En Suède, les écoles privées sous le feu des critiques


Libé
Lundi 8 Juillet 2013

En Suède, les écoles privées sous le feu des critiques
Accueillie avec prudence par les Suédois, l’ouverture aux acteurs privés de la gestion d’établissements scolaires est sous le coup de nombreuses critiques nourries par les résultats chancelants des élèves dans les évaluations internationales.
Depuis 1992, le royaume scandinave autorise les entreprises à gérer les écoles libres. Ces établissements, sous contrat d’association et financés par l’Etat mais à but lucratif, suivent un programme similaire à celui des écoles publiques.
Ils ont plus de liberté pour développer certaines disciplines, répondre à des préoccupations de groupes religieux ou d’origines nationales divers, suivre des approches pédagogiques différentes, tels Montessori ou Waldorf.
Les défenseurs du système estiment qu’il propose une plus grande diversité de choix aux parents et aux élèves. Pour ses détracteurs, il accentue les disparités et la palette des cours proposée est loin d’être adaptée aux besoins du marché du travail.
En témoigne la popularité des filières coiffures. Avant le lancement des écoles libres, la concurrence était rude pour entrer dans un lycée préparant au diplôme de coiffeur et les élèves trouvaient un emploi à leur sortie. Depuis, chaque ville possède au moins un établissement préparant au diplôme. Résultat, en 2012, 2.700 coiffeurs ont été diplômés pour seulement 700 postes disponibles.
«Bien que nous ayons dit aux écoles qu’il n’y avait pas assez de demande, ils ont augmenté le nombre de leurs étudiants», regrette une représentante syndicale, Linda Palmetzhofer, représentante de Handels, un syndicat des cols bleus, précisant toutefois que la situation s’améliorait depuis deux, trois ans.
En outre, l’enquête internationale PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves), réalisée par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), montre que les résultats des adolescents suédois de 15 ans en compréhension de l’écrit ont chuté de plus de vingt points entre 2000 et 2009.
Assez pour faire porter le chapeau aux écoles libres et enflammer plus d’un dîner en ville. D’autant que des études ont montré que ces écoles emploient, en moyenne, moins de personnel et ont un pourcentage plus élevé de professeurs non diplômés.
«Les dépenses qu’on peut réduire le plus, ce sont les salaires des prof», déplore Rossana Dinamarca, une députée de la Gauche, un allié traditionnel des sociaux-démocrates qui ont gouverné la Suède 69 des 100 dernières années.
Si les Suédois restent favorables au système, ils sont de plus en plus hostiles à la possibilité qu’il offre aux entreprises de réaliser un profit alors qu’elles bénéficient de l’argent public. Et ce malgré les difficultés qu’éprouvent certains acteurs privés. Ainsi, l’une des plus grandes chaînes d’école libres JB Education a déposé le bilan en juin.
Il n’y a aucun frais de scolarité pour entrer dans ces établissements. Chacun reçoit une enveloppe selon le nombre d’inscrits. Dès lors, tous les moyens sont bons pour attirer le chaland: des ordinateurs portables gratuits à la distribution de bonnes notes, les écoles libres sont accusées de négliger la qualité des cours.
Des accusations balayées d’un revers de manche par les professionnels qui estiment que si l’enseignement dispensé était de mauvaise qualité, leurs bancs seraient vides.
Pourtant, pour Gabriel Sahlgren, directeur de recherches à l’Institute of Economic Affairs, un think tank londonien, «les écoles sont plus encouragées à faire gonfler les notes qu’à améliorer la qualité de l’éducation». Et c’est sur ce point que le système doit être amélioré.
Selon lui, l’augmentation du nombre des écoles libres n’est pas responsable des mauvais résultats des élèves. C’est la nouvelle méthode d’enseignement qui privilégie l’autonomie des enfants sur un apprentissage traditionnel par l’enseignant qu’il faut pointer du doigt.
Ainsi, les résultats des jeunes Norvégiens ont également reculé dans les enquêtes internationales d’évaluation, le pays ayant également plébiscité des méthodes d’enseignement similaires, sans toutefois avoir le même système d’écoles libres que la Suède, relève-t-il.


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