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Le jeune homme, originaire de Berkane, était agent de sécurité dans un magasin de bricolage en Seine–Saint-Denis (banlieue parisienne). Un poste qui lui permettait à la fois de subvenir aux besoins de sa femme et de son jeune fils résidant à Dijon ainsi qu’à ceux de sa famille restée au pays.
Le 30 mars dernier aux environs de 19 heures 10, un couple se présente devant le magasin où travaillait Saïd Bourarach en vue d’y effectuer quelques achats. Ce dernier leur en refuse légitimement l’accès puisque l’enseigne fermait officiellement ses portes à 19 heures et que par conséquent, aucun client n’était autorisé à y pénétrer après cette heure. La suite ? Une succession de propos insultants à l’égard de l’agent de sécurité, ainsi que des menaces de mort rapportées par les collègues de Saïd, témoins de l’altercation.
Une poignée de minutes plus tard arrivent sur place des hommes identifiés comme étant le frère du client ainsi que ses cousins. Face à la violence des quatre hommes, Saïd et ses collègues se réfugient à l’intérieur du magasin.
Les agresseurs, loin de se satisfaire de cette réaction, s’en prennent alors violemment à la chienne du jeune homme restée à l’extérieur. Ce dernier sort alors de l’enseigne afin de prendre la défense de l’animal. Après un échange de coups, Saïd Bourarach s’enfuit le long de la route longeant le canal de l’Ourcq non loin du magasin. La suite est tragique : les collègues de Saïd partis à sa recherche ne trouvent trace du jeune homme nulle part et ce n’est que le lendemain que le corps du jeune homme est repêché dans le canal.
Une donnée qui peut sembler mineure mais qui a toute son importance dans ce cas précis : la confession juive des agresseurs.
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Les quatre hommes interrogés par la police nient pour le moment avoir poussé Saïd Bourarach dans le canal de l’Ourcq, tandis que son avocat, lui, rappelle que le jeune homme savait parfaitement nager. Et quand bien même l’agent de sécurité n’aurait pas été jeté dans le canal, il s’agit d’un point de vue pénal d’une agression suivie de non-assistance à personne en danger.
Outre la violence qui a découlé d’un incident terriblement banal, le plus inquiétant dans cette histoire reste sans doute la faible médiatisation de la mort de Saïd Bourarach ainsi que celle de la classe politique.
A ce jour, seuls le Collectif contre l’islamophobie en France, SOS Racisme, le MRAP (Mouvement contre le racisme et l’amitié entre les peuples) ainsi que le Grand rabbin de France ont fait part de leurs condoléances à la famille de Saïd.
Sans tomber dans le clivage communautaire facile, l’on peut néanmoins s’interroger légitimement sur l’absence de médiatisation et de condamnation à ce sujet. En effet, la semaine dernière, Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur s’est rendu à Tremblay en banlieue parisienne pour apporter son soutien à des chauffeurs de bus victimes d’agressions dans des quartiers dits sensibles, et ce après le démantèlement d’un trafic de drogue dans la zone. Dès lors, pourquoi ne pas avoir fait un crochet par Bobigny pour dénoncer l’agression de Saïd et apporter son soutien à la famille ? Comment expliquer le silence des politiques français, habituellement enclins à s’exprimer sur de nombreux sujets ?
De plus, force est de constater que les actes antisémites, eux, sont surmédiatisés, à juste titre, se doit-on d’ajouter. Pourtant l’on ne peut pas dans cette affaire ne pas rappeler qu’en 2004 « l’affaire du RER D » avait suscité l’emballement de toute la classe politique française ainsi que de tous les médias en un temps record. A l’époque, une jeune femme avait prétendu avoir été passée à tabac à cause de sa confession juive. Un évènement qui avait suscité un tolllé contre les communautés africaines et maghrébines de France, et ce avant même que la véracité des actes ne soit vérifiée. Au final, face à l’ampleur prise par l’affaire, la jeune femme avait avoué s’être mutilée elle-même, et avoir tracé des croix gammées sur son corps. Si médias et personnalités politiques avaient par la suite dénoncé ces affabulations, nul n’avait exprimé de regrets pour avoir condamné sans appel toute une partie de la population française aux motifs de leurs origines.
A ce sujet, le communiqué de l’Union des Associations musulmanes de Seine-Saint Denis est on ne peut plus clair : « Si la crainte de certains de voir une flambée de violences communautaires se répandre justifie le mutisme intolérable des médias et des politiques sur ce lynchage, nous pensons que c’est plutôt ce silence qui va alimenter la haine et la frustration. »
Il est fort à parier en effet, que face à cette inégalité de traitement, le sentiment d’injustice qui en découle exacerbe les violences communautaires déjà nettement palpables dans cette région.
Comment expliquer en effet que la mort de l’un de nos ressortissants à l’étranger ne suscite que si peu d’émoi ? La valeur d’un homme français se mesurerait-elle désormais en vertu de sa confession ?
Aujourd’hui, famille et proches de Saïd Bourarach attendent que toute la lumière soit faite autour de la mort du jeune homme et que toutes les responsabilités soient établies. Une attente qui est d’autant plus douloureuse qu’aucun soutien de taille n’a été apporté à ces derniers.