Les descentes de police ont tari l’offre : Le Maâjoune désormais introuvable à Casablanca


Hassan Bentaleb
Vendredi 31 Décembre 2010

Les descentes de police ont tari l’offre : Le Maâjoune désormais introuvable à Casablanca
La Barboka, appelée jadis Maâjoune, se fait de plus en plus rare. Une pénurie a largement touché le marché local casablancais. Et pour cause : les multiples descentes des services de police dans les points de vente les plus connus de la ville. Des arrestations en série et des saisies de marchandises battent leur plein.  La fin de l’année 2010 semble se terminer dans un climat morose pour les toxicomanes. Selon certains témoignages, cette campagne policière a débuté il y a plus de trois semaines.  Elle a concerné Derb Soltane, Hay Mohammadi, Hay Moulay Rachid, Carrière Ben M’Sick, Lhraouyine, Sbata, ainsi que d’autres points noirs de la capitale économique. Les forces de l’ordre semblent déterminées à assécher les différents points de fabrication de ce « gâteau mortel ». « Chaque fois qu’on en demande auprès d’un vendeur, on apprend qu’il a été  appréhendé par la police. Les quelques oiseaux rares qui ont réussi à se faufiler entre les  mailles du filet sont de plus en plus discrets et préfèrent vendre aux intimes », nous a précisé Mourad, consommateur invétéré, qui n’est pas le seul à endurer cette pénurie. Saïd, lui aussi, en sait quelque chose : «J’ai fait le tour de cinq ou six quartiers en vain. La Barboka semble fuir  Casablanca. Je crois qu’il est temps d’essayer autre chose en attendant des jours meilleurs».  
Et les palliatifs ne manquent pas. Si certains trouvent leur salut dans le haschich, d’autres vont le chercher dans les psychotropes  ou tout simplement dans la consommation de colles et autres dissolutions.
Pourtant, la Barboka reste fortement demandée et sa consommation a pris des proportions alarmantes. En quelques années, elle  est devenue un phénomène banal dans notre société, notamment chez les jeunes qui ignorent sa dangerosité et la toxicité de ses composants.
Selon Hanane Chaoui, docteur au Centre antipoison et de pharmacovigilance du Maroc (CAPVM), l’intoxication due au Maâjoune est fréquente dans notre pays et le CAPVM a reçu 39 déclarations de cas d’intoxications au Maâjoune durant l’année 2008, dont un cas fatal. Cette intoxication fait souvent suite à une utilisation toxicomaniaque ou à une prise accidentelle surtout chez l’enfant. Elle se manifeste par des troubles neurologiques allant des hallucinations jusqu’au coma, des troubles respiratoires ou cardiaques et des perturbations biologiques.
Mme Chaoui explique que le danger d’intoxication est dû aux ingrédients utilisés. La préparation peut contenir en plus du cannabis, des graines de pavot (kharchacha), des graines de datura (Chdeq Jmel) dont cinq graines peuvent être fatales pour un enfant, des baies de belladone, ou bellaydour, dont 3 à 5 baies sont mortelles chez l’enfant et 10 à 15 le sont chez l’adulte, des graines de jusquiame (sikrane) dont 15 à 20 graines peuvent entraîner la mort, la mandragore (bayd lghoul) dont toute la plante est toxique, la cantharide (debbanat lhend) dont la dose efficace est trop proche de la dose mortelle et la noix de muscade (gouza) dont la consommation de deux noix suffit à entraîner le coma.
Mais aujourd’hui, la Barboka n’est plus qu’un simple mélange sous forme de pâte préparée de façon artisanale à partir de la résine de cannabis et d’autres substances et plantes aux vertus soi-disant aphrodisiaques ou hallucinogènes. Sa composition est devenue très variable, parfois inconnue. Et l’imagination des vendeurs n’a pas de limites.  On y met tout et n’importe quoi. Mais les ingrédients les plus utilisés restent le chocolat, le haschich de mauvaise qualité, la marijuana, l’huile, le faux miel, le sucre, de l’anesthésique, des psychotropes, un insecticide et du cirage. Cependant, tous ces ingrédients n’ont de secret pour personne et les recettes aussi.
Les plus célèbres restent celles composées de haschich et de chocolat. Ou celles où l’on mélange marijuana, huile, et faux miel. Les recettes les plus fortes et les plus dangereuses restent celles qui intègrent du cirage, de l’anesthésique et quelques gouttes d’un médicament prescrit pour soigner les trisomiques, ou celles qui se composent de quelques comprimés psychotropes, et d’un anesthésique. Pourtant, les vendeurs restent prudents et  ne mélangent jamais le cirage, les psychotropes et l’insecticide. Car, leur mélange est mortel.
Mais la grande question à poser : ces descentes policières sont-elles dissuasives et efficaces pour mettre fin à ce fléau? 


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