Une adolescente a accouché d’un enfant, un fait qui aurait pu passer inaperçu comme tant d’autres. Sauf que cette fois-ci, d’autres éléments s’ajoutent au drame. L’enfant est proposé à la vente comme une vulgaire marchandise. De plus, il s’agit d’une relation incestueuse. Tous les éléments d’une tragédie grecque sont réunis. Enfance, viol inceste, misère sexuelle voire économique, crise de valeurs. Autant de questions qui interpellent les unes plus que les autres.
Plus que l’enfant, c’est d’abord la jeune maman, âgée d’à peine 15 ans qui est la vraie victime. Elle n’a pas pu être protégée ni par sa famille ni par la société, encore moins par le système. Le père adoptif, censé la protéger contre les dangers de la vie, s’est révélé être un monstre en abusant d’elle apparemment des années durant. Ignorance, crise de valeurs, comment en est-on arrivé là ? Les principes élémentaires se référant aux droits humains ont été bafoués. Où en est-on des grands discours sur les droits de l’enfant ? La réalité sur le terrain est tout autre. Chacun a sa part de responsabilité comme l’expliquent les spécialistes. Pour eux tout passe par la communication. C’est ce qui fait défaut malheureusement dans notre société qui considère comme tabou tout ce qui se rapporte au sexe et encore plus à l’inceste du fait qu’il implique les membres de la famille. Ils prônent, de ce fait, une discussion libre sur ce sujet, la communication au sein des familles, au sein des établissements scolaires, entre amis, auprès des acteurs de santé, des acteurs sociaux et des représentants de la justice. Pour eux, il faut impérativement que les personnes capables de protéger les victimes agissent. C’est leur devoir et il s’agit de sauver ces victimes. Les personnes recevant les confidences, quelles qu’elles soient, doivent alerter les personnes compétentes. Et puis la victime dénonce lorsqu’elle se sait en sécurité, lorsqu’elle parvient à surmonter sa peur, son dégoût, sa honte. En effet, la médiocrité, la résignation, la lâcheté, le fatalisme, la crainte des représailles sont souvent évoqués par l’entourage pour justifier leur silence. Parfois, de véritables réunions, conseils de familles s’organisent afin de décider d’étouffer les faits, de retirer la plainte; c’est la conspiration du silence.
L’idée de programmer un cours d’éducation sexuelle dans les écoles marocaines devrait être prise au sérieux pour mieux protéger nos enfants. Mais elle suscite beaucoup de réticences. Bon nombre la considèrent comme une incitation à la débauche. Une aberration, selon la sociologue Salima Bahaoui! «C’est avant tout une réelle prise de conscience permettant de limiter le fléau des grossesses non désirées …. Mieux ils sont informés, mieux ils seront protégés», indique-t-elle. Et puis c’est l’occasion de les sensibiliser, autant que faire se peut, dès leur jeune âge aux comportements douteux qu’on peut tenir à leur égard.