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Il prend ce carré, il accommode le sable, il jette les points, il en tire les figures, et enfin il forme l’horoscope. En parcourant chaque maison, il trouve que son frère n’était plus au monde ; dans une autre maison, qu’il avait été empoisonné et qu’il était mort subitement ; dans une autre, que cela était arrivé dans la Chine ; et dans une autre, que c’était dans une capitale de la Chine, située en tel endroit ; et enfin que celui par qui il avait été empoisonné était un homme de basse naissance qui avait épousé une princesse fille d’un sultan. Quand le magicien eut appris de la sorte quelle avait été la triste destinée de son frère, il ne perdit pas le temps en des regrets qui ne lui eussent pas redonné la vie. La résolution prise sur-le-champ de venger sa mort, il monte à cheval et il se met en chemin en prenant sa route vers la Chine.
Il traverse plaines, rivières, montagnes, déserts, et après une longue traite, sans s’arrêter en aucun endroit, avec des fatigues incroyables, il arriva enfin à la Chine, et peu de temps après à la capitale que la géomance lui avait enseignée. Certain qu’il ne s’était pas trompé et qu’il n’avait pas pris un royaume pour un autre, il s’arrête dans cette capitale et il y prend logement. Le lendemain de son arrivée le magicien sort, et en se promenant par la ville, non pas tant pour en remarquer les beautés, qui lui étaient fort indifférentes, que dans l’intention de commencer à prendre des mesures pour l’exécution de son dessein pernicieux, il s’introduit dans les lieux les plus fréquentés et il prête l’oreille à ce que l’on disait.
Dans un lieu où l’on passait le temps à jouer à plusieurs sortes de jeux, et où, pendant que les uns jouaient, d’autres s’entretenaient, les uns de nouvelles et des affaires du temps, d’autres de leurs propres affaires, il entendit qu’on s’entretenait et qu’on racontait des merveilles de la vertu et de la piété d’une femme retirée du monde, nommée Fatime, et même de ses miracles.
Comme il crut que cette femme pouvait lui être utile à quelque chose dans ce qu’il méditait, il prit à part un de ceux de la compagnie, et il le pria de vouloir bien lui dire plus particulièrement quelle était cette sainte femme et quelle sorte de miracles elle faisait. « Quoi ! lui dit cet homme, vous n’avez pas encore vu cette femme ni entendu parler d’elle ? Elle fait l’admiration de toute la ville par ses jeûnes, par ses austérités et par le bon exemple qu’elle donne. À la réserve du lundi et du vendredi, elle ne sort pas de son petit ermitage, et les jours qu’elle se fait voir par la ville, elle fait des biens infinis, et il n’y a personne affligé du mal de tête qui ne reçoive la guérison par l’imposition de ses mains. » Le magicien ne voulut pas en savoir davantage sur cet article ; il demanda seulement au même homme en quel quartier de la ville était l’ermitage de cette sainte femme.
(A suivre