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Un enthousiasme que beaucoup d’experts en environnement ne partagent nullement. Certains d’entre eux estiment que l’expérience marocaine en est encore à la phase de démarrage et qu’elle n’a pas encore donné de résultats. Un avis que partage Zakaria Bennani, président du Forum des économistes marocains, qui estime qu’il est encore trop tôt pour évaluer l’impact réel de la décision gouvernementale de supprimer les subventions accordées aux carburants. « Une évaluation objective de cette mesure relève du moyen terme et non du court terme. Dire que cette mesure est bonne ou mauvaise est prématuré », nous a-t-il indiqué.
Ces experts préfèrent souvent citer les modèles du Mexique, de l’Inde, et de l’Indonésie. Ces trois pays émergents ont, en effet, pu économiser 40 milliards de dollars en réduisant leurs subventions des prix des carburants. En effet, la suppression du système d’aides variables aux hydrocarbures a permis au Mexique d’économiser 16 Mds $ entre 2012 et 2014. De même pour l’Inde qui a pu économiser 10 Mds $ après l’arrêt du soutien au gazole en septembre 2014. Quant à l’Indonésie, la réduction drastique des aides au gazole et à l’essence ont drainé vers le budget de l’Etat 14 Mds $ entre 2014 et 2015. Mais, il n’y a pas que les pays émergents qui sont cités en exemple. Certains pays riches ont fait unilatéralement des progrès tels l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Autriche. Il y a aussi eu des avancées dans le cadre même du G20 puisque plusieurs pays membres se sont portés volontaires pour que leurs pays passent leurs subventions au crible fin. La Chine et les Etats-Unis se sont eux aussi mis d’accord pour revoir leurs systèmes de subventions.
Pourtant, il n’y a pas que la fraîcheur de l’expérience marocaine qui fait débat, le décalage entre le discours officiel du gouvernement et la réalité de ses pratiques en matière de préservation du climat pose également problème. « L’Exécutif semble déboussolé. Il fait une chose et son contraire. Ainsi s’il a opté pour la levée des subventions aux énergies fossiles, il continue à encourager l’utilisation des énergies polluantes comme le charbon au niveau des centrales thermiques de Jorf Lasfar et Mohammédia, le fuel à Kénitra ou le soi-disant charbon propre qui n’a rien de tel au niveau de la prochaine centrale thermique de Safi », nous a précisé Mohamed Benjelloun, expert en environnement. Et d’ajouter : « Ceci d’autant plus que l’investissement dans le domaine des énergies renouvelables semble handicapé par l’absence d’un cadre législatif et technique. La Société d’investissements énergétiques (SIE) (qui représente le bras financier de l’Etat pour la réalisation du mix énergétique à l’horizon 2020 et qui intervient autant dans l’investissement que dans le développement de projets d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique) ne fait rien non plus. Plusieurs investisseurs se sont trouvés confrontés à plusieurs obstacles. Si certains ont abandonné, d’autres ont pris l’initiative d’investir leurs propres ressources financières». Des propos confirmés par d’autres experts qui ont affirmé que les actions déployées en matière d’utilisation d’énergies renouvelables ne peuvent signifier qu’il y ait une franche volonté gouvernementale de préserver le climat. Nos sources citent l’exemple de la taxation des panneaux solaires et ses annexes de 20 à 40 % et l’absence de subventions ou d’incitations fiscales pour l’installation de panneaux solaires ou la collecte des eaux pluviales en vue d’un usage agricole ou domestique.
Et qu’en est-il des millions de dollars économisés ? Quelle en sera l’affectation? L’exemple marocain semble discret sur cette question et Hakima El Haité n’a pas pipé mot à ce propos. Et c’est logique puisque cela ne relève pas de ses prérogatives. Le chef du gouvernement a déjà annoncé que les fonds publics provenant de la suppression des subventions à l’énergie seront redirigés vers des investissements dans le développement social. Une annonce qui relève aujourd’hui d’un vœu pieux puisque les budgets des secteurs sociaux demeurent identiques à ceux des années précédentes. « Il n’y a pas de changement notable au niveau des budgets des secteurs sociaux », nous a précisé Zakaria Bennani qui estime que le vrai problème est ailleurs. « La volonté d’injecter des fonds publics dans les secteurs de la santé, de l’éduction ou des infrastructures ne suffit pas puisqu’il reste à trancher la question de leur gestion. En effet, le vrai problème aujourd’hui est celui de la gestion ou plutôt de la gouvernance des politiques publiques chapeautées par des parties prenantes qui n’ont pas les mêmes objectifs », nous a-t-il expliqué. Et de conclure : « Nos décideurs ne prennent pas au sérieux les besoins et les attentes des citoyens. Une situation des plus compliquées puisqu’il n’y a pas d’évaluation des politiques publiques. Il est bon de grappiller quelques milliards ici ou là mais comment compte-t-on les investir dans le social ? L’initiative est certes louable mais elle va rester lettre morte vu les attentes et les besoins des citoyens qui sont plus qu’énormes ».