Au Pakistan, la classe moyenne délaisse l’Occident pour rêver de la Chine


AFP
Jeudi 7 Mars 2013

Au Pakistan, la classe moyenne délaisse l’Occident pour rêver de la Chine
Au Pakistan, si l’élite regarde encore vers l’Occident, les enfants de la classe moyenne émergente rêvent de plus en plus de la Chine, un voisin à l’économie en plein essor, aux universités accessibles et où le fait d’être Pakistanais n’est pas un handicap. A la “City School” d’Islamabad, des gamins de douze ans chantent en mandarin sous l’oeil attentif de leur professeur, M. Haiwei. Cette école privée de la capitale a mis sur pied il y a près de deux ans un projet-pilote pour l’apprentissage de la langue de Mao.
Si tout se passe bien, la formule sera déclinée dans les 200 branches que ce collège compte au Pakistan. Et d’autres établissements privés font de même.
La classe moyenne pakistanaise économise pour payer l’éducation de ses enfants, mais a difficilement les moyens de les envoyer un jour à Oxford ou Harvard, comme les fils de l’élite politique, militaire ou industrielle du pays.
D’autant qu’au terme d’une décennie catastrophique pour le Pakistan, accusé d’être un bastion de l’islamisme radical et régulièrement ensanglanté par des attentats, ces jeunes peinent à obtenir des visas d’étude à l’étranger. Mais la Chine, elle, a dopé ses échanges commerciaux avec le Pakistan et investi en masse pour relever la qualité de ses universités.
Résultat, une nouvelle option pour la jeunesse, et un boom de l’apprentissage du mandarin au Pakistan.
“Lorsque nous sommes allés en Chine, les gens se réjouissaient de savoir que nous étions Pakistanais. C’est là une différence majeure avec le rêve américain, qui était encore la priorité il y a quelques années, mais qui s’est déplacé aujourd’hui vers la Chine”, assure Ali Rafi.
Ce lycéen de 18 ans a visité la Chine l’été dernier et envoyé sa candidature pour étudier l’économie à l’université de Shandong. “Le rêve chinois est devenu une possibilité”, dit-il. “C’est plus une option qu’un rêve”, nuance sa camarade Safwa Mir, qui souhaite, elle, étudier la médecine dans l’empire du Milieu.
Comme Ali et Safwa, des milliers de jeunes Pakistanais se préparent à rejoindre les quelque 8.000 étudiants de leur pays déjà en Chine, selon l’ambassade du Pakistan à Pékin.
“Je préfère aller étudier en Chine plutôt qu’au Royaume-Uni car il s’agit d’un pays frontalier et les études y sont moins chères”, assure Adnan Ahmad Khan, un étudiant en mandarin en veste en velours côtelé qui souhaite obtenir un doctorat en communications en Chine.
Misbah Rashid, petite femme discrète aux lunettes rondes perchées sur le bout du nez, fut le premier civil pakistanais diplômé en mandarin d’une université chinoise. C’était en 1981. Depuis, elle enseigne à l’Université nationale des langues modernes à Islamabad et a vu de l’intérieur cet intérêt croissant pour le mandarin au Pakistan.
“Au début des années 80, il n’y avait qu’une poignée d’étudiants au département de chinois... Aujourd’hui nous avons plus de 200 étudiants”, dit-elle. “La majorité proviennent de la classe moyenne et de la classe moyenne inférieure. Nous avons très peu d’étudiants issus de l’élite”.  Les enfants de l’élite ont tendance à ne pas revenir au pays après leurs études aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Australie ou au Canada.
“Mais la Chine n’est pas une société où l’on peut s’assimiler facilement, donc la grande majorité de ceux qui vont y étudier reviendront” et “pourront occuper des postes de direction” dans les sociétés sino-pakistanaises, estime Riaz Khokhar, ancien ambassadeur du Pakistan à Pékin et Washington.
Si le Pakistan et la Chine entretiennent des relations “amicales” depuis des décennies, le commerce bilatéral a mis du temps à décoller. Mais il a atteint 12 milliards de dollars l’an dernier, en forte augmentation sur un an (18%) comme sur la décennie (500%). Et si la Chine craint l’infiltration d’islamistes armés du Pakistan voisin vers le Xinjiang, province musulmane frontalière sporadiquement secouée par des violences, le ton est toujours resté amical et cordial entre les deux pays. Le contraire des Etats-Unis, qui pressent le Pakistan de traquer des groupes islamistes armés et bombardent le nord-ouest du pays avec leurs drones. “Les Chinois ne nous ont jamais dit: +faites cela sinon nous allons vous botter (les fesses) comme le font les Etats-Unis+”, fait valoir M. Khokar.
Les attentats fréquents au Pakistan, pays sur la “ligne de front de la guerre contre le terrorisme” pourraient toutefois compromettre ce rêve chinois émergent. “Nous ne sommes que 50 enseignants pour 6.000 élèves à travers le pays. Nous manquons de professeurs. Nombre d’entre eux trouvent le pays trop dangereux pour y travailler”, regrette le professeur Haiwei, pressé entre deux cours de mandarin.


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1.Posté par Plovdiv le 08/03/2013 23:47
Qu'ils regardent vers la Chine, s'ils veulent, mais ils auront intérêt à se tenir à carreau questions exigences religieuses. La Chine n'est pas fan du tout de religion.

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