Histoire d’Aladdin ou la lampe merveilleuse


Libé
Jeudi 10 Octobre 2013

Histoire d’Aladdin ou la lampe merveilleuse
Il était déjà fort avancé lorsque Aladdin nous a obligés non seulement de cesser, mais même de défaire tout ce que nous avions fait, et de lui rapporter ses pierreries et celles du grand vizir. »  Le sultan leur demanda si Aladdin ne leur en avait pas dit la raison, et comme ils lui eurent marqué qu’il ne leur en avait rien témoigné, il donna ordre sur-le-champ qu’on lui amenât un cheval. On le lui amène, il le monte, et part sans autre suite que de ses gens, qui l’accompagnèrent à pied.
Il arrive au palais d’Aladdin, il va mettre pied à terre au bas de l’escalier qui conduisait au salon à vingt-quatre croisées. Il y monte sans faire avertir Aladdin ; mais Aladdin s’y trouva fort à propos, et il n’eut que le temps de recevoir le sultan à la porte. Le sultan, sans donner à Aladdin le temps de se plaindre obligeamment de ce que Sa Majesté ne l’avait pas fait avertir et qu’elle l’avait mis dans la nécessité de manquer à son devoir, lui dit : « Mon fils, je viens moi-même vous demander quelle raison vous avez de vouloir laisser imparfait un salon aussi magnifique et aussi singulier que celui de votre palais. »
Aladdin dissimula la véritable raison, qui était que le sultan n’était pas riche en pierreries pour faire une dépense si grande. Mais afin de lui faire connaître combien le palais, tel qu’il était, surpassait non seulement le sien, mais même tout autre palais qui fût au monde, puisqu’il n’avait pu le parachever dans la moindre de ses parties, il lui répondit: « Sire, il est vrai que Votre Majesté a vu ce salon imparfait; mais je la supplie de voir présentement si quelque chose y manque.» Le sultan alla droit à la fenêtre dont il avait vu la jalousie imparfaite, et quand il eut remarqué qu’elle était semblable aux autres, il crut s’être trompé. Il examina non-seulement les deux croisées qui étaient aux deux côtés, il les regarda même toutes l’une après l’autre, et quand il fut convaincu que la jalousie à laquelle il avait fait employer tant de temps et qui avait coûté tant de journées d’ouvriers, venait d’être achevée dans le peu de temps qui lui était connu, il embrassa Aladdin et le baisa au front entre les deux yeux.
« Mon fils, lui dit-il, rempli d’étonnement, quel homme êtes-vous, qui faites des choses si surprenantes et presque en un clin d’oeil ? Vous n’avez pas votre semblable au monde, et plus je vous connais, plus je vous trouve admirable. » Aladdin reçut les louanges du sultan avec beaucoup de modestie, et il lui répondit en ces termes : « Sire, c’est une grande gloire pour moi de mériter la bienveillance et l’approbation de Votre Majesté ; ce que je puis lui assurer, c’est que je n’oublierai rien pour mériter l’une et l’autre de plus en plus. » Le sultan retourna à son palais de la manière qu’il y était venu, sans permettre à Aladdin de l’y accompagner. En arrivant il trouva le grand vizir qui l’attendait. Le sultan, encore tout rempli d’admiration de la merveille dont il venait d’être témoin, lui en fit le récit en des termes qui ne firent pas douter à ce ministre que la chose ne fût comme le sultan la racontait, mais qui confirmèrent le vizir dans la croyance où il était déjà que le palais d’Aladdin était l’effet d’un enchantement, dont il s’était ouvert au sultan presque dans le moment que ce palais venait de paraître.  Il voulut lui répéter la même chose. « Vizir, lui dit le sultan en l’interrompant, vous m’avez déjà dit la même chose, mais je vois bien que vous n’avez pas encore mis en oubli le mariage de ma fille avec votre fils. » Le grand vizir vit bien que le sultan était prévenu. Il ne voulut pas entrer en contestation avec lui et il le laissa dans son opinion. Tous les jours, dès que le sultan était levé, il ne manquait pas de se rendre dans un cabinet d’où l’on découvrait tout le palais d’Aladdin, et il y allait pendant la journée pour le contempler et l’admirer.
 (A suivre)


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