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C’est sous un ciel bas et lourd que les politiques s’apprêtent à faire leur rentrée. L’été a résolument été celui des petites phrases assassines et des déclarations à l’emporte-pièce. De l’allégeance au partage des attributions en passant par l’interprétation de la Constitution et les rapports avec les conseillers du Roi, le parti majoritaire a mené une véritable communication … de crise. «En lieu et place de solutions à la crise économique que vit le pays et alors que les Marocains vont vivre des moments très difficiles, le PJD a tout fait pour détourner l’attention de son incapacité à trouver des réponses aux problèmes économiques et sociaux. Comment ? En faisant valoir la multiplicité des centres de pouvoirs, la difficulté dans les relations avec l’entourage Royal, en pointant les poches de résistance. A chaque fois, des poids lourds du parti du chef du gouvernement ont pris à témoin l’opinion publique pour signifier qu’on ne les laissait pas travailler. Oubliés les problèmes économiques graves, on ne parle plus que d’un PJD auto-érigé en victime», analyse ce politologue.
Les petites phrases de figures islamistes ont alimenté la chronique politique et les «une» de journaux assoiffés de sensations fortes. A Tanger, la crise politique a été évitée de justesse. Samedi 1er septembre, la soirée de clôture du 8ème Forum national de la jeunesse du PJD, qui devait avoir lieu sur une place publique de la ville du Détroit, a été interdite. En présence du chef du gouvernement et secrétaire général du parti de la lampe, elle aura finalement lieu, non pas en plein air, mais dans les murs d’une salle. 48 heures plus tard après cette interdiction qui a provoqué la colère des islamistes au pouvoir, le ministère de l’Intérieur sort de son mutisme pour justifier une décision «du ressort des autorités locales», prise au nom du principe d’impartialité et de garantie de l’égalité des chances entre les partis dans la course des élections partielles. Le 4 octobre, la circonscription de Tanger-Asilah va connaître l’organisation d’un scrutin très attendu, après l’invalidation de la liste PJD conduite par Najib Boulif.
Pas question dès lors d’offrir une tribune électorale prématurée et «tout bénéfice» à cette formation politique qui avait dépêché à Tanger, le temps d’un forum, le ban et l’arrière-ban du parti. Les secrétariats provinciaux de quatre partis de l’opposition –l’USFP, le PAM, le RNI et l’UC- ne s’y sont pas trompés et se sont empressés de rendre public, lundi 4 septembre, un communiqué conjoint pour «dénoncer la campagne électorale prématurée menée par les ministres du PJD à Tanger». «Sous prétexte d’une université d’été, le parti d’Abdelilah Benkirane ne s’est pas gêné pour faire campagne avant l’heure, usant de populisme et d’électoralisme et ce, en prenant pour cibles institutions et d’étranges poches de résistance», martèle cette figure tangéroise du Rassemblement national des indépendants avant d’annoncer que «la campagne électorale des législatives partielles du 4 octobre risque d’être très chaude».Chauds aussi les rapports entre les composantes de la majorité. Le journal porte-parole du Mouvement populaire est sorti de la réserve qui sied à un partenaire gouvernemental.
Laenser en punching-ball
des islamistes au pouvoir
«Nous ne nous tairons plus face aux attaques dont fait l’objet notre secrétaire général», a menacé dernièrement un éditorial d’Al Haraka. Mohand Laenser, le ministre de l’Intérieur et patron des Harakis, est en effet devenu le punching-ball des députés et ministres du PJD. Sur le mode de «ce n’est pas nous, c’est lui», les islamistes au pouvoir ont fait du locataire du ministère de l’Intérieur une sorte de force contre le changement. Dans leur édition du mardi 4 septembre, nos confrères d’Al Ahdath Almaghribya ont annoncé une réunion «urgente» qu’aurait tenue le chef du gouvernement avec le ministre de l’Intérieur pour «dissiper les nuages obscurcissant le ciel des relations entre le PJD et le ministre de l’Intérieur», notamment après l’interdiction de Tanger. Cela suffira-t-il à sauver une majorité minée par ses dissensions et ses divergences profondes, après seulement 8 mois d’exercice de pouvoir ? Les plus optimistes se contentent de soupirer, en croisant les doigts.
Une rentrée politique qui se fera aussi sous le signe de l’élection du prochain leader de l’Istiqlal, l’une des principales forces de la majorité gouvernementale. Le 22 septembre courant, les membres du Conseil national du plus vieux parti marocain doivent élire le successeur d’Abbas El Fassi. En attendant, une guerre fratricide oppose Abdelouahad El Fassi, le fils du père fondateur et Hamid Chabat le syndicaliste trublion. «Quelles en seront les conséquences sur le parti ? Réussira-t-il à rester une force solide de la majorité, capable de tenir la dragée haute au PJD ? Personne n’en sait rien. L’Istiqlal a tout intérêt à se préserver et les Istiqlaliens à sauver les meubles. Le pays a besoin de partis forts pour ancrer la démocratie car rien n’est jamais irréversible», soupire cet Istiqlalien, agacé de voir sa famille politique se donner en spectacle.
Sous la Coupole, l’activité parlementaire ne s’est pas interrompue. Le ministre de la Jeunesse et des Sports est attendu de pied ferme dans les prochains jours. Il s’expliquera, en commission, sur les mauvaises performances des athlètes marocains aux Jeux olympiques de Londres. Et dans l’attente de la nouvelle année législative et de la rentrée parlementaire- elle aura lieu le deuxième vendredi d’octobre, quelques jours après les législatives partielles de Tanger-Asilah- les députés de l’opposition sont sur les starting-blocks et beaucoup n’excluent pas une meilleure coordination de leurs groupes parlementaires. Les travées de l’Hémicycle promettent une poussée de fièvre.