Exonération d’impôts, coûts de production et subvention, un sacré dilemme
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Pour les pouvoirs publics, l’enjeu est de taille. Car l’agriculture irriguée s’est imposée comme composante importante de l’économie nationale et régionale en tant que levier de production de richesses et de création d’emplois.
Selon le ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime, l'agriculture irriguée au Maroc, bien qu'elle n’occupe que 15 % des superficies cultivées, contribue à environ 45 % en moyenne de la valeur ajoutée agricole et intervient pour 75 % des exportations agricoles.
Elle contribue en moyenne à hauteur de 99% pour la production de sucre, 82% pour les cultures maraîchères, 100% pour les agrumes, 75% pour les fourrages et 75% pour le lait. Ceci d’autant plus que ce secteur assure près de 120 millions de journées de travail par an, soit environ 1 million 65 mille emplois dont 250 mille permanents.
Pourtant, la politique de l’eau menée par l’Etat dans ce secteur tient du simple dilemme. Elle veut concilier trois variables qui ne le sont pas : l’exonération des activités agricoles de tout impôt jusqu’à fin 2013, un coût de production de l’eau d’irrigation élevé au m3 et un prix de vente très bas. Autrement dit, continuer à subventionner l’eau d’irrigation sans obérer lourdement les finances publiques et sans augmenter les tarifs pour un secteur qui absorbe près de 80% de l’eau mobilisée.
Pour M’Hamed Belghiti, directeur de la division du génie rural au ministère de l’Agriculture, les agriculteurs bénéficient de tarifications très basses. Elles varient entre 0.15 DH/m3 dans les paramètres traditionnels et 10 DH dans ceux qualifiés de modernes.
Le coût du service n’est pas récupéré à travers la redevance. Les usagers ne supportent ni les coûts d’investissement ni les charges d’exploitation, encore moins celui de la maintenance des ouvrages de mobilisation de l’eau brute.
En effet, l’Etat couvre une grande partie des charges liées aux barrages qui alimentent les grands périmètres irrigués. A ce propos, M. El Belghiti a précisé dernièrement que ces charges représenteraient 2,54 à 5,20 DH/m3 et que le coût durable du m3, non compris les barrages, varie de 0.40 DH à 1.70 DH. Au total, le coût global de l’équipement et de diverses autres charges de l’eau est estimé à 900 MDH alors que les recettes de sa vente ne sont que de l’ordre de 500 millions.
Dans certains bassins, ces prix ont été revus à la hausse. Ils ont été augmentés de 0.30 DH/m3. Une action qui a été promptement suspendue du fait du refus de cette hausse par les usagers.
Pour M. El Belghiti, il n’est pas question que l’Etat fasse marche arrière vu la rareté des ressources et l’utilisation irrationnelle de celles-ci.
« Il faut savoir que l’irrigation fait perdre aujourd’hui près de 50% des ressources en eau. Sans compter les prélèvements clandestins qui sont importants et même les prélèvements autorisés sont supérieurs aux apports naturels », a-t-il affirmé.
Sombre tableau qui devrait se noircir davantage du fait que la mobilisation des ressources sera impossible puisque celles-ci sont limitées.
« Les alternatives sont réduites et coûtent cher. Les charges de dessalement de l’eau de mer sont exorbitantes. Le transfert de l’eau a un coût d’investissement, pratiquement comparable au procédé de dessalement de l’eau de mer. A titre d’exemple, le coût de transfert, entre le Sebou et l’Oum Rabiaa qui doit se faire dans des hauteurs de relevage de 400 m atteint 3.7 DH/m3, selon des études préliminaires », a–t-il expliqué avant d’ajouter : « Nous sommes aujourd’hui en train de mener une étude pour savoir quels sont les cultures et les agriculteurs qui sont capables de valoriser ces ressources et justifier ce transfert en eau qui est évalué aujourd’hui à 800.000 m3 ».
Pourtant, il estime que la modernisation ne peut pas être limitée à celle des infrastructures. A ce propos, il a évoqué les 300 associations des usagers d’eau qui existent au Maroc et qui sont en majorité des coquilles vides et peu impliquées dans la gestion de l’économie de l’eau.
« En Espagne, les associations ont pris entièrement le relais de la puissance publique. L’ensemble du processus de gestion de l’eau est géré par ces associations. Ici, on a l’impression qu’on manque d’interlocuteurs. C’est pourquoi je pense qu’il y a d’autres dimensions à prendre en compte, à savoir les cultures et les mentalités », a-t-il conclu.