Le silence des Sages alimente la polémique sur la mission de la HACA
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Pour cet ancien Sage, le conseil n’a pas fonctionné en gardien du temple audiovisuel. « Le CSCA n’a pas été vigilant et surtout n’a pas veillé à une interprétation ouverte, moderniste de la Constitution. Il s’est borné à une lecture purement technique alors que plus que jamais son rôle n’est pas technique », explique cet ex-membre de la HACA.
Que s’est-il passé ce 29 mars 2012 avant que ne soit rendue publique la décision 13-12 et 14-12 portant approbation des cahiers des charges de la SNRT et de la SOREAD-2M? Y a-t-il eu débat entre les Sages ? Comment la décision d’approuver ces cahiers des charges qui bouleversent de fond en comble le paysage audiovisuel marocain public a-t-elle été prise surtout si l’on sait que les principaux responsables de la SNRT et de 2M n’ont eu connaissance de la dernière mouture des nouveaux cahiers des charges que tard dans la nuit de ce même 29 mars au cours d’une réunion marathon au ministère de la Communication? Impossible d’avoir une réponse officielle : tous les Sages que nous avons contactés ont eu la même réponse. Soumis à une obligation de réserve, ils ont interdiction ferme de parler à la presse. « Notre porte-parole est Ahmed Ghazali le président de la HACA. Lui seul est habilité à parler à la presse », nous ont-ils signifié à l’unisson.
Problème, Ahmed Ghazali a décidé de ne pas parler à la presse. En tout cas, pas pour le moment. « Il s’exprimera au moment opportun au cours d’une conférence de presse. Les journalistes pourront lui poser toutes les questions qu’ils veulent. Pour l’heure, il n’interviendra pas dans un débat politicien et s’interdit toute surenchère», nous a-t-on fait savoir dans son entourage.
La HACA est pourtant au cœur d’un débat passionné et passionnel parce qu’il met en jeu un modèle de société. De l’opposition à la majorité en passant par les professionnels, ils sont de plus en plus nombreux à le dire haut et fort : les cahiers des charges élaborés par Mostafa El Khalfi, le ministre islamiste de la Communication, sont l’expression d’une volonté claire de poser les jalons et les fondements d’un projet de société que porte le PJD. « Plus grave encore, la coalition gouvernementale ne semble pas du tout cautionner un tel projet d’islamisation des médias publics », rappelle un député de l’USFP. Question : la HACA se devait-elle se suffire d’une simple lecture technique du document qui lui a été transmis par M. Abdelilah Benkirane ? « Les Sages devaient fonctionner en rempart, en véritables gardiens du temple, parce qu’ils sont justement une émanation de la société.
C’est pour cela qu’ils ont été choisis et nommés à la HACA et non pas pour se réfugier derrière une mission purement technique. En recevant les cahiers des charges, la HACA aurait pu prendre son temps et ouvrir des consultations avec les opérateurs que sont la SNRT et 2M », relève avec amertume un cadre de la SNRT. La même incompréhension est perceptible chez ceux et celles qui font la 2ème chaîne de télévision. «La ligne éditoriale de 2M a été complètement changée. De grandes options ont été prises, comme la disparition par exemple de la langue française sur Al Oula. Des publicités ont été interdites remettant en cause la survie économique de la 2ème chaîne. Que fallait-il de plus pour interpeller la HACA et qu’elle se pose des questions sur le modèle de télévision que ce gouvernement veut promouvoir et surtout si le modèle de société qui lui sous-tend est conforme aux principes et valeurs prônés par la Constitution», s’interroge un journaliste de 2M toujours groggy par la disparition/décalage du JT de 20h45 diffusé en français.
Un ex-Sage : « On menaçait même de démissionner »
Le CSCA a-t-il fonctionné en institution constitutionnelle ? A-t-il rempli jusqu’au bout sa mission en donnant son imprimatur aux cahiers des charges/grilles des programmes de M. El Khalfi ? « Non, répond cet ancien Sage. De tels cahiers des charges n’auraient jamais dû passer. Une raison parmi tant d’autres : la question du pluralisme linguistique largement remise en cause par la copie de l’actuel ministre de la Communication est suffisante pour que la HACA ne valide pas ces cahiers des charges. Comment penser qu’il n’y a pas eu de débat à ce sujet et quels sont surtout les arguments qui ont poussé les Sages à approuver de tels cahiers des charges ? Je me rappelle de nos débats houleux sur des questions stratégiques qui pouvaient remettre en cause l’option démocratique et d’ouverture du projet Maroc. Certains d’entre nous menaçaient même de démissionner ! ».
Un professionnel des médias audiovisuels qui a fait partie de ceux et celles qui ont posé les fondements de l’autorité régulatrice préfère mettre en avant un problème de fond : on ne s’est pas donné les moyens nécessaires de protéger la démocratie, et celle audiovisuelle en particulier. «Le problème réside dans la loi 77-03 relative à la communication audiovisuelle. Cette loi a effectivement été élaborée pour consacrer la libéralisation de l’audiovisuel mais à aucun moment on a pensé à garantir par des textes l’indépendance des médias publics du gouvernement. En fait, nous avons pensé que nous étions tous de grands démocrates et l’hypothèse d’islamistes au pouvoir n’a jamais été sérieusement envisagée », conclut-il dans un sourire amer.