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Pour lui, l’exercice n’est pas aisé du fait du droit de réserve et du manque de recul nécessaire pour analyser cette nouvelle expérience en tant que chercheur en science politique.
Il estime que le nouveau texte constitutionnel s’inscrit dans un contexte particulier avec deux séquences : celle réformiste autogérée par le Maroc lui-même à partir des années 2000 et une autre plus récente qui a démarré avec les événements du Printemps arabe. Dans ce sens, M. Tozy a évoqué la première séquence marquée par la réforme constitutionnelle de 1996 qui a annoncé les prémices de la réforme constitutionnelle d’aujourd’hui avec une particularité, à savoir que l’initiative de la réforme a été timidement partagée entre le Roi et quelques partis de la Koutla et fondée sur une méthodologie très peu citoyenne.
L’universitaire marocain a expliqué que cette initiative a pris souvent la forme d’un mémorandum non négocié officiellement et que la réponse de la monarchie s’est faite toujours dans le cadre d’une ingénierie technique initiée par des bureaux d’études.
M. Tozy a indiqué que si la réforme de 1996 a donné quelques pouvoirs importants au Parlement et au gouvernement, elle a par contre donné lieu à une vie politique en trois phases et avec trois formes de mise en œuvre de la Constitution. Il y a d’abord la phase Youssoufi I et II marquée par l’existence d’un Premier ministre qui a joué pleinement son rôle. Suivie par la phase Jettou qui s’inscrit dans la continuité de cette séquence mais avec une double légitimité, celle technique et une autre liée à la mise à niveau du Maroc sur le plan international. Et enfin, le gouvernement Abbas El Fassi qualifié de sous-traitant de la vision Royale, ce qui a donné lieu à une vie politique amorphe et moins crispée.
S’agissant du Printemps arabe, il a expliqué qu’il a donné naissance à un nouveau mode opératoire d’action et que le Mouvement du 20 février, en tant que moment et non en tant que mouvement, a été un instant important qui a inscrit le Maroc dans le contexte international du Printemps arabe et a fait accélérer le processus de réformes qui a été déjà engagé. Concernant la question de la composition de la Commission consultative de la réforme constitutionnelle et sa méthodologie de travail, l’intervenant a indiqué que cette commission a été à mi-chemin entre un constituant et une constitution octroyée et qu’elle n’a pas été une Commission d’experts ou de techniciens. « En gros, on peut distinguer quatre profils au sein de cette Commission : le constitutionnaliste ou le technicien de la Constitution ; les militants experts des droits de l’Homme ; les représentants de la diversité et enfin les intellectuels organiques et les proches du cercle de pouvoir qui ont l’habitude de travailler dans des commissions », a-t-il précisé avant d’ajouter que l’ensemble des composantes de cette commission se sont identifiés comme un groupe de citoyens engagés dans un processus de réformes et n’ont aucune légitimité intrinsèque que celle du moment. On a estimé qu’on ne doit être soumis à aucun diktat », a-t-il confié. Dans ce sens, il a révélé que la Commission a entamé ses travaux sans se baser sur une feuille de route, « sauf le discours du Roi qui était relativement précis mais aussi relativement général et qui a mis en place un dispositif d’audition qui s’inspire largement du travail de la Commission d’équité et de réconciliation», a-t-il confié avant d’ajouter que 60% de temps d’audition a été consacré à la société civile contre 30% aux partis politiques et syndicats « Ce stock de documents et de mémorandums a servi de background à la Commission pour qu’elle puisse travailler ».
Le chantier constitutionnel a donné naissance à de grandes avancées comme le cas de la suprématie de la Constitution, des droits fondamentaux y compris la suprématie des droits internationaux sur les droits intérieurs. « Le Maroc est en train d’opérer une rupture avec ce qu’on a appelé la Constitution implicite, historique ou coutumière. On a tout mis sur le texte, pour le texte et rien que le texte ».
L’universitaire marocain a affirmé que l’objectif est que tous les individus et les institutions constitutionnelles y compris la monarchie doivent être soumis à la loi et que rien ne doit être supérieur à la loi suprême.
L’autre avancée de ce texte concerne l’architecture du pouvoir. Les initiateurs de ce projet, a-t-il expliqué, ont essayé de réconcilier le concept du pouvoir avec son essence même en voulant dépasser le pouvoir en tant que fonction et aller vers un pouvoir supérieur, souverain et autonome.
A ce propos, il a indiqué que le statut de la royauté a été extrait d’une façon volontaire d’une monarchie exécutive vers une monarchie arbitrale avec des prérogatives importantes : « Il s’agit d’une préséance et d’une naturalité par rapport au jeu politique ».
Évoquant le pouvoir judiciaire, M. Tozy a confié que c’est le chantier qui, paradoxalement, comporte plus de réticence de la part des intéressés. Mais cela n’a pas empêché la Commission de réaliser certaines avancées a précisé l’intervenant, comme le statut du juge qui est devenu le garant des libertés et des droits et qui bénéficiera d’une protection dans sa fonction et son autonomie. « La Constitution criminalise l’intervention dans son travail et toute pression exercée à son encontre ».
Le conférencier a enfin rappelé que le texte constitutionnel n’est qu’un cadre pour organiser les relations entre gouverneurs et gouvernés. Un cadre qui dessine un horizon commun entre les citoyens, mais ne fait pas la vie politique.
« Il s’agit d’un texte, résultat d’un compromis politique et de rapports de forces qui ne sont pas joués d’une façon forte ».