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Organisé par le Réseau pour le droit des femmes aux terres collectives et Guich, avec la participation d’ONG en provenance de Zagora et de Ouarzazate ainsi que les femmes soulaliyates de toutes les régions du Maroc, cette action intervient après celle organisée le 2 juillet 2009 pour la défense et le respect des droits des femmes soulaliyates. Il s’inscrit dans le cadre des actions entreprises par le Réseau pour normaliser la procédure de cession des terres collectives et obtenir une nouvelle loi pour que les hommes et les femmes bénéficient des mêmes droits dans l'exploitation ou la cession de ces terres collectives réservées aux seuls hommes. Pour Amina Tafnout, de l’ADFM : « Ce sit-in sera organisé pour mettre fin à la cession de ces terres collectives car malgré la circulaire du ministère de l’Intérieur, les femmes soulaliyates sont encore victimes de la confiscation de leurs droits ».
Mme. Tafnout pense que cette question est complexe, difficile et a plusieurs paramètres. « La complexité de ce dossier découle de deux facteurs : la multiplicité des coutumes qui régissent cette pratique et les enjeux financiers colossaux que représentent ces terres. Pourtant, cette affaire reste extrêmement importante et a de forts enjeux social, économique et juridique».
En effet, les terres collectives sont des terrains appartenant notamment à des groupes ethniques. Elles sont estimées à environ 12 millions d'hectares et bénéficient à plus de 9 millions de personnes. La gestion de ces terres est assurée par les chefs des tribus ou des délégués mandatés à cette tâche qui veillent à l’utilisation collective de ces terres, selon les coutumes et les us de chaque tribu. Ces terres sont régies par le Dahir du 27 avril 1919 modifié et complété par celui du 6 février 1963 qui organise la relation entre l’autorité de tutelle et les groupes propriétaires. Toute décision ou initiative concernant ces terres collectives ne peuvent être entreprises sans l’agrément de ce ministère et du Conseil de tutelle.
Ces terres sont exploitées de manière collective par le biais de l’usufruit ou de la jouissance de rentes revenu de ces terres par les ayants droit. Certaines zones n’ont pas hésité à adopter une répartition définitive, comme ce fut le cas dans le Moyen Atlas où des terrains collectifs sont devenus des propriétés exclusivement transmises aux bénéficiaires de sexe masculin.
Tout au long de leur histoire, ces terres collectives ont connu certaines répartitions sur la base de critères qui ont progressivement évolué, changeant selon le temps, les lieux ou parfois l’humeur des gens. Dans un premier temps, les techniques de répartition étaient basées sur le « Kanoun » avant d’être articulées autour de la notion d’«ayants droit», exclusivement de sexe masculin. Il s’agit d’hommes mariés ou de femmes veuves ayant des enfants de sexe masculin. Aujourd’hui, le concept d’«ayant droit» ne signifie que les hommes âgés de 16 ans et plus. Les femmes sont évincées et exclues. Leur droit de jouissance de ces terres a été confisqué quelle que soit leur situation. Femmes veuves ou divorcées avec enfants ou pas, elles sont privées de ce droit.
Il faut attendre 2007 pour qu’une plainte déposée par des femmes issues de la tribu de Lhaddada (région de Kénitra) pousse le ministère de l’Intérieur à reconnaître le droit des femmes à bénéficier des terres collectives et à adresser au wali de la région un courrier lui intimant l’ordre d’inscrire les collectivités en instance de cession de terres dans la démarche d’intégration des femmes dans les listes des ayants droit au même titre que les hommes. Grâce à cette décision, seules les femmes de la jamâa de Mehdia ont été indemnisées, au mois de novembre 2009. Les autres femmes soulaliyates des autres régions du Maroc se sont retrouvées face aux mêmes abus que par le passé. En 2008, un mouvement de protestation a été lancé de la ville de Kénitra par un groupe de femmes activistes et sous l’égide de l'Association démocratique des femmes marocaines (ADFM) pour dénoncer cette injustice sociale et économique. Depuis, les actions et les manifestations se sont enchaînées. L’ADFM et le Forum des alternatives Maroc (FMAS) ont saisi même le Tribunal administratif. Des poursuites ont ainsi été engagées par les femmes soulaliyates à propos de la légitimité des décisions du Conseil de tutelle concernant la cession des terres collectives et leur exclusion des procédures d’indemnisations.
L’Etat est-il conscient des enjeux de cette affaire ? « Il est difficile de répondre. Cependant, on a demandé à plusieurs reprises une rencontre avec le ministre de l’Intérieur. Seule la direction des affaires rurales, tutrice légale de ces terres, a accepté de nous recevoir. Ses responsables ont affiché une certaine compréhension et solidarité à nos revendications. A ce propos, il y avait la circulaire de ce département et, du coup, certaines jamaâ ont pu bénéficier de leurs droits. Mais ce qui manque, c’est la généralisation de la mise en application de cette mesure et son suivi. La bonne volonté ne suffit pas à elle seule. Il faut des actes concrets, notamment dans ces temps où les opérations de cession de ces terres s’accélèrent», a conclu Mme Tafnout. Affaire à suivre.