Christine-Daure Serfaty : “Je place beaucoup d'espoir en l'USFP”


Propos recueillis par Montassir SAKHI
Mercredi 14 Avril 2010

Christine-Daure Serfaty  : “Je place beaucoup d'espoir en l'USFP”
La rencontre s'est déroulée dans un café modeste à Marrakech. Sans hésiter, Christine-Daure Serfaty répondait à nos questions l'une après l'autre. Des sentiments jaillissaient : une nostalgie, des
émotions, des regrets,
des certitudes… Pourtant, cette Française qui milite depuis des années aux côtés des partis et
organisations politiques marocains de gauche
affirme que son
engagement pour les droits humains relève du devoir.
Dans cette interview, Madame Serfaty revient sur les années les plus sombres de l'Histoire du Maroc contemporain.

Libé : En 1963, vous êtes venue au Maroc en tant qu'enseignante d'histoire et géographie. Est-ce que vous aviez l'idée de militer pour les droits humains aux côtés d'autres militants de la gauche marocaine ?

Christine-Daure Serfaty : Je n'avais pas pris de décision, mais durant toute ma vie j'étais militante des droits humains. Mon père était résistant contre l'occupation allemande, contre le régime de Vichy. Le militantisme était ma formation d'enfance. Oui, j'ai cherché à entrer en contact avec les militants marocains de gauche. J'ai été à Tanger tout d'abord, et je n'ai pas trouvé grand-chose. J'ai juste rencontré quelqu'un que je respecte bien, en l’occurence El Ouazani, qui était communiste d'opinion. A Tanger, à part de défendre mes élèves quand il y avait des problèmes, je n'ai rien fait de plus. Ensuite, je suis allée à Casa, essentiellement au Lycée Mohamed V. Ce dernier, on l'appelait le lycée rouge à l'époque.

En 1972 vous avez caché deux militants recherchés par les autorités marocaines. Il s'agissait d'Abraham Serfaty et le martyr Abdelatif Zeroual. Quels étaient les conditions et le contexte général de cet engagement ?

Un ami français qui habitait Rabat est venu me trouver à Casablanca et m'a dit qu'il y a un intellectuel marocain (Serfaty) qui vit dans la clandestinité et qui est recherché. Il m'a demandé si je pouvais bien le cacher. Je ne pouvais pas dire non. Mon père était lui aussi clandestin pendant la guerre. J'ai dit oui. Et très vite, Abraham Serfaty m'a dit qu'il y avait un autre militant que je devais aller le chercher en ville, à tel endroit et à telle heure. J'y étais le chercher, et je l'ai bien connu. C'était Zeroual. C'étaient les deux premiers, après j'ai eu d'autres militants à cacher. Au début, cela était chez moi à la maison, après j'ai été en instance de divorce avec mon ancien mari, et j'avais encore deux enfants à la maison. Alors, j'ai organisé une cachette en dehors de la maison. Un enseignant qui devait retourner définitivement en France, m'a laissé son appartement et j'ai commencé à payer le loyer. Je les ai logés, alors pas très loin de chez moi dans cet appartement pour pouvoir faire les courses et leur rapporter à manger. Parmi les nouveaux arrivants, je cite El Mouchtari et Safi (jusqu'à maintenant je ne sais pas s'il s'agit de vrais noms !).

Faisiez-vous partie des organisations secrètes où militaient ces politiques ?

Je n'ai jamais été « encartée » comme on disait en France. Mais, les militants que j'ai connus me considéraient comme étant un membre de leur organisation « Ila Al Amam ».

Quelles étaient les conditions de la mort de Zeroual en 1974?

Au lycée Mohammed V de Casablanca, j'étais en relation avec des militants de « 23 Mars » et de « Servir le peuple ». Donc, j'avais comme amie une femme qui était liée au «23 Mars». Un matin, elle était venue me trouver à la maison et me demanda de faire attention suite à l'arrestation d'un groupe de «23 Mars». Je suis rentrée voir les camarades cachés dans l'appartement. Là, j'ai bien vu que des choses bouleversantes ont eu lieu. Ils m'ont dit que peut-être on ne verra plus jamais Zeroual. Ce dernier avait rendez-vous avec quelqu'un du groupe. Il devait rencontrer ce militant qui était déjà aux mains de la police qui l'a ramené à la place du rendez-vous et a arrêté Zeroual. Ils l'ont emmené à Derb Moulay Chérif et on n'a pas eu de nouvelles de lui pendant longtemps. Un jour, j'ai su par Solidarité de médecins que quelqu'un était mort à l'hôpital Avicenne par « inondation pulmonaire ». On peut comprendre qu'on l'a noyé. Cette Solidarité m'avait dit que ce quelqu'un s'appelle Bakkali, et qu'on l'avait enterré dans la fosse commune. J'ai gardé cette histoire gravée dans ma mémoire. Par la suite, j'ai connu le nom de Zeroual d'une autre façon : il se trouve que j'avais vu le passeport de Zeroual parce qu'il avait été question d’aller en France pour contacter l'organisation Ila Al Amam à Paris. Donc je savais qu'il s'appelait Abdelatif Zeroual. Et comme j'ai été arrêtée en 1974, j'ai été emmenée à Derb Moulay Chérif (ils ne m'ont pas torturée, je pense, parce que j'étais protégée par ma nationalité française. Ils ne voulaient pas avoir trop d'ennuis avec la France, car il en avait déjà puisque j'ai été arrêtée). Au centre de détention, il y avait Amiani, un chef important qui est venu me chercher à la maison dans une voiture avec d'autres policiers. Il y avait également tout un cercle d'agents secrets qui écoutait ce que je disais pendant l'interrogatoire. Par moments, ils parlaient entre eux. Moi, je regardais la salle, et comme je connaissais le nom de Zeroual déjà, j'ai vu sur une étagère, dans une enveloppe, qu'il y avait écrit le nom de ce militant. Je me suis dit que cela doit être des choses qu'il avait sur lui ou des papiers à lui. Après, j'ai été ramenée chez moi et consignée à domicile, c'est-à-dire que je n'étais pas autorisée à sortir de chez moi pendant deux mois. Par ailleurs, j'avais des interrogatoires tous les jours avec un agent moins gradé que Amiani. Il me posait des questions, il me montrait des clés et des photos et me demandait si je les connaissais… Un jour, je lui ai dit que j'avais vu à Derb Moulay Chérif une enveloppe qui portait le nom de Zeroual ! Du coup, il est devenu furieux, il m'avait mis les mains autour du cou jusqu'à croire qu'il allait m'étrangler, mais ce n'était pas le cas. Après cela, il m'avait dit qu'on avait arrêté Abdelatif Zeroual et qu'« il est mort entre nos mains ». Il n'a pas dit « mort à cause de nous », mais « entre nos mains ». Cela m'a choqué profondément. Zeroual était un homme extrêmement gentil. Il était fort et ferme de caractère dans ses convictions. Mais dans la vie courante, il était très gentil. J'ai eu l'occasion de le connaître pendant les deux années qu'il était caché. Il me parlait de lui et de sa famille.

Comment est intervenue votre arrestation et de quoi vous a-t-on accusée ?

J'ai été arrêtée chez moi. J'étais en instance de divorce, mon mari était là avec les deux filles à la maison. Les agents m'ont demandé de les suivre au commissariat pour quelques questions. Ils ont dit à mon mari qu'ils allaient me ramener. Ils ne m'ont pas dit l'accusation, mais je savais qu’ils étaient au courant que je cachais des militants clandestins. Je crois qu'ils m'ont vu un jour vendre une machine à photocopier, car les militants que je cachais m'ont demandé de  porter à Derb Ghellaf cette machine. Ainsi, ils ont pu me repérer et me suivre.

En 1977, Abraham Serfaty est condamné à perpétuité. Un processus de combat a commencé pour vous afin de le sauver du même sort qu'a connu Zeroual. Parlez-nous de ce processus et de vos actions afin de l'arracher des griffes du régime.
 
C'était pour les sauver tous, et pas seulement Abraham. Je ne me suis pas battue pour un Monsieur que j'avais rencontré. Je me suis battue pour les droits de l'Homme au Maroc, et en particulier, pour ceux que je cachais, ceux que je connaissais. Cela est vrai. J'ai été expulsée du Maroc en 1976. Et là, j'ai commencé un long combat en France et en Belgique.

Quelles étaient concrètement vos actions initiées pour cette cause ?

D'abord, j'ai adhéré au Comité de lutte contre les répressions au Maroc; c'étaient surtout des français. Ils étaient honnêtes et convaincus. Je contactais tous les gens que je pouvais. Je leur disais tout ce que je savais sur la situation des droits humains au Maroc. J'ai été encore plus active quand j'ai connu l'affaire de Tazmamart. C'est-à-dire, quand un jour deux jeunes gens sont venus me trouver chez moi et m'ont dit qu'ils étaient allés voir Amnestye et d'autres ONG et qu'ils n'ont pas pu avoir de l'aide et du soutien. Ils m'ont apporté des lettres clandestines de Tazmamart. C'était tellement affreux ce qui était écrit dans ces lettres de souffrances et de malheurs. Maintenant, tout le monde sait ce que c'est Tazmamart; mais à l'époque, on ne savait pas que ce bagne existait et dans quelles conditions vivaient les détenus. J'étais tout à fait bouleversée. Ils mouraient tout le temps, un par un. Mon action était urgente de parler et faire parler de cette affaire grave. J'ai été trouvée des ministres tels que Jospin. J'ai parlé dans au moins deux radios, notamment France Inter. J'ai été voir des chaînes de télévision. Le Comité de lutte menait aussi des actions pour faire connaître les répressions au Maroc.

Comment ces deux lettres sont-elles sorties du centre de détention Tazmamart ?

C'étaient deux frères d'un prisonnier de Tazmamart qui faisaient sortir les lettres par un gardien qui était de la même région où habitait le détenu. Et comme vous le savez bien, il y avait une certaine solidarité entre les gardiens et les prisonniers. Le détenu disait dans sa lettre qu'il fallait aller voir sa famille et que cette dernière devait lui donner de l'argent. Il est signalé dans la lettre que la moitié sera pour le détenu et l'autre pour le gardien.

En 1986 vous avez épousé Abraham Serfaty alors qu'il était en prison. Ce mariage a eu lieu suite à une intervention de Danielle Mitterand. Parlez-nous un peu de cette période et de ce choix.?

J'ai reçu très peu de lettres d'Abraham quand il était en prison. Un jour, j'ai reçu une lettre où il me disait qu'il avait été très malade. Cela m'avait mise en colère. J'ai conclu qu'il n'était pas seulement condamné à perpétuité avec ses quatre camarades de la prison de Kénitra, mais encore qu'on allait le laisser mourir sans le soigner. Donc, je suis allée voir une amie qui travaillait auprès du gouvernement socialiste français à l'époque et je lui ai demandé de l'aide. Elle m'a proposé d'aller rencontrer Madame Mitterand. J'ai été la voir. C'était dans un bureau à l'Elysée. Elle avait un grand chien sous son bureau; moi j'ai peur des chiens (elle rit). Je lui ai raconté l'affaire Serfaty, et elle m'a demandé de lui laisser le temps d'un week-end pour voir ce qu'elle pouvait faire. Elle a écrit au Roi du Maroc. Ce dernier a lu sa lettre en public et a dit: « Voilà une lettre, enfin polie, de Danielle Mitterand; elle demande qu’une Française épouse quelqu'un qui est en prison ». Il est à signaler que Danielle Mitterand et Hassan II ne s'entendaient pas avant cette affaire. Moi, je ne savais pas qu'il y avait affaire de mariage. J'avais demandé d'aller le voir, c'est tout. Le Roi avait dit qu'il était d'accord et qu'il allait « faciliter les démarches », c'est-à-dire, je pense, qu'il avait dit au rabbin de Kénitra d'accepter ce mariage.
Un jour, j'ai eu deux coups de téléphone. Le premier était de Danielle Mitterand qui me disait, toute joyeuse que le Roi avait accepté, et le deuxième, c'était l'ambassadeur du Maroc en France qui était un homme gentil. C'était le doyen des ambassadeurs, c'est-à-dire le plus âgé entre les ambassadeurs du Maroc. Il m'a dit que Sa Majesté le Roi a accepté que je rentre au Maroc pour voir Abraham, mais que je ne devais pas rentrer le 3 mars qui était la fête du Trône à l'époque. Je me rappelle que j'ai eu un billet d'Air France gratuit, offert par le gouvernement français, et je suis partie au Maroc. Je vous avoue que j'étais très bouleversée. D'abord, le Maroc est mon deuxième pays. Je ne l'avais pas vu depuis huit ans, et puis je ne savais pas comment cela allait se passer. Je suis partie, mes enfants étaient un peu nerveux. Je suis arrivée à Rabat et j'ai tout de suite vu que j'étais poursuivie par un policier. Il était tout le temps derrière moi, et cela se voyait bien. Il voyait ce que j'écrivais et ce que je donnais comme adresse, et cela depuis l'aéroport.
Un mardi, j'ai pris un grand taxi et je me suis rendue à la prison de Kénitra. Normalement, il n'y avait pas de visite les mardis, mais moi je ne connaissais pas cette règle. Je suis rentrée chez le directeur qui était au courant de la décision royale et qui a appelé Abraham que je n'avais pas vu depuis 12 ans. On n'a pas pu parler librement, parce que le directeur est resté avec nous. Ce dernier, je l'avais rencontré dernièrement à Marrakech. Il est venu taper sur mon épaule et m'a dit: «Est-ce-que tu te rappelles de moi?»; j'ai répondu « non » et il m'a dit « c'est moi qui vous ai mariés » ! Après ma première visite, on a attendu plusieurs mois pour que je puisse l'épouser.

Après le mariage, vous avez passé cinq années séparée de lui. Quels étaient vos sentiments suite aux visites et aux rencontres au parloir de la prison de Kénitra ?

J'ai vécu cette période comme j'ai pu (elle rit). Je partais en grand taxi; j'ai fait la connaissance au parloir de tous les détenus qui étaient en prison. J'ai connu Driss Benzekri, Kaitouni Idrissi et d'autres. Je me rappelle aussi de Zaâzaa qui me disait toujours : « Tu te bats pour Abraham, mais pas pour nous ! ». Je lui répondais que ce n'était pas vrai et que c'est pour tous les détenus que je me battais. A la fin, il a été libéré avant Abraham !

En 1990 le célèbre livre de Gilles Perrault « Notre ami le roi » est paru. Il a mis l'accent sur les atrocités d'un régime et a dévoilé au monde entier ce qu'étaient les prisons secrètes au Maroc. Comment avez-vous collaboré à la sortie de ce livre ?

C'est Gilles Perrault qui a tout écrit. Je l'ai informé de la situation des droits humains au Maroc. Lui, il ne savait pas beaucoup de choses du Maroc. Il s'agissait d’un accord qu'on a fait avec Edwin Plenel, directeur du journal Le Monde et les éditeurs de Gallimard. Quand le livre est sorti, j'ai envoyé le premier exemplaire à Abraham à la prison. Il fallait faire les choses vite avant que la police ne réagisse. Alors, j'ai enlevé la couverture, j'ai mis celle d'un livre sur l'URSS et je le lui ai envoyé. Il l'a lu immédiatement et l'a passé aux autres détenus. Ces derniers ont donné le livre à leurs familles qui l'ont photocopié, et on peut dire que des Marocains ont lu le livre en même temps que les Français.

Quelles étaient exactement les informations que vous avez transmises à Gilles Perrault ?

Des informations sur la situation des droits de l'Homme et les centres de détention secrets au Maroc. Pour le reste, je lui ai proposé des livres et articles de journaux à consulter.

En 1991 votre mari est sorti de prison. Les autorités marocaines vous ont expulsés du pays. Comment avez-vous jugé cet acte ?

C'était une façon de nous punir. Apparemment, nous avons créé beaucoup d'ennuis à ces autorités.

Comment êtes-vous retournée au Maroc ?

Huit jours après le décès de Hassan II, que Dieu ait son âme, un ami de l'USFP qui s'appelle Boudarka m'a téléphoné alors que j'étais avec Abraham à la campagne et m'a dit: « On ne te voit plus à Paris, qu'est-ce qui se passe?». J'avais bien compris qu'il y avait quelque chose de nouveau qui se préparait. Je suis partie à Paris avec mon mari. Je l'ai rencontré et m'a dit qu'un ami du Roi qui était Mehdi Qotbi lui disait que le nouveau Roi du Maroc demande qu'on lui envoie le dossier d'Abraham, chose que j'ai faite immédiatement. Je n'ai pas osé dire tout de suite cela à Abraham parce qu'il avait eu déjà beaucoup d'espoir et beaucoup de déception. C'était fin juin. En août, André Azoulay a téléphoné à Abraham et nous a fait venir, lui et moi à Paris pour préparer le retour. Là, j'ai pensé que la demande était officielle. Il faut signaler aussi que notre retour s'est fait dans le secret. Avant le décollage, on avait rendez-vous dans un hôtel à côté d'Orly, et nous étions emmenés par le chef d'escale, le préfet de police, les deux ambassadeurs du Maroc en France. Ils nous ont accompagnés jusqu'à l'avion, sans passer par les contrôles de police. Nous avions des billets où il n'y avait pas nos noms, et quand on est arrivés, c'était aussi dans le secret. Simplement la radio avait annoncé, pendant que nous étions en vol, qu'Abraham Serfaty rentrait au Maroc. Alors tous les militants qui ont entendu cela sont arrivés à l'aéroport, mais aussi à l'hôtel où on nous avait emmenés. Je pensais que ces militants seraient contents. Au contraire, ils étaient furieux parce que nous sommes retournés au pays grâce au  Roi et non par militantisme. Donc, le fait de rentrer de cette manière n'était pas conçu comme un acte positif par eux. Mais je vous avoue que ni Abraham ni moi n'avions pensé qui nous faisait rentrer.

Est-ce que le gouvernement El Youssoufi est intervenu pour que vous puissiez rentrer au pays ?

Peut-être qu'il y avait la collaboration du gouvernement Youssoufi, mais elle n'était pas montrée. Quand nous sommes arrivés à Rabat, il n'y avait personne du gouvernement. Que du palais Royal ! Cela m'a profondément frappée. Il y avait Fouad Ali El Himma, c'est lui qui est entré dans l'avion, et c'est pour cela que je l'aime bien ! Cela vous paraît idiot, certes, mais c'est la première personne que j'ai vue dans le Maroc de Mohamed VI. Il a dit à Abraham : « Je suis Ali El Himma, directeur du cabinet Royal, je vais vous conduire à l'hôtel et c'est Sa Majesté qui m'avait demandé de venir vous accueillir ». Autrement dit, c'est lui qui avait la figure du nouveau Maroc si je peux dire. Ils nous ont logés au Hilton, je n'avais jamais été dans un hôtel aussi chic. Il y avait aussi Hassan Aourid, Azoulay, Mehdi Qotbi, Azziman… Il y avait surtout des ministres de souveraineté.

Qu'est-ce qui a changé au Maroc depuis que vous y êtes retournée ? Est-ce que vous considérez qu'il y a une évolution en matière des droits humains au Maroc ?

Au niveau des droits de l'Homme et de la liberté d'expression il y a des évolutions sans prétendre que cela est parfait. Déjà, j'ai protesté par écrit sur la façon dont les islamistes ont été traités suite aux événements de Casablanca. C'est affreux ce qui se passe avec eux aujourd'hui. Mais dans l'ensemble, il y a une évolution. Je n'ai plus de policier derrière moi, je parle comme je veux… Ce qui n'a pas vraiment changé, c'est la différence entre le riche et le pauvre ! Il y a toujours beaucoup de misère, et il y a des gens très, trop riches !

Au niveau de la démocratie et des institutions politiques, est-ce que vous considérez qu'il y a un changement ou s'agit-il des mêmes structures et institutions?

Ce n'est pas une démocratie ! La démocratie c'est la séparation des pouvoirs, et là on ne peut pas dire qu'il y a une séparation de pouvoirs. Par exemple, la justice est toujours dépendante, et donc il y a beaucoup de choses qui ne correspondent pas à la définition de la démocratie. Et comme je suis optimiste, je dis que peu à peu les choses vont aller au mieux.

Est-ce que vous pensez qu'il y a une dynamique au niveau des partis politiques et de la société civile pour pousser en avant le changement ?

Dans les associations, oui. Dans les partis politiques, je ne pense pas. Mais il faut savoir qu'on les a fait taire pendant 40 ans. Ils ne peuvent pas se réveiller facilement. J'ai beaucoup d'espoir en l'USFP et en quelques membres du PPS. Pour le PAM, j'ai des amis qui sont dans le parti. Je connais El Himma, je ne sais pas quel est leur programme et ce qu'ils font au juste, mais j'ai confiance en lui en tant que personne. Pour l'USFP, j'espère que la condition organisationnelle actuelle débouchera sur une situation meilleure.

Quel est votre message aujourd'hui à la jeunesse marocaine ?

Un message d'espoir, c'est sûr. Si les jeunes connaissent le passé du Maroc, ils seront heureux de vivre maintenant, mais il faut qu'ils soient encore plus heureux de vivre demain.


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