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En effet, les Ait Oulghazi et les Ait Daoud O'Ali font partie de la tribu d'Ait Abdi, une communauté composée en grande majorité de nomades. Les relations entre les deux fractions ont été toujours tendues. Les conflits étaient fort nombreux et récurrents. Et les attaques et les contre-attaques ont été monnaie courante, dans cette zone montagneuse à 1.600 m d'altitude, et où les potentialités sont limitées et la terre manque.
Dans son article intitulé " L'homme et les montagnes atlasiques au Maghreb ", paru dans les Annales de géographie en 1996, le géographe Maurer Gérard a montré que dans ces régions, marquées par le pastoralisme, les Ait Abdi ont pris l'habitude d'utiliser des parcours naturels, forêt et steppe des régions basses ou d'altitude dans un cadre collectif et en respectant une organisation traditionnelle. Les déplacements étaient internes au territoire tribal, souvent démesurément allongé et recoupant les principaux compartiments de relief pour bénéficier de la complémentarité de leurs ressources.
Mais depuis les années 1960, Maurer Gérard a noté que cette vie pastorale a été touchée par une rapide sédentarisation, une limitation de l'ampleur des déplacements et une sensible réduction de l'étendue des parcours. Ces tendances, amorcées depuis la période coloniale, s'accélèrent avec l'indépendance. Elles sont encouragées par les autorités qui contrôlent les itinéraires comme le nombre de bêtes. La délimitation des terres domaniales et collectives a réduit les parcours et la création des communes a morcelé l'espace et les communautés traditionnelles, a-t-il conclu.
Ainsi, la tribu d'Ait Abdi s'est trouvée subdivisée en plusieurs fractions réparties sur plusieurs territoires et confrontée au problème de partage des terres et des parcours pour le pâturage.
Mais que s'est-il passé cette année? Pour ce natif de la région, tout a commencé le 1er mai, date d'ouverture d' "Amghal", un pâturage de quelques milliers de mètres, lorsque les Ait Daoud O'Ali ont découvert que les Ait Oulghazi sont déjà passés par là et qu'ils ont violé l'accord leur interdisant de pâturer pendant deux mois avant eux. Dès lors, la tension est montée d'un cran et les relations entre les deux fractions vivent au rythme des harcèlements et des accrochages transformés en conflit ouvert au mois de juin.
Les Ait Daoud O'Ali n'ont pas hésité à attaquer successivement leurs cousines germaines et de voler leur bétail et leurs biens. De leur côté, les Ait Oulghazi se sont contentés de déposer une plainte auprès du tribunal pour vol de bétail et de biens et d'organiser une marche de protestation. Mais rien ne semble venir. La tension est restée vive et les attaques n'ont pas pour autant cessé. Mais pourquoi ?
Selon certains témoignages recueillis sur place, les Ait Daoud ont continué à harceler les Oulghazi, car ils se sont sentis les mains libres de fait qu'ils peuvent bénéficier de la protection du président de la commune de Taghrift et parlementaire de la région. " Hmad Oumrzouk et ses complices ont pu semer la peur au sein de la population car ils sont à la solde de ce parlementaire. C'est lui qui les manipule et les monte contre nous", lâche un habitant d'Ait Oulghazi. De leur côté, les habitants de Taghrift n'hésitent pas à accuser le président de la commune d'Imilchil et d'attiser les haines. Certains soutiennent que ce président nourrit toujours de vieilles rancunes Ces gens disent-ils la vérité ? Difficile à admettre. Pourtant, cet habitant d'Imilchil, ayant requis l'anonymat, persiste et signe : " Ce conflit n'a rien d'une simple querelle entre deux tribus. Il s'agit plutôt d'un conflit politique à but électoral entre le président de la commune rurale de Taghrift et celui d'Imilchil ". Notre interlocuteur souligne que la tribu d'Ait Oulghazi constitue un enjeu électoral crucial. Un moyen de pression au niveau du conseil communal d'Imilchil. Cette tribu représente en effet cinq sièges à la commune, soit un tiers du conseil. Du côté de Taghrift, ce sont des milliers de voix à ne pas perdre. S'investir dans ce conflit, c'est gagner des voix et garantir une nouvelle réélection pour les échéances de 2012. C'est pourquoi notre interlocuteur estime que l'assassinat de Hmad a été prémédité en vue de réaliser cet objectif.
" Je crois que Oumrzouk a été victime d'une machination. Plusieurs indices le prouvent. D'abord, les habitants qui ont quitté le village un jour avant le crime ; ensuite les bétails transportés vers Béni Mellal et Ouarzazate, enfin, la technique pour commettre le forfait ", a-t-il déclaré.
Selon certains témoignages, Hmad Oumrzouk était un homme fort et robuste, connu par sa force physique et sa cruauté. Certains n'ont pas hésité à le qualifier de "criminel ", de " barbare " capable de violer et d'user de violence contre hommes et femmes. "Il n'a rien d'un brave homme, c'est un vulgaire malfaiteur, capable de tout", a constaté un habitant d'Imilchil. Le jour de sa mort, Hmad Oumarzouk était accompagné de neuf personnes, armées de lances, de pierres et de bâtons. Ces individus avaient l'intention de piller et d'abuser des femmes d'Oulghazi. Mais ce 24 juin, les habitants d'Oulghazi leur ont tendu un piège. Ils ont constitué un commando de 12 personnes, divisé en deux groupes. S'en est suivi un affrontement à coups de pierres et de bâtons blessant mortellement Oumrzouk. Le lendemain, celui-ci a été retrouvé baignant dans son sang.
Un simple conflit de pâturage ou une campagne électorale prématurée ? C'est à la justice de trancher.