La soirée inaugurale prévue au complexe sportif de la Paix à partir de20h30 ce mercredi 05 août sera animée par trois ténors de la chanson, Abdelhadi Belkhayate le ténor de la chanson marocaine, Cherifa la star du Moyen-Atlas à la voix sensuelle et Saida Charaf la diva sahraouie.
Ainsi, l'interculturalité marocaine brillera de mille feux au cœur du Moyen Atlas, c’est-à-dire la ville d’Ifrane, qui accueille des centaines de Marocains résidants à l’étranger et des milliers d’estivants et de touristes venus des différentes villes du Royaume et de l'étranger pour profiter de la beauté des paysages naturels de cette belle cité.
Abdelhadi Belkhayat est né à Fès en 1940. Très vite, le désir de participer à une audition à la radio lui permettra de devenir le chef de file d’une nouvelle génération composée de Mohamed Hayani, Latifa Amal, Abdelwahab Doukkali entre autres...Et cette génération est séduite par une autre totalement différente composée de Warda El Jazaëriya, Sabah, Oum Kalthoum, Farid El Atrach, Abdelhalim Hafez, etc.
Abdelhadi Belkhayat décide de découvrir ce magnifique pays avec sa splendide musique. Ainsi, il s'inscrit au conservatoire du Caire. Mais le dilemme de chanter en dialecte ou rentrer sans succès l'entraîne à choisir le second. D'autres pays comme l'Algérie, la Tunisie et la Libye l'encouragent et reconnaissent son style unique.
Sa voix forte et rassurante lui a permis d'adapter différents genres musicaux. Il chante avec succès la "qassida de Mohammed Abdelwahab". Comme il se retire quelque temps pour être Imam, il reprend plus tard pleinement son domaine favori : la chanson.
Par ailleurs, «qu’elle soit paysanne des montagnes ou des vallées, musicienne, danseuse ou chanteuse à l’instar des Chikhats ou des Rwayyes du Souss, la femme marocaine est attachée à sa terre, à sa langue, aux traditions d’un héritage oral transmis de génération en génération. Choristes ou danseuses, les Chikhats sont originaires du Moyen-Atlas et certaines d’entre elles s’affirment comme chanteuses à part entière en perpétuant une tradition poétique qu’elles se sont appropriée au fil du temps». Tel est le cas de Cherifa Kerfite qui brillera de mille feux avec sa très belle voix sensuelle lors de la soirée d'ouverture de cette troisième édition du Festicval Tourtite d'Ifrane.
Alors qu’elle était une jeune paysanne, Cherifa est découverte par le grand maître et chanteur Rouicha dont elle a été longtemps la choriste avant de prendre son envol. A travers le "Tamawayt", elle déclame les paroles des poètes des villages d’Imazighenes du Moyen Atlas avec sa voix puissante qui résonne au-delà des montagnes. Cherifa Kerfite est née à Tazrout mu Ukhbou, près de Khénifra. Elle n’a jamais fréquenté l’école, à l’instar de la quasi-totalité des filles de son âge dans sa région. Elle a travaillé sa voix en plein air alors qu’elle était bergère, à la maison lors des tâches ménagères ou encore lors des rencontres entre jeunes filles et dès l’âge de 16 ans, elle s’est produite dans les fêtes traditionnelles du village.
Au début des années 80, elle rencontre le chanteur-vedette Mohamed Rouicha. Cette rencontre la conduit à la consécration de chanteuse-cheikha. Elle a alors enregistré avec Rouicha mais aussi avec Meghni, Lamrabeth et Aziz Arim. Elle n’a cependant pas enregistré en son nom ; sa famille ne souhaitait pas qu’elle fasse du chant son gagne-pain.
Très vite, Cherifa s’imposera dans son pays avec sa voix exceptionnelle comparable à celles de Tifrist, Rqya bbou et Hadda Ouâkki, toutes chanteuses de tamawayt au Moyen-Atlas. Lors d’une soirée en France en 1999, Chérifa avait impressionné le public parisien ému par la puissance et la rugosité de sa voix.
La poésie de Chérifa, tout comme celle des cheikhats du Moyen-Atlas, est une poésie profonde qui traite principalement de la vie quotidienne. C’est aussi une philosophie de la vie ; on y trouve des enseignements sur leur conception du monde. C’est une poésie très imagée, faite de métaphores. D’où la difficulté et la complexité de sa traduction. Sous les pressions de son entourage et de certains de ses amis selon notre source d'information, Chérifa finit par rentrer en studio et enregistre son premier album qui porte son nom. Un album Berbere Blues produit par "From a Distance" en 2002. Il comporte 6 titres (54:26). Le premier est intitulé Idr-d umalu zi _ari ("L’ombre de la forêt"). Le deuxième titre Mayc y iwin y_awrt ? (Qui est ton conseiller) traite de l’amour ; une sorte d’échange entre deux amoureux.
Dans Ndda s udbib nnan-i ("Le médecin m’a dit"), Chérifa évoque l’amour versatile et en s’adressant à son bien-aimé, elle lui dit : "Si je ne t’épouse, tu me quitteras". Dans Ma gn tufit amazir ? ("Où as-tu élu domicile ?"), elle dit combien "les nuits sans [son] aimé sont longues" et que [...] "la nuit qu’il passe avec [elle] est courte !" Il est indéniable qu’aujourd’hui, Chérifa, avec sa renommée internationale, contribue à la diffusion de l’art amazigh à travers la planète. Tamawayt est ainsi portée au plus haut niveau et pourra conquérir sa place dans le vaste champ des genres musicaux et artistiques. Avec des artistes comme Chérifa, la culture amazighe survivra et résistera aux "marées" qui visent à la dévaster ! Selon la presse étrangère qui a connu Cherifa, "la voix - de cette dernière - est superbe dans tous les sens du terme ».
Un mélange de fauve sensualité et de fierté hiératique. Les musiciens qui l’accompagnent, qui au lothar (luth à 4 cordes), qui au bendir (petites percussions tendues de peau), sont de premier ordre." Marie-Aude Roux, Le Monde note que "c’est une voix puissante, rugueuse, suraiguë...Celle des chanteuses berbères imazighen du Moyen-Atlas, au Maroc. (...) On reste, longtemps après l’avoir écoutée, hanté par ce chant antique, fait pour traverser les montagnes, venu du tréfonds de l’âme."
Il y a lieu de signaler que tous les épris de l’art la connaissent. Elle incarne en quelque sorte selon nos confrères au Reporter, «la force du désert» à travers notamment, sa voix puissante, cassée, liquide et surtout chargée de mémoire.
Saïda Charaf, une artiste originaire de Laâyoune, se produira elle aussi à Ifrane, dans le cadre de ce Festival. Après de brillants passages sur différentes scènes, Saïda Charaf a accompli des prouesses musicales en sondant le patrimoine musical sahraoui tout en étant ouverte sur la diversité des styles nationaux et internationaux. L’artiste est dans une quête constante des affinités entre un style local et la musique internationale. Elle porte bien son surnom de “diva sahraouie”, l’étendue de son talent et la force de sa voix sont reconnues à l’unanimité par des célébrités de la chanson arabe et orientale telles que le grand artiste libanais Ouadiï Safi et l’ auteur-compositeur français de musique électronique, Jean-Michel Jarre qu’elle a accompagné sur scène lors de son dernier Festival à Merzouga en décembre 2006.
Depuis son enfance, la chanteuse a été attirée par les différentes sonorités orientales qui lui font véritablement découvrir et apprécier le répertoire arabe classique. Diplômée en littérature arabe, Saïda Charaf est également journaliste. Elle a travaillé, pendant deux ans, comme correspondante pour le compte d’une chaîne de télévision espagnole. Son premier album, intitulé «Notre lune» est sorti en 2006.