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A titre d’exemple, le ministre de la Justice et des Libertés vient de camoufler son échec à faire adopter les projets de Code pénal et de Code de procédure pénale par une argutie pour le moins étonnante. Pince sans rire, il a, pour la énième fois, rappelé mardi, lors de la séance des questions orales à la Chambre des conseillers que le projet de Code de procédure pénale contenait des peines alternatives qui pourraient être de nature à pallier le surpeuplement des prisons marocaines. Notamment le port du bracelet électronique, le contrôle judiciaire, les amendes, le travail d’intérêt général et l’interdiction de quitter le territoire national, etc.
Selon le bâtonnier et président de l’Observatoire marocain des prisons (OMP), Abderrahim El Jamai, le Maroc a pris beaucoup de retard pour adopter ce genre de peines et la société civile a toujours demandé le recours à ces peines qui ont prouvé leur efficacité dans les pays démocratiques.
Pour lui, même au cas où elles seraient introduites dans le corpus pénal national, ces peines resteront lettre morte si la loi ne limite pas le pouvoir discrétionnaire des juges. «On ne doit absolument pas laisser aux juges la latitude de choisir entre une peine alternative et la prison ferme. La peine alternative doit être considérée comme un droit pour l’accusé ou le détenu que le juge est tenu d’appliquer», a-t-il poursuivi dans une déclaration à Libé. Il a, par ailleurs, appelé «à une révolution intellectuelle de notre système judiciaire et de tous ses intervenants : magistrats, avocats, police judiciaire, etc. Bien sûr qu’il faut changer les lois, mais cela ne suffira pas avant que cette révolution ne soit opérée » pour faire face aux maux véritables dont souffre la justice pénale nationale.
Pour sa part, Abdellah Mesdad, secrétaire général de l’OMP, a souligné que l’Observatoire avait plaidé pour un amendement du Code pénal dans le sens de revoir de fond en comble la politique pénale et les peines. «C’est un choix irréversible », nous a-t-il affirmé, ajoutant que l’adoption de ce genre de réformes nécessite du sérieux et une volonté politique.
Il convient de rappeler que l’OMP avait préconisé, dans son dernier rapport sur la situation des prisons au Maroc présenté la semaine dernière à Rabat, «l’activation du contrôle judiciaire comme alternative à la détention préventive». Cette disposition est d’autant plus nécessaire, selon les rédacteurs de ce mémorandum, que le nombre de personnes qui sont en détention préventive est alarmant et représente plus de 40% des personnes incarcérées.
Il convient également de rappeler que dans une étude réalisée en 2014, le CNDH avait, lui aussi, appelé le gouvernement à mettre en place des peines alternatives «pour faire face au problème de la surpopulation» carcérale, car «le Maroc ne peut plus se permettre de maintenir ce haut niveau d’emprisonnement, que ce soit sur le plan financier ou sur le plan social».
En attendant que Ramid tienne parole, la situation des établissements pénitentiaires demeurera tellement effroyable qu’elle obérera forcément tout effort visant à réinsérer les prisonniers qui auraient purgé leur peine dans des conditions aussi inhumaines.