dans la région de Zagora ?
Il y a aujourd’hui au moins deux visions pour la délégation de Zagora. Il y a la dimension de long terme reposant sur le concept de l’école communale. Cette option permettrait de limiter la problématique géographique de l’éparpillement des douars. Ainsi, un grand nombre d’élèves habitant dans des villages dispersés seront rassemblés dans une seule commune. Du coup, le conseil communal, composé des représentants des différents villages, devient un acteur principal dans l’opération éducative et la gestion, la planification, la définition des objectifs de l’école et l’hébergement des élèves. La deuxième vision est celle de mettre en place l’outil du transport scolaire qui devrait réduire le taux de déperdition scolaire. Cet outil devrait également rassurer les parents, puisque leurs enfants rentreront à la maison après les cours au lieu d’être hébergés dans des internats ou centres d’accueil…
Ne pensez-vous pas que le transport scolaire pourrait n’avoir que des résultats limités eu égard au sous-développement du réseau routier dans la région ?
Bien évidemment. Bien que cette option s’avère de grande importance, le problème des infrastructures pose de grandes difficultés. Ainsi, la lutte contre la déperdition scolaire est une lutte structurelle nécessitant l’intervention de plusieurs acteurs.
Le centre d’accueil des filles rurales – Béni Zoli, créé par l’Association des femmes pour le développement et la solidarité, héberge 22 filles provenant de villages lointains et leur permet de continuer leurs études. Comptez-vous adopter des expériences de ce genre en œuvrant de concert avec le monde associatif ?
Il faut souligner que l’Association des femmes pour le développement et la solidarité est présidée par Majida Chahid qui est une militante de la région et issue d’une famille de militants qui ont une vision moderne en faveur du développement. Par ailleurs, cette association créée par la famille Chahid, est liée aux populations par l’organisation continue de différentes activités touchant tous les domaines civiques et adoptant une approche participative. Ainsi, les parents d’élèves ne peuvent que mettre leur confiance en cette association dynamique et ouverte sur son environnement. Je pense qu’un partenariat avec une association aussi dynamique que l’AFDES ne peut être que bénéfique pour l’éducation et l’enseignement dans la région de Zagora. Personnellement, je compte œuvrer avec toutes les associations citoyennes pour lutter contre la déperdition scolaire dans la région.