"Pour nous, la visite du pape en Centrafrique demeure au programme. C'est le grand désir de François de s'y rendre", a souligné le père Ciro Benedettini, porte-parole adjoint pour la presse au Vatican, interrogé par l'AFP.
Le pape a lui-même créé une incertitude, en déclarant dimanche lors de l'Angelus qu'il "espérait" se rendre dans ce pays marqué par les violences quotidiennes entre milices armées formées de chrétiens et de musulmans.
Jorge Bergoglio a ajouté qu'il voulait ouvrir une "porte sainte" dans la cathédrale de Bangui, dix jours avant l'ouverture officielle du "Jubilé de la miséricorde" à Rome.
Ouvrir une "porte sainte" est un acte solennel lors des Jubilés (ou Années Saintes), qui permet aux fidèles de faire un parcours pénitentiel en la franchissant, et d'obtenir ainsi, en vertu de la tradition catholique, le pardon de Dieu pour leurs péchés.
Ce geste aurait une haute valeur symbolique pour la réconciliation, alors que les chrétiens centrafricains placent des attentes énormes dans cette visite et s'y préparent activement depuis de mois, par des prières dans les églises. Les Centrafricains sont reconnaissants au pape de rester une nuit à Bangui, alors que Jean Paul II n'était resté que quelques heures en 1985.
Samedi encore, au moins deux personnes ont été tuées à Bangui par des musulmans armés qui ont lancé de nouvelles attaques contre des quartiers abritant des chrétiens.
Selon l'expert de Radio Vatican, Luis Badilla, "la question la plus délicate, qui oblige à une analyse attentive de tous les évènements jusqu'au 29 novembre (date prévue de l'arrivée à Bangui), porte sur la réaction qui pourrait être enregistrée chez les groupes islamistes extrémistes qui ne sont pas sous le contrôle des dirigeants musulmans modérés. En particulier là où de grandes foules de fidèles sont attendues: la messe dans la cathédrale de Bangui, la veillée de prière avec les jeunes, la visite à la mosquée de Koudoukou et la messe au stade du complexe sportif Barthélémy Boganda.
La semaine dernière, lors d'une reconnaissance des lieux, une équipe de l'archevêché et du gouvernement accompagnée d'un émissaire du Vatican, avait été menacée à la mosquée. "Quatre à cinq jeunes ont demandé aux représentants du gouvernement de sortir de la mosquée. Une fois sortis, ils ont commencé à nous menacer verbalement de mort", a rapporté à la chaîne catholique Tg2000 l'archevêque Dieudonné Nzapalainga.
Jorge Bergoglio se rend pour la première fois sur le continent africain, en visitant le Kenya, l'Ouganda et la Centrafrique du 25 au 30 novembre.
D’un autre côté, il y a lieu de souligner qu’après deux ans d'une transition chaotique et aujourd'hui à bout de souffle, la RCA est censée organiser d'ici la fin de l'année un référendum constitutionnel, et le 1er tour d'élections présidentielle et législatives. Objectif: mettre un terme formellement à la transition, et remettre enfin le pays sur les rails.
Ces échéances ont été plusieurs fois repoussées ces derniers mois, du fait de l'insécurité persistante dans le pays. Elles apparaissent une nouvelle fois menacées, après une vague soudaine de violences qui a éclaté fin septembre à Bangui entre miliciens anti-Balaka majoritairement chrétiens et groupes d'auto-défense musulmans. Et plusieurs poussées de fièvre cette semaine ont semblé sur le point d'embraser la capitale.
Lasse de l'interminable et déprimant feuilleton centrafricain, la communauté internationale, France en tête, pousse à ces élections, y voyant une étape nécessaire vers la sortie de crise.