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Vivant et travaillant à Barcelone, Khalid El Bekay est considéré comme l’un des peintres marocains les plus talentueux. Né en 1966 à Casablanca, l’artiste témoigne d’un parcours atypique. En 1990, il avait obtenu son diplôme à l’Institut supérieur des Beaux-Arts de Tétouan. Peu de temps après, il s’installe à Barcelone où il soutient en 1995 une licence en Beaux-Arts, section gravure. Très saluées par les critiques, ses œuvres sont souvent empreintes de formes simples et tranchantes: poires, pommes et tasses de café. C’est sa marque déposée qui l’accompagnera jusqu’à aujourd’hui. «Comme tous les artistes, Khalid El Bekay puise la part la plus significative de son œuvre dans son vécu, ses expériences personnelles. Quand il s’est installé à Barcelone, après l’obtention de son diplôme à l’école des Beaux-Arts de Tétouan, le peintre a substitué à la consommation de café celle du thé. C’est d’ailleurs le thème de sa dernière collection d’œuvres intitulée «Le T du Thé» exposée récemment à Casablanca. «La nostalgie du thé m’a conduit au café. Il a fallu du temps pour m’en rendre compte et en saisir le sens », affirme-t-il.
Ce changement d’une habitude liée à la consommation d’une boisson parmi les plus répandues au monde aurait pu passer inaperçu ou s’inscrire dans l’ordre des choses si l’artiste n’avait pas commencé à peindre des tasses de café à Barcelone. Il expliquait son attirance pour cet objet par des considérations strictement picturales : la forme, le chromatisme du blanc, précise le critique d’art et galeriste Aziz Daki.
Et si l'art contemporain a pour désinvolture de se séparer, il faut bien admettre qu'apparemment ce temps est révolu. L'art que Khalid El Bekay nous donne à apprécier aujourd'hui n'a plus grand-chose à voir avec cet art contemporain - art de la séparation et du sublime détachement, du néo-plasticisme à l'expressionnisme abstrait - qui semble réjouir certains artistes peintres ou sculpteurs.
En fait, il s'agit avant tout d'un soupçon vis-à-vis de l'art contemporain marocain prôné comme méthode de travail par cet artiste. Sa méthode d'approche du regardeur procède par induction de virtualités contenues dans l'œuvre qu'il ne reste plus qu'à nommer. En chargeant un peu ses tableaux, on peut avancer qu'une telle pratique n'a de cesse de réaliser un programme idéologique, en même temps qu'esthétique, de réhabilitation des notions d'identification et de reconnaissance. Là, c'est d'ailleurs la grande force de la forme constante de notre artiste, qui n'appelle pas à contestation interprétative. «L’odyssée de la couleur conduit presque naturellement l’artiste vers l’arabesque qui confirme cette charge décorative de son œuvre sur laquelle j’avais déjà attiré l’attention dans un texte antérieur. Les pièces calligraphiques de Khalid El Bekay sont le juste pendant en arabesque de la couleur. Mais l’artiste introduit dans cet équilibre des couleurs et du geste calligraphique une zone d’ombre qui brouille les codes d’appréhension tranquille et rend l’œuvre contingente avec des territoires troubles – ceux-là mêmes qui constituent l’énigme des œuvres d’art », conclut Aziz Daki.