Histoire d’Aladdin ou la lampe merveilleuse


Libé
Lundi 23 Septembre 2013

Histoire d’Aladdin ou la lampe merveilleuse
Aladdin cependant laissa écouler les trois mois que le sultan avait marqués pour le mariage d’entre la princesse Badroulboudour et lui. Il en avait compté tous les jours avec grand soin, et quand ils furent achevés, dès le lendemain, il ne manqua pas d’envoyer sa mère au palais, pour faire souvenir le sultan de sa parole.
La mère d’Aladdin alla au palais, comme son fils le lui avait dit, et elle se présenta à l’entrée du divan, au même endroit qu’auparavant. Le sultan n’eut pas plutôt jeté la vue sur elle, qu’il la reconnut et se souvint en même temps de la demande qu’elle lui avait faite et du temps auquel il l’avait remise. Le grand vizir lui faisait alors le rapport d’une affaire. « Vizir, lui dit le sultan en l’interrompant, j’aperçois la bonne femme qui nous fit un si beau présent il y a quelques mois : faites-la venir, vous reprendrez votre rapport quand je l’aurai écoutée. » Le grand vizir, en jetant les yeux du côté de l’entrée du divan, aperçut aussi la mère d’Aladdin.
Aussitôt il appela le chef des huissiers, et en la lui montrant, il lui donna ordre de la faire avancer. La mère d’Aladdin s’avança jusqu’au pied du trône, où elle se prosterna, selon la coutume. Après qu’elle se fut relevée, le sultan lui demanda ce qu’elle souhaitait. « Sire, lui répondit-elle, je me présente encore devant Votre Majesté pour lui représenter, au nom d’Aladdin, mon fils, que les trois mois après lesquels elle l’a remis sur la demande que j’ai eu l’honneur de lui faire sont expirés, et la supplier de vouloir bien s’en souvenir. »
Le sultan, en prenant un délai de trois mois pour répondre à la demande de cette bonne femme la première fois qu’il l’avait vue, avait cru qu’il n’entendrait plus parler d’un mariage qu’il regardait comme peu convenable à la princesse sa fille, à regarder seulement la bassesse et la pauvreté de la mère d’Aladdin, qui paraissait devant lui dans un habillement fort commun. La sommation cependant qu’elle venait de lui faire de tenir sa parole lui parut embarrassante. Il ne jugea pas à propos de lui répondre sur-le-champ. Il consulta son grand vizir, et lui marqua la répugnance qu’il avait à conclure le mariage de la princesse avec un inconnu, dont il supposait que la fortune devait être beaucoup au-dessous de la plus médiocre.
Le grand vizir n’hésita pas à s’expliquer au sultan sur ce qu’il en pensait. « Sire, lui dit-il, il me semble qu’il y a un moyen immanquable pour éluder un mariage si disproportionné, sans qu’Aladdin, quand même il serait connu de Votre Majesté, puisse s’en plaindre : c’est de mettre la princesse à un si haut prix, que ses richesses, quelles qu’elles puissent être, ne puissent y fournir. Ce sera le moyen de le faire désister d’une poursuite si hardie, pour ne pas dire si téméraire, à laquelle sans doute il n’a pas bien pensé avant de s’y engager. » Le sultan approuva le conseil du grand vizir. Il se retourna du côté de la mère d’Aladdin ; et, après quelques moments de réflexion : « Ma bonne femme, lui dit-il, les sultans doivent tenir leur parole ; je suis prêt à tenir la mienne et à rendre votre fils heureux par le mariage de la princesse ma fille. Mais, comme je ne puis la marier que je ne sache l’avantage qu’elle y trouvera, vous direz à votre fils que j’accomplirai ma parole dès qu’il m’aura envoyé quarante grands bassins d’or massif, pleins à comble des mêmes choses que vous m’avez déjà présentées de sa part, portés par un pareil nombre d’esclaves noirs, qui seront conduits par quarante autres esclaves blancs, jeunes, bien faits et de belle taille, et tous habillés très-magnifiquement. Voilà les conditions auxquelles je suis prêt à lui donner la princesse ma fille. Allez, bonne femme, j’attendrai que vous m’apportiez sa réponse. »
(A suivre)


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