La réaction de la classe politique à la réforme de la Constitution annoncée par le Souverain


Narjis Rerhaye
Vendredi 11 Mars 2011

Historique, fondateur, réformateur. Ce jeudi 10 mars, le personnel politique a bien du mal à cacher son émotion ou à bouder sa joie après l’annonce par le Roi d’un changement global et d’une réforme profonde de la Constitution de 1996.  L’un des principaux dirigeants de l’Union socialiste des forces populaires, Fathallah Oualalou, affiche haut et fort sa fierté d’être Marocain. « A la fin du discours Royal, j’étais fier d’être Marocain, fier de mon Roi, fier du peuple marocain. Le discours que le Monarque a prononcé dans la soirée du mercredi 9 mars se situe dans la lignée de 1944, de 1953, de 1998. Ce que je veux dire, c’est que le Maroc a été au rendez-vous de l’Histoire. Le monde arabe et la région méditerranéenne sont en train de vivre un grand moment de bouleversement. Plus que jamais, il est essentiel d’avoir cette capacité d’être à l’écoute de l’Histoire dans un monde qui se mondialise. Le discours du Roi annonçant une importante réforme Constitutionnelle montre que non seulement le Maroc est au rendez-vous mais qu’il peut être aussi à l’avant-garde», explique ce membre du Bureau politique de l’USFP, un parti qui avait adressé en 2009 au Souverain un mémorandum portant sur les réformes Constitutionnelles et institutionnelles. « Si les points de la réforme Constitutionnelle annoncés par le Souverain répondent aux aspirations des forces démocratiques mais aussi à celles exprimées par notre 8ème Congrès et le mémorandum adressé au Roi, cette réforme de la Constitution va bien au-delà car elle répond à un moment historique », soutient F. Oualalou.
Dans la soirée de ce mercredi 9 mars, c’est la veillée d’armes dans les états-majors partisans. Tous attendaient un discours Royal «d’une extrême importance». Beaucoup pariaient sur l’annonce du lancement du chantier de la régionalisation avancée. Mais personne, ou presque, dans les rangs politiques, ne s’attendait à une réforme profonde de la Constitution. Toute la nuit, les téléphones n’ont pas arrêté de sonner et les commentaires ont duré très tard.  La fièvre des grands jours s’est installée, rompant avec le climat dépressif, incertain et agité de ces derniers mois. La revendication a été entendue. Peut-être davantage encore. Le principe de séparation et d’équilibre des pouvoirs sera consolidé, le Parlement sera issu d’élections sincères sur fond de la prééminence de la Chambre des députés qui va se voir attribuer de nouvelles compétences, le  gouvernement désormais élu émanera  de la volonté populaire, la méthodologie démocratique dans le choix du Premier ministre forcément issu du parti politique vainqueur des élections va faire son entrée dans la loi suprême du pays alors que le Premier ministre voit son rôle renforcé en tant que chef d’un pouvoir exécutif et effectif, responsable du gouvernement et de l’administration. L’institution du Conseil de gouvernement dont les compétences seront clarifiées sera Constitutionnalisée et les partis politiques seront enfin réhabilités. «Le Maroc est définitivement sur les rails de la démocratie », s’exclame le leader des islamistes du PJD. Abdelilah Benkirane est euphorique. «Le  Roi a renoué avec l’intention de réformer la vie politique, une intention qui s’était traduite au début du règne et qui a été freinée en 2003 par une reprise en main. Maintenant, c’est aux Marocains de se ressaisir là où ils sont pour que nous soyons le peuple que nous méritons d’être».
Le chef de l’Etat a annoncé la mise en place d’une commission ad hoc pour la révision de la Constitution. Elle est présidée par le Constitutionnaliste Abdellatif Menouni, ancien président de l’UNEM et ex-membre de l’Instance Equité et réconciliation –les recommandations de l’IER seront d’ailleurs Constitutionnalisées, a annoncé le Souverain- qui a d’ailleurs donné hier matin à Rabat une conférence de presse aux côtés d’Omar Azziman, le président de la commission ad hoc sur la régionalisation élargie.
Le secrétaire général du PPS en a la profonde conviction : le Maroc est en train de vivre un réel moment historique. «Nous entrons dans une nouvelle phase de maturité démocratique. SM le Roi a eu le courage d’aller au-devant des revendications les plus affirmées des forces modernistes qui portent le discours de la réforme. C’est une avancée majeure dans la consécration de l’Etat moderne, démocratique et fort dont notre pays a besoin. Les points annoncés dans la réforme Constitutionnelle répondent dans une très large mesure aux revendications exprimées sur la scène nationale alors que la Constitutionnalisation de la régionalisation avancée constitue un tournant très important dans le mode de gouvernance. Maintenant, c’est à nous de jouer, en tant qu’acteurs politiques », fait valoir Nabil Benabdallah tout en affirmant que « les partis doivent être à la hauteur de ce nouveau système institutionnel qui se met en place ». Le Monarque l’a martelé : la nouvelle Constitution renforcera le rôle des formations politiques dans le cadre d’un pluralisme effectif et d’une opposition parlementaire jouissant d’un vrai statut. La réaction du patron des anciens communistes ne souffre la moindre ambiguïté : «En 2008, le PPS avait parlé  d’une nouvelle Constitution pour un nouveau règne. Il faudrait aujourd’hui une nouvelle génération d’acteurs politiques pour ce nouveau règne et cette nouvelle Constitution ».

Les acteurs politiques condamnés à être au rendez-vous

C’est le même sentiment qui est perceptible chez Salaheddine Mezouar, le président du Rassemblement national des indépendants qui n’hésite pas à parler d’un Roi « en phase avec son peuple et son histoire ». « Le Souverain a placé la barre tellement haut que les acteurs politiques n’ont d’autres choix que d’accompagner une telle dynamique. Ils doivent montrer leur capacité à s’adapter à ces nouvelles réformes. C’est une occasion historique qu’il ne s’agit en aucun cas de rater. Parce que nous sommes en train de construire le Maroc du 21ème siècle. Ce sont de nouveaux paradigmes d’action qu’il faut installer et l’enjeu fondamental réside dans l’adaptation des acteurs politiques et institutionnels », souligne l’argentier du Royaume.
Renforcement des libertés, nouveau paysage institutionnel, équilibre des pouvoirs : la transition qui n’en finissait pas de perdurer a cédé la place au passage à la démocratie. C’est en tout cas ce que pense l’Istiqlalien  Nizar Baraka pour qui le discours Royal de mercredi soir marque un nouveau tournant dans la vie du Maroc. « Il nous faut passer maintenant à un nouveau pallier dans l’ancrage de la démocratie. Le discours Royal a marqué plusieurs ruptures dans le sens d’une réforme de l’Etat dans la cohérence et le respect des constantes de la nation ». Le ministre délégué en charge des Affaires générales du gouvernement le dit sans ambages : désormais « tous les fondamentaux sont réunis pour réaliser une citoyenneté à part entière pour peu que l’on parvienne à consacrer l’esprit de la réforme de la Constitution dans la pratique au quotidien ». « Nous sommes tous appelés à investir le débat pour enrichir le contexte de cette révision de la Constitution et l’accompagner par des réformes politiques nécessaires et complémentaires. Nous avons le devoir de nous mobiliser pour assurer ce saut qualitatif dans la vie du pays », martèle ce dirigeant de l’Istiqlal et petit-fils d’Allal Al Fassi  avant de mettre en garde contre « tout dogmatisme et autre primauté d’intérêts personnels ou catégoriels qui pourraient retarder la construction de cette société de confiance ».
Ce jeudi matin, le Conseil de gouvernement tenait sa réunion hebdomadaire. Une réunion loin d’être ordinaire. Le plan d’action prioritaire de l’Exécutif que conduit Abbas El Fassi devrait en effet être revu «pour être au rendez-vous de la responsabilité historique ».


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