Par cette visite que l’on se garde toujours du côté de l’Elysée de qualifier de visite d’Etat mais plutôt de « visite officielle et d’amitié », le président français, en quête de quelque coup d’éclat après de belles déconvenues sur le plan national corroborées d’ailleurs par les résultats des dernières législatives, ambitionnerait-il de redonner vie à des relations bilatérales trop souvent grippées en vue de faire de l’Algérie un partenaire géostratégique dans la région ? Petite ambition, soit dit en passant. Cela rappellerait le fait de miser sur le mauvais cheval, sachant que cette même Algérie s’est laissée aller à un grand isolement qui ne sied nullement à ses ambitions démesurées de s’assurer un leadership rêvé dans une région dont elle s’est fait allègrement, stupidement, surtout, exclure. La décision de fermer ses frontières avec le Maroc est là pour le confirmer. Mais aussi son désir insensé de chercher à faire cavalier seul au Sahel. Sans parler de sa brouille incalculée avec l’Espagne voire, par ricochet, avec l’UE.
Il faut toutefois se garder de voir en Emmanuel Macron ce bon samaritain qui va essayer de faire entendre raison aux dirigeants algériens et de les pousser ainsi à mettre de l’eau dans leur « Sidi Brahim » ou plutôt leurs « coteaux de Mascara». S’il est sur place, c’est pour les intérêts de la France. Cela va sans dire.
Et, guerre russo-ukrainienne oblige, et quoique l’on essaie du côté de l’Hexagone, de sous-estimer la chose, le gaz algérien a du coup plus d’attrait. C’est même là le seul « argument » de poids qu’Alger pourrait faire valoir dans des négociations dont elle ne tient assurément pas les ficelles.
Le problème pour Emmanuel Macron, c’est qu’avec son actuelle et très relative majorité et avec une opposition revigorée, il est attendu au tournant. La mise en garde lancée d’ores et déjà par un homme politique français en dit long. «On multiplie les laissez-passer. Va-t-on à nouveau se coucher pour le gaz ? », a lancé d’emblée un certain Nicolas Dupont-Aignan (DLF).
Gaz contre visas alors ? Ce qui aurait tout l’air d’un deal boiteux. Rappelons, au passage, que sur une décision inique, Paris avait considérablement réduit le nombre des visas octroyés aux ressortissants algériens mais aussi à ceux marocains ou tunisiens. Indigne d’un pays temple jusqu’à il n’y a pas longtemps, du moins, des droits de l’Homme et d’une certaine Liberté, Egalité, Fraternité.
Et c’est bien le président de cette même France qui a inséré dans son laborieux programme une rencontre avec les jeunes algériens qu’il compte d’ailleurs gratifier d’un discours. Pour leur dire quoi au juste sachant que le Hirak est passé par là ? Une insoutenable oppression aussi ?
Quelle place réservera-t-il justement aux droits de l’Homme auxquels ses hôtes de dirigeants sont fatalement allergiques ?
Un voyage casse-pipe pour Emmanuel Macron, serait-on tenté d’avancer. Quelques remous se sont d’ailleurs fait jour avant que la délégation présidentielle ne prenne l’avion pour Alger.
Le Grand Rabbin de France devait en faire partie. Des voix islamistes, mais pas seulement, se sont fait entendre. Et puis « le Covid » s’en serait mêlé pour que Haïm Korsia reste en France. Hasard de calendrier ?
Après tout, il s’agit là d’une affaire franco-algérienne ou algéro-française avec par ailleurs tout un passé particulièrement douloureux, que l’on cherche désespérément à surmonter.
Le Maroc, pour sa part, se satisfait pleinement de ses amis et partenaires auxquels il est lié par des relations faites d’un respect mutuel et d’échanges d’égal à égal et où il n’y a pas de place à quelque volte-face et encore moins à quelque chantage que ce soit.
Mohamed BENARBIA