Portrait: “El Chapo” Le roi des narcotrafiquants qui rêvait de gloire


Lundi 11 Janvier 2016

Simple petit paysan cultivant la marijuana, Joaquin “El Chapo” Guzman était devenu l’un des hommes les plus riches de la planète, un puissant narcotrafiquant dont la soif de gloire semblait sans limite, et l’aura finalement perdu.
Le prestige de “El Chapo” s’était considérablement accru dans le monde entier après son évasion rocambolesque, digne d’un film hollywoodien, d’une prison de haute sécurité près de Mexico en juillet dernier, par le biais d’un tunnel de plus d’un kilomètre creusé sous la douche de sa cellule.
Mais Joaquin “El Chapo” Guzman en voulait davantage et s’apprêtait à construire un nouveau chapitre de sa légende, tourner un film à sa propre gloire en pleine cavale, provocation suprême qui aurait consacré définitivement sa légende de “Robin des bois” se moquant des pouvoirs.
Son ambition démesurée et ses rêves cinématographiques l’auront finalement conduit à sa perte, permettant aux enquêteurs de remonter jusqu’à lui et de l’arrêter lors d’un raid sanglant dans la localité de Los Mochis, dans l’Etat de Sinaloa, son fief natal.
Né le 4 avril 1957 à Badiraguato, “El Chapo”, diminutif de “chaparro” (“courtaud”), allusion à son mètre soixante-quatre, avait abandonné l’école en fin de primaire pour travailler dans les champs de marijuana du Sinaloa, un Etat rural du nord-ouest du Mexique, berceau des principaux “capos” mexicains de la drogue.
C’est dans les années 1980 qu’il entame véritablement sa carrière dans le crime organisé, au service du “Parrain” du cartel de Guadalajara (centre-ouest), Miguel Angel Félix Gallardo.
Une des premières tâches du trafiquant est de nouer des contacts avec des cartels colombiens, afin d’alimenter en cocaïne les Etats-Unis, l’Europe et l’Asie.
Après l’arrestation de Félix Gallardo en 1989, ses lieutenants se répartissent ses territoires et “El Chapo” s’établit dans le nord-ouest du Mexique, où il fonde avec d’autres le cartel de Sinaloa.
Arrêté au Guatemala en 1993, il est envoyé à la prison mexicaine de haute sécurité de Puente Grande, dans l’Etat de Jalisco (ouest), d’où il s’évade de manière rocambolesque déjà, caché dans un panier de linge sale en 2001.
“El Chapo” reprend alors la tête du cartel de Sinaloa et en fait, en quelques années, l’organisation criminelle la plus puissante du Mexique, n’hésitant pas à éliminer ses rivaux.
Lui aussi est visé. En 1993, le cardinal Juan Jesus Posadas Ocampo est abattu par des hommes de main à l’aéroport de Guadalajara. Ils l’auraient confondu avec “El Chapo”.

Baignoire amovible   

Spécialiste des tunnels secrets, Guzman en fait construire des plus ou moins sophistiqués pour acheminer la drogue aux Etats-Unis ou échapper à la police. On en retrouvera un dans sa propriété de Culiacan, dissimulé sous une baignoire amovible qui lui permettra d’éviter de justesse son arrestation.
C’est le criminel “le plus intelligent et avec la meilleure capacité de réaction” qu’ait eu à affronter la justice, selon le défunt super-procureur mexicain José Luis Santiago Vasconcelos.
Le mythe de Guzman s’accroît dans la clandestinité et il devient l’un des symboles du trafic de drogue contre lequel l’ancien président Felipe Calderon (2006-2012) décide de déployer l’armée.
 Sa tête est mise à prix cinq millions de dollars par les Etats-Unis et plus de 2,2 millions par le Mexique.
De nombreuses légendes et rumeurs entourent son personnage, depuis une opération de chirurgie esthétique faciale jusqu’à des promenades incognito dans les foires aux bestiaux du Sinaloa.
On raconte qu’il lui arrive de se rendre dans des restaurants à la mode, de confisquer les téléphones portables des clients avant de dîner, puis de prendre congé en payant l’ensemble des additions.
Après 13 ans de traque, des militaires parviennent à le capturer en février 2014 pendant un raid nocturne dans la station balnéaire de Mazatlan (Etat de Sinaola). Il est envoyé dans la prison d’Altiplano, à 90 kilomètres à l’ouest de Mexico, un établissement de haute sécurité dont il parviendra à s’évader le 11 juillet 2015.
Joaquin Guzman aurait eu trois ou quatre épouses. La dernière est une jeune reine de beauté épousée à son 18e anniversaire, en 2007, dans une cérémonie fastueuse surveillée par des hommes armés, et un hélicoptère. On lui prête la paternité de dix enfants. L’un d’eux a été assassiné en 2007 au cours d’une fusillade dans un centre commercial de Culiacan, la capitale de l’Etat de Sinaloa.


Lu 1296 fois

Nouveau commentaire :

Votre avis nous intéresse. Cependant, Libé refusera de diffuser toute forme de message haineux, diffamatoire, calomnieux ou attentatoire à l'honneur et à la vie privée.
Seront immédiatement exclus de notre site, tous propos racistes ou xénophobes, menaces, injures ou autres incitations à la violence.
En toutes circonstances, nous vous recommandons respect et courtoisie. Merci.




services