Voyager dans un car en plein mois d’août n’est pas chose aisée : Les éternels râleurs…


Amel NEJJARI
Lundi 31 Août 2009

Voyager dans un car en plein mois d’août n’est pas chose aisée : Les éternels râleurs…
Voyager dans un car en plein mois d’août n’est pas chose aisée, vous en conviendrez ! Et cela, même si vous choisissez de payer le prix fort. Douze heures de route sur les sentiers du Maroc, entre Oujda et Tanger, les jambes écrasées contre un siège ; le passager de devant ayant décidé de faire un somme, à 19 heures, en abaissant à fond son siège. A peine sortis de la capitale de l’Oriental, certains passagers décident de « casser la croûte » selon leur propre terme. En quelques minutes, le car est embaumé d’une odeur suspecte émanant d’un panachage de nourriture faisant déjà tourner la tête à certains qui s’empressent de sortir des sacs appropriés de leur poche. Au premier virage, c’est une paire de baskets qui tombe dans l’allée centrale et l’on comprend mieux la présence d’émanations d’odeurs de chaussures depuis le début du voyage.
Mais par-dessus tout, ce ne sont pas tellement ces désagréments qui gênent un quelconque voyage mais bien plus, c’est de devoir supporter les coups de gueule des uns et des autres ; des commentaires qui perturbent la tranquillité de pauvres âmes qui n’ont qu’un seul objectif : atteindre la ligne d’arrivée sains et saufs. Côté commentaire, certains sont maîtres en la matière et le font savoir à qui mieux mieux, alliant geste et posture à la parole : le chauffeur de la voiture qui roule devant le car conduirait trop lentement, les moutons que l’on aperçoit dans un champ ne devraient pas être sortis à une telle heure, la route serait trop étroite, la climatisation nuirait à la santé (commentaire accompagné d’une argumentation médicale des plus douteuses), la tomate coûterait trop cher, les lieux publics seraient de plus en plus sales…. Tout y passe, de l’économie à la politique, du fait divers à la mauvaise prestation des athlètes marocains… Des râleurs nés qui le font savoir haut et fort.
Mais le pire de tout est très certainement de se retrouver avec un chauffeur râleur. Lorsque les passagers dorment, c’est lui qui reprend le flambeau… Musique de chaâbi à fond, à minuit passée. A l’évidence, ce chauffeur semble ne pas accepter de voir tant de personnes endormies alors que lui, travaille de nuit. Il décide alors de nous faire la conversation. Et là aussi, tout est prétexte aux commentaires. Chauffeur râleur indigné. Pourquoi l’arrête-t-on à chaque barrage de douanes alors qu’entre Paris et Algésiras, LUI, n’est arrêté qu’une seule fois ? Chauffeur râleur outragé. Comment se fait-il que les ponts (ou plutôt les pontons) sont construits pour supporter tant de tonnes alors que les autocars comme celui dans lequel nous voyageons pèsent le double ? Merci, on se sent un peu plus rassurés après avoir appris cette nouvelle ! Chauffeur râleur expert des Ponts et Chaussées. En roulant sur un tronçon présentant multiples virages près de Fès, le chauffeur qui devait conduire au moins à 100 Km/h engouffre le car dans une fosse. Résultat : le châssis heurte la chaussée faisant un bruit de ferraille qui réveillera, entre temps, ceux qui ont dû prendre un somnifère. Aux nombreuses remontrances des passagers, le chauffeur répondra, avec un rire digne des films d’épouvante : « Ce n’est pas ma faute… Si Karim a dû oublier de combler ce trou ». Chemin faisant et après plusieurs fosses évitées de justesse, notre chauffeur s’improvise chauffeur râleur donneur de leçon… « Ne payez pas vos impôts. Tout cela est la faute des Marocains.
S’ils ne payaient pas leurs impôts et vignette d’automobile, les routes seraient meilleures », nous dit-il en joignant le geste à ses propos avant d’attaquer un autre registre : le chauffeur râleur citoyen… « On est tous responsables de nos routes… Si seulement les conducteurs faisaient un peu plus attention quand ils conduisent…. » Entre temps, notre chauffeur aura grillé plusieurs feux rouges, doublé deux autocars en pleine nuit à un virage, oublié de respecter les lignes continues, roulé en dépassant la vitesse autorisée, utilisé son klaxon à tort et à travers, répondu au téléphone en conduisant… Autrement dit : « faites ce que je dis… Pas ce que je fais » !         


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