Les Syriens du Maroc ne veulent pas être les dindons de la farce

Les présidentielles qualifiées de mascarad


Hassan Bentaleb
Vendredi 6 Juin 2014

Les Syriens du Maroc ne veulent pas être les dindons de la farce
Bachar Al-Assad rempilera pour un troisième mandat d’affilée à la tête de l’Etat syrien. Il a été reconduit avec 88,7% des voix devant Hassan Al-Nouri  (4,3%) et Maher Al-Hajjar (3,2%), deux candidats qui lui servent de faire-valoir. Des résultats fort attendus pour bon nombre de Syriens du Maroc qui ne semblent pas s’enthousiasmer outre-mesure à l’idée de participer à des élections jouées d’avance.  
Pour eux, le scrutin présidentiel n’était qu’une «farce», une «mascarade» ou plutôt  une élection «illégitime» et «sans crédibilité» dont l’objectif est de cautionner un régime en quête de légitimité et épuisé par une guerre civile interminable. 
Imad, 32 ans, demandeur d’asile au Maroc depuis une année, fait partie de ces Syriens qui ne semblent pas avoir été concernés par les élections présidentielles : «Pourquoi  s’intéresser à des élections dont on connaît déjà le vainqueur ? Tout le monde savait que Bachar allait être reconduit à la tête de l’Etat à une majorité écrasante. Donc, pourquoi se casser la tête ?», nous a-t-il lancé avec ironie.  Même son de cloche chez Hoda, 28 ans, qui s’est interrogée sur le sens de ces présidentielles et leur utilité: «C’est du n’importe quoi ! On organise des élections pour réélire un bourreau qui est responsable de la mort, de l’exil et du déplacement de millions de Syriens», nous a-t-elle déclaré. Des propos que partagent Majid, 45 ans, résidant au Maroc depuis quelques années. D’après lui, élections ou pas, ce sujet  est le cadet de ses soucis. «Organiser des élections en  ces temps de guerre où le pays est à feu et à sang relève plutôt de l’absurde», nous a-t-il affirmé avant de poursuivre : «Les Syriens du Maroc, notamment ceux qui ont fui la guerre dernièrement, semblent préoccupés davantage par leur sort. Une grande majorité d’entre eux aspirent d’abord à trouver un toit et un boulot pour vivre. Le reste, ils s’en fichent éperdument». Pas le temps de dire plus, il est interrompu par une autre Syrienne, Ahlam, 30 ans. «On se moque de ce scrutin et on ne lui accorde pas trop d’intérêt  même si l’on suit tout ce qui se passe en Syrie via la télévision nationale. On estime qu’on a trop souffert à l’intérieur du pays comme à l’étranger pour cautionner un régime criminel en participant à la réélection de  son président». 
Pourtant, l’ensemble de ces avis ne donnent qu’une idée approximative des opinions des Syriens sur les élections  et ne reflètent pas, selon Qatiba Kasim El Arab, président du Conseil national des droits de l’Homme en Syrie (CNDHS), en visite au Maroc, la totalité des avis en la matière. «Il faut nuancer. Comme il y a des opposants au régime, il y a également les pro-Bachar au Maroc. Et je pense que la non-tenue des élections présidentielles au Maroc n’a pas permis de révéler les dissidences et les divergences d’opinion de ces deux composantes de la diaspora», nous a-t-il expliqué.  
Pour lui, il est clair que les résultats du scrutin ont intéressé plus d’un, qu’il soit pour ou contre le régime actuel. «Partagés entre patriotisme et envie de faire bouger les choses, les Syriens de l’extérieur ont un œil sur tout ce qui se passe dans leur pays», a-t-il précisé, lui qui pense  que les élections présidentielles ont été légitimes et conformes aux lois même s’il pointe du doigt certains dysfonctionnements ayant entaché la loi électorale, concoctée pour l’occasion.  «On peut parler d’élections partielles qui se sont déroulées  dans les régions tenues par le régime et loin des zones de combats. Mais on estime que ce scrutin, malgré ses défauts, a été l’entame d’un processus qui devrait obligatoirement passer par la dissolution du Parlement, l’intégration des nouveaux partis politiques et l’instauration d’un gouvernement   d’union nationale qui sera chargé de mener les réformes», nous a-t-il indiqué avant de conclure : «Les dernières élections ont bien démontré qu’il ne fallait pas trop miser sur l’opposition de l’extérieur et que le pays a besoin d’une opposition forte issue des forces politiques de l’intérieur pour pouvoir inverser les rapports de force existants». 


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