La Moudawana en caravane
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Selon Najat Ikhich, présidente de la Fondation Ytto et coordinatrice de ladite campagne, l'actuelle caravane d'Imilchil n’est qu’une étape dans une série des caravanes entamées depuis 2003. Elle s’inscrit dans le cadre de la campagne nationale pour la régularisation des actes de mariage entamée il y a quelques années et qui vise à appliquer l’article 16 du Code de la famille stipulant que seul le document portant acte de mariage constitue une preuve dudit mariage. Mme. Ikhich a indiqué que cette caravane vise Imilichil, Azylal, Ouarzazat et le Rif qui représentent des points noirs où sa Fondation a pu constater un grand nombre de mariages contractés sans la présence d’un adoul. « S’il est vrai que ce phénomène existe aussi dans les grandes villes, entre autres, Casablanca, Rabat et Marrackach, reste que dans les régions citées auparavant, ce fléau dépasse toute estimation », a-t-elle précisé.
Le mariage coutumier pose-t-il problème ? « Évidemment que oui. Il suffit d’observer le nombre de femmes célibataires abandonnées qui sont parfois contraintes de quitter leur village et leurs enfants considérés comme non légitimes, pour constater que l’acte de mariage constitue une garantie pour les droits de la femme et des enfants issus de ce mariage et une protection en cas de divorce ou de décès. Un mariage non authentifié signifie que la femme n’aura pas droit à sa pension en cas de divorce, ni à l’héritage en cas de décès et que ses enfants ne seront pas considérés comme légitimes de même qu’ils seront privés de leur droit à la scolarisation du fait qu’ils ne sont pas enregistrés à l’état civil », a souligné la coordinatrice nationale.
Mme. Ikhich estime également que le mariage non authentifié n’est que l’arbre qui cache la forêt, celle du mariage des mineurs. Un phénomène social qui se perpétue dans ces régions. Elle donne l’exemple d’Anfgou où une fillette de 7-8 ans voire moins 4-5 ans peut se marier et avoir son premier enfant à l'âge de 12 ou 13 ans. Ces mariages se font, selon elle, sans la présence d'adouls mais approuvés par seulement deux témoins. Résultat : une forte natalité, un taux record d'analphabétisme.
Pour remédier à cette situation, des tentes de sensibilisation ont été dressées. Les participants à cette caravane ont dialogué avec les habitants et particulièrement avec les jeunes du village sur les effets néfastes de ce genre de mariage. "Nous avons cherché, à travers ce contact direct avec les populations, à sensibiliser les parents et notamment les jeunes sur les avantages du mariage des filles à 18 ans et les enjeux de leur scolarisation ", a-t-elle souligné.
Pourtant une question demeure : une caravane suffira-t-elle à abolir cette réalité sociale ? « Absolument pas. Il faut des dizaines, voire des centaines car les us et coutumes ont la peau dure. Et à ce propos, on a constaté que l’Etat ne joue pas son rôle, alors qu’il y a un engagement de sa part lors de la modification du Code de la famille, à mettre en place tous les moyens pour appliquer les dispositions du nouveau Code. Cela fait sept ans que le Code a été promulgué, mais rien ne semble venir », a noté la coordinatrice de la campagne avant d’ajouter que « la mise en œuvre de la Moudawana n’est pas uniquement l’affaire de la société civile. L’Etat doit assumer sa responsabilité. Les ministères de la Justice, de l’Intérieur et de l’Enseignement doivent s’impliquer davantage. On a déjà proposé l’idée des guichets mobiles ou des séances collectives avec des juges, comme c’est le cas du Moussem des fiançailles d’Imilchil. D’ailleurs, je me demande pourquoi l’Etat, lors des dernières élections, a mobilisé l’ensemble des moyens humains et financiers pour généraliser la CIN et n’a pas fait de même quand il s’agit des actes de mariage. Peut-être c’est aux responsables qu’il faut demander réponse », a conclu Mme Ikhich.