Les libertés syndicales mises à mal

Mobilisation des syndicats pour l’abrogation de l’article 288 du Code pénal


Larbi Bouhamida
Samedi 24 Mai 2014

Les libertés syndicales mises à mal
La campagne nationale commune qui a été décidée  dernièrement par les bureaux exécutifs de la FDT, la CDT et l’UMT a pour objectif de défendre les libertés syndicales. C’est ce que nous a  déclaré  Abderrahmane Azzouzi, secrétaire général de la FDT. 
 “Cette campagne s’impose au vu de l’attitude du gouvernement qui préfère depuis son investiture jouer au spectateur au moment où les libertés syndicales continuent d’être violées au vu et au su des autorités publiques”, a-t-il poursuivi.  
“Aux côtés de l’UMT et de la CDT, nous comptons mener une campagne de sensibilisation de grande envergure et lutter fortement pour l’abrogation de l’article 288  du Code pénal qui punit à des peines de prison les syndicalistes et  les travailleurs pour leurs activités syndicales”, a-t-il fait savoir.
Cet article 288 tant décrié par les syndicats stipule ce qui suit: “Est puni de l'emprisonnement d’un mois à deux ans et d'une amende de 200  à 5.000 dirhams ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque, à l'aide de violences, voies de fait, menaces ou manœuvres frauduleuses, a amené ou maintenu, tenté d'amener ou de maintenir, une cessation concertée du travail, dans le but de forcer la hausse ou la baisse des salaires ou de porter atteinte au libre exercice de l'industrie ou du travail”.
Il y a lieu de souligner que cet article qui a été confectionné par deux juristes français d’extrême droite qui voulaient  appliquer au Maroc ce qui ne pouvait l’être en France, est une véritable atteinte à la liberté du travail.
La jurisprudence  a, en outre, joué un rôle fondamental dans la définition régressive  de son contenu. De plus, il semblerait qu’en dépit du fait que la loi organique relative à l'exercice du droit de grève qui est toujours sous le boisseau , celle-ci pourrait réduire le champ de l’exercice du droit de grève et le  soumettre à des modalités qui pourraient être fort complexes à réunir. Ce faisant, elle pourrait prendre comme exemple, le cas du débrayage et de la décision de la Cour d’appel de Meknès du 30 mars 1982, ainsi que de la grève-surprise et du jugement rendu par le tribunal de première instance d’Agadir du 21 septembre 1982, de même que de la grève de solidarité limitée à une seule entreprise et sanctionnée par un jugement du tribunal de première instance de Casablanca, le 6 janvier 1984. Ces jugements considèrent que la grève de solidarité globale est perçue comme une forme de grève politique. 
La règle générale dans la pratique de la jurisprudence au Maroc est, en effet, d’étouffer l’exercice du droit de grève. 
 On rappelle, à ce propos, la déclaration du procureur du Roi, au cours du jugement de certains dirigeants syndicaux, à la suite de la grève du 20 juin 1981. Au cours de ce procès donc, le procureur avait lié la légalité de la grève à la promulgation de la loi organique. C’est la même justification dont s’est servi le gouvernement  Lamrani, pour interdire la grève générale que comptait organiser la CDT le 25 février 1994. 
 Généralement, on justifie cet encerclement en s’appuyant sur deux arguments : le premier est relatif à l’application stricte des textes juridiques régissant l’exercice de ce droit. L’exemple est illustré par l’article 288 du Code pénal qui prévoit les sanctions pour les grévistes. C’est dans ce sens que va la décision prise par la Cour suprême, en date du 12 décembre 1973 qui annonce: “Lorsque les violences, voies de fait, menaces ou manœuvres ont été commises par suite d'un plan concerté, les coupables peuvent être frappés de l'interdiction de séjour pour une durée de deux à cinq ans”.
En outre, les peines d'emprisonnement sont assorties de l'obligation de travailler en vertu de l'article 28 du Code pénal.
Or selon les Conventions internationales, un travailleur ayant participé à une grève de manière pacifique ne doit pas être passible de sanctions pénales et en aucun cas, il ne peut encourir une peine de prison ni être astreint à un travail obligatoire.
C’est dire le caractère inique de cet article 288 dont la seule finalité semble être celle de restreindre, par la force et la coercition, toute activité syndicale à caractère revendicatif.
 


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