Visite controversée d'Erdogan en Allemagne pour tenter une réconciliation

Ankara en quête d'un rapprochement avec Berlin


Samedi 29 Septembre 2018

Le président turc et la chancelière allemande se sont retrouvés vendredi pour tenter de tourner la page de deux années de tensions, un exercice controversé et complexe pour Angela Merkel déjà confrontée à des turbulences politiques internes.
Du côté de l'opposition, des manifestations de groupes turcs et kurdes ont eu lieu vendredi à Berlin et samedi à Cologne où M. Erdogan a  inauguré une mosquée. La police a été déployée en très grand nombre pour prévenir tout débordement.
Dans une tribune publiée jeudi en Allemagne, le président turc a assuré que sa visite devait ouvrir "une nouvelle page" des relations alors que depuis le putsch raté de 2016, Ankara reproche à Berlin la timidité de son soutien, l'Allemagne critiquant la dérive répressive de la Turquie et l'espionnage d'opposants turcs en territoire allemand.
"S'il y a des choses à critiquer dans le système politique alors ce sera critiqué, je le ferai (...) mais cela ne signifie pas que je ne veux pas d'une Turquie stable", a pour sa part prévenu Mme Merkel lors d'une discussion publique jeudi soir, évoquant en particulier "l'état des droits de l'homme" en Turquie.
De son côté, le président turc arrive avec "des attentes très concrètes" vis-à-vis de Berlin, à savoir une participation à sa lutte acharnée contre les partisans du prédicateur Fethullah Gülen, accusé d'avoir fomenté le coup d'Etat manqué, ce à quoi les autorités allemandes se sont refusées jusqu'ici.
Les deux dirigeants se retrouvent aussi au lendemain de l'attribution de l'Euro-2024 à l'Allemagne aux dépens de la Turquie, une bataille dans laquelle M. Erdogan s'était engagé notamment en soutenant bruyamment le joueur allemand d'origine turc, Mesut Özil, qui accusait la fédération allemande de racisme.
Côté allemand, à gauche comme à droite, les appels à ce qu'Angela Merkel reste ferme se sont multipliés, en particulier du fait des atteintes aux libertés publiques. Cinq Allemands restent détenus pour des "raisons politiques".
Angela Merkel et d'autres figures politiques n'assisteront d'ailleurs pas au dîner d'Etat organisé en l'honneur de M. Erdogan par le président Frank-Walter Steinmeier.
Berlin n'a guère digéré les attaques incessantes du président turc, notamment ses accusations de "nazisme" lancées l'an dernier contre le gouvernement allemand.
"L'Allemagne et la Turquie sont très loin d'avoir une relation normale (...) et le chemin est encore long pour rétablir la confiance", résume la présidence allemande.
La chancelière, affaiblie par une année de crises gouvernementales et par les tensions dans sa majorité sur la politique migratoire, devrait donc maintenir une certaine distance.
Mais elle ne veut pas braquer pour autant Ankara, alors que l'Allemagne compte une communauté turque de trois millions de personnes.
La Turquie est aussi un partenaire incontournable pour empêcher tout nouvel afflux de demandeurs d'asile depuis la Syrie.
La situation à Idleb, dernier grand bastion de la rébellion, doit en particulier être évoquée avec M. Erdogan, alors qu'une zone démilitarisée doit être instaurée suite à un accord russo-turc afin d'éviter une crise humanitaire alors que se prépare une offensive du régime syrien.
Le sujet est important pour Mme Merkel, dont la décision d'accueillir plus d'un million de demandeurs d'asile dont des centaines de milliers de Syriens en 2015-2016, a entraîné une percée historique de l'extrême droite (AfD) aux législatives de septembre 2017, affaiblissant considérablement la chancelière et minant la cohésion de sa majorité.
Le président turc compte lui discuter de cette poussée des partis anti-migrants et anti-islam, certains ayant même pris place dans des gouvernements européens.
"L'essor du radicalisme de droite et du racisme institutionnel sont aujourd'hui le plus grand danger pour l'ordre démocratique de l'Union européenne", a prévenu avant sa visite M. Erdogan, dénonçant une "islamophobie" ambiante.
Enfin, il voudra parler économie. Alors que son pays fait face à une crise importante, il attend des "mesures" de l'Allemagne.
"Il ne s'agit pas d'aide économique, mais nous devons coopérer économiquement et on va certainement se mettre d'accord sur certaines choses", a répondu Mme Merkel.
Le groupe allemand Siemens lorgne sur un méga-chantier de construction de lignes à grande vitesse dont le montant total pourrait s'élever à 35 milliards d'euros.


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