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En effet, une conjoncture donnée définit un sens donné. Si les temps ont changé, la conception du monde doit changer elle aussi. Il s’agit, en d’autres termes, de définir l’avenir par rapport au présent tout en développant une conscience critique fondée sur des ruptures épistémologiques et méthodologiques avec la logique du «ça a été.» Le sens est donc une aventure qui nécessite une lecture critique du passé et, du coup, une programmation conscientielle de l’avenir. Le rôle des intellectuels dans cette optique demeure indispensable, car laisser le terrain de l’interprétation entre les mains des réactionnaires s’avère être une catastrophe qui s’oppose à l’avenir et/ou devenir de la société.
Que peuvent les intellectuels aujourd’hui ? Orienter le débat de la société suivant la conjoncture nationale et internationale, dévoiler le discours des passéistes, dénoncer leur recours aux interprétations hâtives et sans fondements logiques.
Si l’on souffre aujourd’hui de la pullulation des interprétations des fondamentalistes, c’est parce que les intellectuels ont cessé d’honorer leur mission historique : faire face aux hallucinations et aux superstitions que font circuler, sans peine d’ailleurs, les adeptes du prosélytisme. Le sens n’est pas sacré ; il est là, comme produit immédiat d’un instant, inscrit dans un contexte, joué et déjoué par les tournants de l’histoire. Sacraliser le sens revient à dire tourner son dos au progrès, refuser d’évoluer, ankyloser sa qualité de penser, de critique et de raisonner. Le sens n’a jamais été l’avatar du passé ; le sens s’inscrit dans la logique des changements qui touchent à l’homme et à la société humaine. Le sens est toujours à venir. Il « n’est pas » car il devient. Il est possible. Présent dans son absence et absent dans sa présence.
Tout dans le sens dépend de la logique de l’histoire. Les identités évoluent, les formes artistiques se développent, les politiques changent, les économies rivalisent entre elles. Le printemps démocratique, qui continue d’embrouiller la tranquillité apparente de certains régimes dans le monde arabo-musulman, a malheureusement permis aux idéologies de l’intégrisme de prendre le pas sur la pensée progressiste. Nous assistons dans ce contexte, malencontreusement, au retour de l’interprétation unique, du sens unique et de l’entendement unique. Bien qu’ils demeurent arrimés au passé, les réactionnaires ne cessent de dissimuler leurs véritables visages derrière le masque du mensonge. D’où la fonction du kitsch comme logique structurant leurs comportements. Le recours au kitsch, selon Milan Kundera, exprime un besoin : «Le besoin de se regarder dans le miroir du mensonge embellissant et de s’y reconnaître avec une satisfaction émue». Tel s’avère être le cas pour les intégristes qui, à cause de la logique anhistorique qui est la leur, sont loin d’appartenir au mouvement et au cours de l’histoire.
L’histoire va son chemin. Elle n’attend point. Elle accumule les expériences. Elle récompense ceux qui y prennent place et récuse ceux qui y renoncent. La démocratie, les droits de l’Homme, les droits de la femme, la liberté de pensée et d’expression, le droit à la différence, etc. sont les manifestations concrètes que l’homme historique a pu et su intégrer dans l’espace public. Loin d’être fidèle à un seul et unique sens de la vérité, cet homme, appelons-le homme des Lumières, est tout à fait conscient de ce que l’histoire est. Il est conscient que la vérité est plurielle ou elle n’est pas. Il est conscient que la vérité de l’autre est tout autre et elle a droit de cité. A l’encontre de l’homme anhistorique qui programme l’avenir sur la base du passé, l’homme historique est l’homme du devenir, son sens, lui, est le produit des péripéties, de l’imprévu et des circonstances inattendues. L’homme anhistorique a une conscience tranquille car il ne pense pas, il n’évolue pas, il est fataliste et déterministe. L’homme historique, quant à lui, développe une conscience incertaine, douteuse et hypothétique. Il analyse les faits et en tire des résultats en vue d’aller de l’avant. Il croit à la logique de l’histoire et définit le sens comme éventualité relative à l’instant. La vérité de l’homme historique n’est pas une ; elle évolue sous forme de « plis » et est, selon Leibniz, ou bien contingente ou bien nécessaire…