Effondrement d'une maison de la médina de Fès : Comment nos valeureux conseillers ont insulté les victimes et leurs familles


M'Hamed Hamrouch
Jeudi 29 Avril 2010

L'effondrement mortel d'une vieille bâtisse dimanche à Fès n'a pas laissé indifférents nos parlementaires. Pas plus d'ailleurs que l'ensemble du peuple marocain qui s'est réveillé, lundi matin, sur cette grande tragédie qui a emporté quatre membres d'une même famille, le père et son épouse et leurs enfants, un garçon et une fillette âgés de 3 et 9 ans. Nos conseillers « très émus » n'ont pas eu tort de porter cette affaire tragique devant le ministre Taoufiq Héjira, présent ce mardi après-midi à la deuxième Chambre aux côtés du ministre chargé des Relations avec le Parlement, Driss Lachgar. Décidément, il ne manquait rien à cette séance de questions orales pour produire un débat de haute volée et à la hauteur du drame qui a secoué ce dimanche de sinistre mémoire le quartier Chrabliyine, théâtre de la tragédie. Le gouvernement a été présent et était prêt à répondre, par la voix du ministre de tutelle Héjira, aux questions angoissées des représentants du peuple. Les règles d'usage y étaient en plus. Un conseiller du PAM a décrété, à juste titre d'ailleurs, une minute de silence à la mémoire des victimes tragiques.
Le président de la séance, qui, paraît-il, ne l'a pas entendu de cette oreille, a failli mettre une sourdine à la requête du conseiller s'il n'y avait pas bien d'autres pour lui faire entendre raison. Une minute de silence valait mieux que ces montagnes de banalités et de bêtises auxquelles on allait avoir droit ! Parlons clair, parlons vrai. Nos chers conseillers ont donné la pire idée de ce que peut et de ce que doit être la mission d'un représentant de la Nation. Ces conseillers ont apporté, à qui veut bien voir, la preuve non seulement de leur lamentable incapacité à représenter dignement le peuple, mais aussi l'argument de l'insulte qu'ils sont également capables de faire à ce même peuple, à plus forte raison les citoyens touchés par des drames comme celui survenu en fin de semaine dernière à Fès. Chacun cherchait ce jour-là à récupérer ce drame à son profit ou à celui du parti qu'il représente, au point que le débat a dévié vers des accusations et des contre-accusations de vouloir exploiter le deuil à des fins partisanes et politiciennes. C'est à peine si certains conseillers n'en étaient pas venus aux « coups de poing » sous l'œil perdu des cameramen de la TVM qui se sont résolus pendant un bon petit moment à braquer leur zoom sur une flopée d'enfants venus assister, en graines de parlementaires, à ce cirque de très mauvais goût. La sincérité et la compassion imposées par l'objet et la nature même du débat ont fait place à l'hypocrisie politicienne ; la responsabilité et le devoir d'une représentation digne et convenable des intérêts de la famille endeuillée, et à travers elle toutes les familles ayant subi le drame des effondrements de leurs maisons, se sont effacés au gré de considérations purement et lamentablement partisanes. Exemple : Comment un conseiller peut-il prétendre compatir au drame des victimes et nous gratifier d'une véritable crise de fou rire ! Une incohérence difficile à démêler et qu'il serait préférable de soumettre à un spécialiste en psychanalyse, pour ne pas dire carrément un psychiatre ! Un conseiller de la région de Fès n'a pas eu tort de dénoncer l'hypocrisie de ses collègues en leur disant qu'il ne servait à rien de jouer leur cinéma tragi-comique devant les caméras de la première chaîne. « Le bon sens veut que chacun d'entre vous se rende à Fès pour s’enquérir auprès des proches des victimes des véritables ressorts du drame », a-t-il martelé. Mais voilà, il paraît que l'effet de la caméra serait beaucoup plus séduisant que ce travail de terrain pour lequel nos chers conseillers sont grassement payés. Une grosse et grossière insulte a été faite ce jour-là à la mémoire des victimes et à l'intelligence des citoyens par ceux-là mêmes qui sont censés les représenter au Parlement. Dire combien de chemin il reste à parcourir pour que le travail parlementaire arrive à maturité. Ce n'est pas demain la veille … 


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