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La première réponse exhaustive à cette question fut apportée par les travaux économétriques de Laaboudi/Tahraoui, il y a quelques années déjà. Ils avaient soutenu que notre économie devait tendre à un taux de croissance moyen de 6,7% pour être créatrice nette d’emplois (période 2004-2014). La principale condition pour réaliser ce taux de croissance était l’augmentation de la part de l’investissement national dans la richesse produite de 22% à 28%. Depuis, cette part a dépassé les 30% sans que le taux de croissance n’ait dépassé la moyenne de 4,8%.
La CGEM dans son projet « Vision 2020 » a repris à son compte l’objectif moyen « 6,7% » tout en conseillant, à sa manière, pour sa réalisation, d’élever le taux d’investissement à 35% et d’améliorer la gouvernance économique.
La réponse la plus amusante, ce qui n’enlève rien à son sérieux, nous a été livrée il y a quelques jours par notre indémodable Haut commissariat au Plan. Il valide, aux dépens de l’actuel et tout futur exécutif, appelés ainsi à être plus ambitieux, le taux de « 6,7 %». Taux tributaire d’un investissement national voisin des 40%. Ainsi le prochain exécutif est prévenu, s’il n’alloue pas 40% des richesses nationales produites chaque année à l’investissement pour atteindre les « 6,7% » de taux de croissance, sa copie sera jugée sévèrement.
Dans les faits, que peut nous amener ce taux de croissance que beaucoup de milieux semblent appeler de leurs vœux ? D’abord, la création d’un nombre d’emplois suffisants susceptibles d’éloigner le spectre de la pauvreté et les éventuels troubles qu’elle peut engendrer. Le Marocain va-t-il être plus riche ? Tout est relatif. Il va vivre en 2030 au mieux comme vit un Malaisien maintenant. Pour vivre comme un Espagnol qui est plus proche de lui géographiquement, il faut attendre beaucoup plus longtemps.A supposer que l’on se mette d’accord sur le taux de 6,7%, il reste à expliquer pourquoi les trois approches ont avancé des pourcentages d’investissement différents et plus grands dans l’ordre chronologique.
Les trois approches, modèle Laaboudi/Tahraoui, CGEM, HCP, en s’interdisant de remettre en question la configuration du système productif (les secteurs économiques étant ce qu’ils sont) et en n’abordant pas la problématique de répartition des richesses, ont essayé de remédier à la faible réactivité de notre économie par l’augmentation de l’investissement. Si 28% comme taux d’investissement ne suffit pas à réaliser les 6,7%, on peut passer à 40%.
Notre système productif n’est pas structuré pour répondre d’abord aux besoins de la consommation locale. Orienté au départ pour répondre à une demande externe plus riche, il a poursuivi dans cette voie dans ses composantes les plus performantes, même après l’ouverture économique. Les entreprises qui destinaient leur production au marché local, faute d’une véritable mise à niveau, ont rendu pour la plupart le tablier sous les coups de boutoir des importateurs véreux et de l’informel, qui demeurent les principaux bénéficiaires de la hausse du pouvoir d’achat des Marocains ces dernières années.
Il faut espérer que la nouvelle donne politique permettra de disposer d’un Etat suffisamment fort pour entamer une éradication de l’informel, ce ne sera pas facile, et imposer un contrôle plus rigoureux sur les prix et qualités des marchandises importées.
Une croissance plus soutenue, grâce à des PME ayant retrouvé leur vitalité pour répondre à une demande locale croissante et développant les activités liées à la mise en valeur des territoires que permettent la décentralisation et l’amélioration des infrastructures. Une répartition plus équitable des fruits de la croissance, seule réponse intelligente à l’informel.
Voilà quelques pistes susceptibles de nous doter des moyens qui nous permettront d’entrevoir un avenir à la mesure de nos ambitions et de notre Histoire et de ne pas nous encager dans un taux de croissance qui demeure somme toute modeste.