Il partit alors pour Paris où, après avoir étudié de manière approfondie la philosophie, l'histoire et les sciences politiques, il adopta l'idéologie communiste. Profondément influencé par le saint-simonisme et par les premières formes d'idéologie politique du prolétariat qui virent le jour en France (blanquisme, socialisme et communisme utopique de Fourier, Proudhon, etc.), il fréquenta assidûment les cercles d'ouvriers socialistes français et allemands émigrés (la Ligue des justes). En 1844, lors d'une visite de Engels, les deux hommes se rendirent compte qu'ils étaient tous deux arrivés à la même conclusion sur la nature des problèmes révolutionnaires : le communisme, forme la plus radicale de l'idéologie révolutionnaire, leur apparut alors non plus comme un idéal d'égalitarisme mais comme «la forme nécessaire et le principe énergétique du futur prochain». Ils entreprirent alors de collaborer pour expliquer systématiquement les principes théoriques du communisme scientifique et organiser un mouvement international de la classe ouvrière tournée vers ces mêmes principes. Leur collaboration dura tout le temps que vécut Karl Marx.
En 1845, Karl Marx fut sommé de quitter Paris par Guizot à cause de ses activités révolutionnaires. Il se réfugia alors à Bruxelles où il organisa et dirigea un réseau de groupes révolutionnaires dispersés à travers l'Europe et connus sous le nom de Comités de correspondance communistes. Il joua un rôle décisif dans la consolidation de ces comités qui, en 1847, prirent le nom de Ligue communiste. Marx et Engels furent chargés de rédiger le programme de cette première organisation ouvrière internationale. Le texte qu'ils soumirent alors, connu sous le titre de Manifeste du Parti communiste, fut le premier écrit systématique de la doctrine socialiste moderne et fut rédigé par Karl Marx, en partie d'après des brouillons d'Engels. Ils y substituèrent à la première devise des communistes «Tous les hommes sont frères» le mot d'ordre et de ralliement «Prolétaires de tous les pays, unissez-vous»
Les propositions au centre de ce Manifeste expriment la théorie, expliquée plus tard dans son livre Contribution à la critique de l'économie politique (1859), appelée conception matérialiste de l'histoire, ou matérialisme historique. Cette théorie, qui constitue à la fois une rupture philosophique et politique, explique qu'à chaque époque (Antiquité, féodalisme, capitalisme bourgeois) le système économique dominant (fondé sur les rapports de production) donnant naissance à des besoins vitaux détermine la forme de l'organisation politique et juridique de la société (la «superstructure») et conditionne le processus de la vie politique, sociale, culturelle et intellectuelle de cette même époque.
Selon lui, l'humanité a vécu à l'origine dans une société primitive dans laquelle chacun exécutait le travail nécessaire à sa survie et était libre. En permettant l'accroissement des capacités de production, la division du travail a entraîné l'ascension et l'enrichissement de l'humanité. C'est ainsi que se sont mises en place des classes sociales et dès lors l'histoire de la société est devenue une histoire de luttes entre les dirigeants et les exécutants, dominants et dominés, exploitants et exploités, c'est-à-dire un rapport de force entre ceux qui louent leur force de travail (les classes sociales opprimées) et les propriétaires des moyens de production, détenteurs du capital (la classe dominante, la bourgeoisie).
(A suivre)