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Compromettant, à juste titre, le rapport du CNDH: Ces cliniques atteintes de NOIR chronique

Faisant fi de toute légalité comme du serment d'Hippocrate, elles ont un faible incurable pour les chèques dits de garantie


Mehdi Ouassat
Vendredi 5 Juillet 2024

Le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) a dévoilé, dans son rapport annuel pour l'année 2023, une série de dysfonctionnements alarmants au sein des cliniques privées au Maroc. Ce document, véritable réquisitoire, met en exergue des violations flagrantes du droit fondamental à la santé, aux soins et aux traitements, dénonçant des pratiques opaques et appelant à une refonte urgente et systémique du secteur de la santé.

Parmi les abus signalés, le rapport du CNDH dénonce notamment une pratique connue sous le nom de "Noir" et qui consiste en des paiements en espèces non facturés et échappant à toute régulation. Loin d'être isolée, cette pratique est largement répandue dans les cliniques privées. Les sommes exigées peuvent atteindre des milliers de dirhams et échappent à toute transparence tarifaire, se basant uniquement sur des estimations arbitraires.

Le rapport pointe également du doigt une autre pratique problématique : l'obligation pour les patients de déposer un "chèque de garantie" avant toute intervention médicale. Cette démarche, en plus d'être illégale, restreint sévèrement l'accès aux soins pour une large frange de la population, exacerbant les inégalités en matière de santé.

Face à ces constats accablants, le CNDH appelle à une réaction ferme et immédiate des autorités sanitaires pour éradiquer ces pratiques. Le Conseil prône l'instauration d'un système de santé transparent et équitable, respectueux des droits des patients. «Toutefois, l'absence d'un mécanisme efficace et accessible pour la gestion des plaintes et la poursuite des contrevenants constitue un obstacle majeur à l'application de la justice et au respect des droits individuels», estime cette institution constitutionnelle. 

Le rapport en question pointe également les failles du système de tarification et de remboursement des soins. Les tarifs de référence, inchangés depuis 2006, sont largement inférieurs aux coûts réels des traitements et des médicaments. Cette inadéquation financière oblige les assurés à supporter une part significative des frais de santé, compromettant leur accès aux soins et leur bien-être financier.

Pour remédier à ces dysfonctionnements, le Conseil propose une série de recommandations visant à réformer en profondeur le secteur de la santé. Il appelle à l'élaboration d'une stratégie nationale pour intégrer le secteur privé dans un système de santé global et équitable. Cette stratégie devrait inclure, selon le CNDH, la mise en place d'un mécanisme efficace et accessible pour le dépôt des plaintes et la poursuite des contrevenants, la création d'une base de données numérique pour la gestion des services de santé tant publics que privés et une révision complète des tarifs de référence actuels.
Le CNDH insiste également sur la nécessité de renforcer l'industrie pharmaceutique nationale et de créer une "Agence nationale du médicament" chargée de la surveillance et du développement d'un système d'information stratégique dans le secteur de la santé.  

Enfin, le Conseil recommande l'application rigoureuse de la loi n° 33.21 relative à l'exercice de la profession de médecin, en mettant l'accent sur l'incitation et la fidélisation des compétences médicales, notamment dans les zones marginalisées.  Il préconise également la construction d'hôpitaux universitaires dans les 12 régions du pays, ainsi qu'une augmentation du nombre de médecins et de professionnels de santé formés chaque année.

Le rapport du CNDH met en lumière des enjeux cruciaux pour l'avenir du système de santé au Maroc. Les pratiques illégales et abusives décrites par le Conseil ne constituent pas seulement des violations éthiques, mais elles révèlent également une profonde crise de confiance entre les citoyens et les prestataires de soins. La persistance de ces dysfonctionnements témoigne d'une régulation insuffisante et d'un manque de transparence qui minent les fondements mêmes d'un système de santé équitable. La réforme proposée par le Conseil ne doit pas être perçue comme une simple série de recommandations, mais plutôt comme une feuille de route indispensable pour restaurer la confiance et assurer une distribution équitable des soins. En intégrant des mécanismes de contrôle rigoureux et en révisant les politiques de tarification et de remboursement, le Maroc peut espérer construire un système de santé où l'accès aux soins n'est pas un privilège, mais plutôt un droit fondamental respecté et protégé en faveur de tous ses citoyens.

Pour cela, il est impératif que les autorités adoptent une approche holistique, intégrant à la fois le renforcement des infrastructures de santé et l'amélioration des conditions de travail des professionnels de santé. La création d'hôpitaux universitaires dans les 12 régions du pays, comme le recommande le CNDH, serait une avancée majeure pour désenclaver les zones rurales et garantir une répartition plus équilibrée des ressources médicales. De plus, une attention particulière doit être accordée à la formation continue et à la fidélisation des compétences médicales, afin de combler le déficit de personnel qualifié et de répondre efficacement aux besoins croissants de la population. La mise en place d'une "Agence nationale du médicament" représente également un levier stratégique pour assurer la disponibilité et la qualité des médicaments, tout en renforçant l'industrie pharmaceutique locale. En définitive, ces réformes structurelles, si elles sont menées avec rigueur et détermination, peuvent transformer le paysage sanitaire marocain, éradiquer les pratiques abusives et garantir à chaque citoyen le droit à des soins de santé dignes et accessibles.

Mehdi Ouassat


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