Bis repetita, mais pas pour tous

23.096 cartes d’immatriculation délivrées lors de la première opération de régularisation et 1.809 migrants déboutés


H. Bentaleb
Mercredi 28 Décembre 2016

Selon les autorités marocaines, la première phase de l’opération de régularisation des étrangers en situation administrative irrégulière a largement atteint ses objectifs.   En termes de chiffres, elle a permis de donner une suite favorable à 83,53% des 27.649 demandes présentées aux services compétents et permis la délivrance de 23.096 cartes d’immatriculation.
La région de Rabat-Salé-Kénitra a reçu le plus grand nombre de dossiers avec 7.853 personnes régularisées (34%), suivie du Grand Casablanca avec 5.774 (25%), de l’Oriental avec 2.310 (10%) et de Fès-Meknès avec 2.310 (10%).
32% des personnes ont été régularisées à Rabat, 24% à Casablanca (Ain Sebâa-Hay Mohammadi 7%, Aïn Chok 2%, Hay Hassani 11% et Anfa 4%), 11% à Oujda et Fès, 10% à Tanger-Asilah, 5% à Salé, 4% à Marrakech et 1% à Agadir, Kénitra et Inezgane-Ait Melloul.
La répartition par âge révèle que les plus de 18 ans représentent  87%, les moins de 18 ans (8%), les moins de 6 ans (1%) et les plus de 50 ans (4%). Les hommes représentent 56% du total et les femmes 44%.
Les Syriens arrivent en tête des personnes régularisées avec 23% suivis par les Sénégalais (21%) et les Congolais (11%). Les Ivoiriens et Nigérians  représentent 9% devant les Camerounais et les Guinéens (5%), les Maliens et les Philippins (4%) et les Mauritaniens (2%).
Les Libyens, les Egyptiens, les Nigériens, les Centrafricains, les Libériens et les Comoriens se placent en bas du tableau avec 1%.       
 La Commission nationale de suivi et de recours (CNSR), chargée de statuer en dernier recours sur la suite à donner aux demandes rejetées au niveau des commissions locales,  a validé  92% des recours, soit 3/4 des dossiers, et a répondu négativement à  8%,  soit 1.809 personnes.  
Ces résultats ont été obtenus après l’adoption de nouveaux critères ou plutôt leur assouplissement. Tel est le cas concernant les conjoints de Marocains et les conjoints d’étrangers en situation régulière et les critères relatifs à l’emploi. La commission technique a pris en compte tout moyen de preuve pouvant démontrer la relation de travail. C’est le cas également du critère de résidence de 5 ans puisque désormais tout moyen de preuve, voire une simple déclaration d’honneur suffit.
Les personnes souffrant de maladies graves, les  mineurs n’ayant pas atteint l’âge de la majorité légale  durant l’opération exceptionnelle de régularisation ainsi que les mineurs ayant rejoint le Maroc après la fin de cette opération ont également bénéficié de cet assouplissement des critères d’éligibilité.
Des critères supplémentaires relatifs au niveau d’instruction des demandeurs, à savoir le brevet et plus ainsi que des personnes créatrices d’entreprises, les victimes de la traite et les conjoints de réfugiés n’ayant pas encore eu de documents de séjour ont été ajoutés, sachant que ladite  commission a été habilitée à statuer sur la base de critères qu’elle a développés dans le cadre de ses attributions, et qui découlent essentiellement de la Constitution, du droit international des droits de l’Homme, du droit international de la migration et de l’asile ou de considérations humanitaires. Elle s’est également basée sur la jurisprudence issue du droit comparé et des bonnes pratiques internationales.
Pourtant, le déroulement de la première phase de cette opération n’a pas été de tout repos pour plusieurs demandeurs qui se sont trouvés confrontés à plusieurs problèmes dus, en grande partie, au manque de formation des responsables en charge des bureaux des étrangers. Ainsi, plusieurs cas de rejet de dossiers ont été enregistrés lors de l'étape du remplissage de la demande de régularisation par certains fonctionnaires relevant des bureaux des étrangers. Des rejets qui ont été notifiés aux demandeurs oralement ou par écrit, mais sans pour autant préciser les motivations de cette décision ni donner d’informations sur les démarches à suivre et les recours possibles.  
Plusieurs acteurs associatifs ont estimé que le nombre de dossiers déposés dissimule un autre plus important, à savoir celui des dossiers rejetés et que le vrai chiffre n’a pas été révélé. Ils estiment que leur taux a été important vu les critères restrictifs d'éligibilité imposés par les pouvoirs publics. Certaines informations relayées par des organes de presse ont révélé que les 19 demandes qui ont été déposées à Zagora ont toutes été rejetées. Ce fut aussi le cas à Errachidia où 10 demandes sur 30 ont été acceptées et à Ouarzazate où 5 demandes sur 30 ont été validées.
Ces commissions locales chargées de l'étude des dossiers ont été souvent critiquées pour leur composition. Les ONG ont mis à l’index l’esprit sécuritaire qui a prédominé au sein de ces commissions. En fait, celles-ci sont composées de représentants du ministère de l’Intérieur, de la police nationale, de la gendarmerie Royale, de la DGST (renseignements intérieurs) et de la DGED (renseignements extérieurs) qui exercent leur mission sous l’œil bien vaillant des gouverneurs et des walis. Seuls deux représentants d'ONG désignés par le CNDH représentent la société civile.
Cette dernière a également révélé que la campagne de régularisation a largement profité à des personnes relevant d'autres catégories. Notamment les étudiants qui bénéficient déjà d'une carte de séjour, ainsi que des réfugiés syriens, qui ne bénéficient toujours pas du statut de réfugiés. Une exclusion qui persiste depuis janvier 2013, date à laquelle le HCR-Maroc a cessé d'enregistrer leurs dossiers de demande d'asile. Et pour cause: la Commission ad hoc a pris l'engagement de mettre au point un programme spécifique d'accueil destiné aux Syriens. Une démarche qui peine encore à voir le jour et dont le retard s’explique par le fait que le Royaume n’a pas encore trouvé de dispositif d'identification qui soit efficace. En effet, nombreux sont les demandeurs d'asile qui ne présentent pas de titres de voyage ou des documents d'identité originaux. Certains dissimulent ou détruisent leurs documents ou s’inscrivent sous de fausses identités. Un problème des plus complexes notamment sur le plan technique et pratique faute de registres nationaux fiables de la population et de banques de données numérisées répertoriant les empreintes digitales dans les pays d'origine des migrants.


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