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“Quand j’étais petite, mes parents m’interdisaient de poser des questions et de trop parler. Au cours de mon cursus d’études, j’hésite toujours de participer car je crains que mes collègues se moquent de mon français. Alors qu’aujourd’hui, je peux dire ce que je pense et débattre de différents sujets avec mes collègues”, se réjouit-t-elle.
Les propos de cette étudiante reposent la problématique de la corrélation entre la formation et la recherche d’un emploi, thème qui taraude les milliers de celles et ceux qui fréquentent quotidiennement les différents établissements d’enseignement supérieur au Maroc.
Un responsable de recrutement au sein de l’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences (ANAPEC) à Rabat a estimé qu’il existe actuellement une crise de compétences et non pas une crise d’emploi , soulignant que le clivage entre la formation universitaire et les offres d’emplois est plutôt sociétal qu’institutionnel .
Il a, dans ce cadre, déploré le manque d’ambitions et du challenge chez les étudiants qui cessent de prendre l’initiative au niveau des études et en matière de création d’entreprises, rappelant que la formation universitaire n’est qu’une formation de base qui nécessite d’être enrichie par le développement des compétences personnelles afin de s’intégrer dans le marché du travail.
Kawtar, étudiante en première année de Droit à la même faculté, compte sur son effort personnel pour développer ses compétences linguistiques et communicationnelles. Selon elle, pour trouver un emploi et s’imposer parmi un aussi grand nombre de diplômés, “il faut être brillant dans ses études, être un bon orateur et développer ses savoirs faire et être”.
“Nombre de gens pensent que la formation universitaire est à la portée de tous, alors qu’il est très difficile d’étudier à la faculté et de réussir avec mention”, a-t-elle estimé.
“Internet a étouffé chez les étudiants la curiosité de lire des ouvrages, d’analyser et d’avoir une culture générale, condition sine qua non pour pouvoir prétendre réussir dans ses études”, a-t-elle poursuivi.
Les points de vue divergent ainsi sur le rôle de l’université en matière d’intégration dans le marché du travail. Si les uns estiment que cette institution académique offre aux étudiants des formations inadaptées au marché du travail, d’autres arguent qu’elle offre une formation de base et que c’est à l’étudiant de développer ses compétences personnelles.
Interrogé sur la qualité de la formation universitaire, Mohammed Boutata, professeur d’économie et de management à la faculté Mohammed V d’Agdal, a déclaré à la MAP que les universités n’ont pas la possibilité de sélectionner les nouveaux étudiants, ce qui engendre un encombrement, une formation de masse et un faible taux d’encadrement .
“On peut noter une insuffisance au Maroc en matière de création d’emplois par l’économie nationale”, a affirmé M. Boutata, relevant que le secteur privé, dominé par la PME, n’a pas la capacité d’absorber des profils de cycles universitaires, mais plutôt des lauréats de formations professionnelles.
Au fond de la buvette de la faculté des sciences d’Agdal, Mohammed, étudiant en première année en sciences de la vie et de la terre sirote son café. Les yeux fixés sur l’écran de son Smartphone, ce jeune homme au crâne rasé et à l’air évasif a refusé d’assister au cours de chimie. “Tout ce que le professeur devra nous apprendre est sur le polycop. Il ne fournit aucun effort pour nous expliquer et nous assister au cours des travaux pratiques. Je préfère faire des exercices chez-moi”, a-t-il lancé.
La formation pratique des étudiants, par le biais de stages au niveau des entreprises et administrations, n’est pas à la portée de tout le monde au regard du nombre élevé des universitaires, ce qui constitue un manque à gagner pour les étudiants en perspective de leur insertion future dans le marché de l’emploi, a estimé à ce propos M. Boutata.
Il a regretté, toutefois, que malgré tout ce qui a été entrepris dans le cadre de la réforme licence-master-doctorat (LMD), les universités marocaines n’arrivent pas à se passer des formations non demandées par le marché du travail, ou au du moins réduire les effectifs des étudiants au niveau desdites formations.
M. Boutata a invité, à cet égard, les universités à adopter une approche volontariste et mener des enquêtes auprès des employeurs afin d’adapter et de réviser la formation universitaire et ne pas continuer à donner de faux espoirs aux jeunes qui vont se retrouver après avec des formations qui ne répondent nullement aux besoins réels du marché du travail.
L’universitaire a également appelé à mettre en place des stratégies économiques permettant la création d’emplois supplémentaires, à développer les relations universités-employeurs et à promouvoir des compétences nouvelles au sein des universités marocaines à travers la révision des méthodes d’apprentissage.
“Au Maroc, nous avons un atout majeur qui est la jeunesse, mais il faut l’orienter vers des formations qui vont apporter une valeur ajoutée à l’économie nationale et à leur bien être personnel”, a-t-il préconisé.